Au feu!
A chaud, redire ce qui a été déjà développé dans différents textes. Il est temps d’engager la mutation, de réactualiser le modèle français dans le Sens du bien commun et pas dans le Sens de l’arrogance et de l’impuissance.
Des jeunes “des banlieues” se disent victimes de la police. Tout se passe dans ce qu’ils disent comme si la police était illégitime et abusive à tel point que la mort d’un jeune est fatalement voulue par les policiers.
Un rodéo s’organise, on brûle d’abord des voitures puis des bus, des écoles, gymnase, commerces, non pas dans les beaux quartiers mais à proximité, chez soi presque.
N’y a-t-il pas quelque chose de suicidaire à s’attaquer à son propre monde et en terroriser les habitants et même les enfants ? leurs parents, leurs frères et sœurs?
Là-dessus la spectacularisation enflamme le pays et même les télévisions du monde. On explique sans trop de souci d’exactitude et ni de précaution dans le rappel des contextes que c’est la faute au “chef de la police”, ci-devant ministre de l’intérieur. Répété à l’envi cela devient un mobile justificateur.
Vous voyez bien disent les jeunes pris à témoins, la police nous fait la guerre, c’est intolérable.
Ces jeunes, des mineurs de 12, 13 ans et des majeurs, peur de rien, respect non plus. Que se passe-t-il ?
Les politiques menées depuis 30 ans (ou 20 ans) ont échoué, s’accordent les commentateurs. Les étrangers l’identifient au modèle républicain (c’est-à-dire au modèle français car il y a d’autres républiques dans le monde). C’est “l’intégration à la française” qui a échoué, l’ascenseur social est totalement en panne. Cependant si on écoute chacun, tout ce qui a été fait ou presque était bon et surtout ce qui a été défait forcément.
Qu’est ce qui se passe? Qui sont les incendiaires, Où sont les problèmes ? Quelles solutions ?
L’Humanisme Méthodologique ne peut pas ne pas apporter son éclairage, rassemblant plus de 20 ans d’analyses.
S’il y a un mal français, c’est le terrorisme de la pensée qui condamne la conscience publique à l’aveuglement malgré les sursauts et la sagesse dont peuvent jouir les français eux-mêmes.
D’ailleurs on entend bien les paroles des gens des quartiers qui prennent en charge leurs problèmes, pleins de sagesse. Mais dès que sont repris les “mots d’ordre” de la pensée publique, c’est la catastrophe.
Évidemment les médias ne nous ont pas habitué à l’élaboration d’une pensée publique, partagée, mature. Pas le temps, pas assez d’impact émotionnel, pas assez captivant (clients captifs) et puis surtout le risque de révéler un fond de commerce qui fait plus dans la “petite vertu” que dans la grande.
Quatre questions clés indissociablement liées
– 1) L’autorité
– 2) La communauté et le “lien social”
– 3) Le Sens du bien commun
– 4) L’empowerment
1) L’autorité
On ne peut pas soutenir simultanément publiquement un irrespect de l’autorité, celle des élus de la république par exemple et s’étonner que les enfants ne respectent pas l’autorité, des parents, des pouvoirs publics, des institutions publiques, de la police.
Incendiaires ceux qui font cela, incendiaires aussi ceux qui ignorent le caractère symbolique de l’autorité et de la parole d’autorité.
En fait l’inintelligence collective en la matière atteint des sommets malgré quelques tentatives de réparation ces dernières années (même à la télé on montre à des parents comment rétablir leur autorité et à quels dégâts leur carence conduit leurs enfants).
Seulement l’autorité est un principe qui touche à l’essentiel, être auteur de son existence. C’est ce dont ils sont privés qui conduit à ces actes vengeurs. Privés d’être !…
Il y a notamment trois manières de disqualifier l’autorité !
– l’autoritarisme qui l’assimile au pouvoir d’annihiler “l’autorité” de l’autre, le soumettre ou le séduire,
– l’idéal rationaliste qui disqualifie toute autorité personnelle au nom de modèles abstraits, seuls maîtres des choses et des gens. La “Raison” d’Etat par exemple annule toute autorité personnelle et promet une prise en charge de l’être des gens qu’elle ne peut tenir effectivement (75 % des jeunes veulent devenir fonctionnaires!…). On nous montre des réussites dans les banlieues: des jeunes qui ont réussi en créant leurs entreprises. D’autres, avec bac plus cinq sont au chômage.
– le matérialisme systémique ou systématique qui ramène tout à la gestion des choses, des flux, aux procédures, aux lois de la nature ou de l’économie, aux calculs statistiques ou comptables, aux lois du hasard et surtout aux budgets. Une science et une technologie de la disqualification de l’autonomie humaine, souvent au nom de la liberté. Pensées uniques, pensées iniques.
L’autorité c’est la conquête par chacun du fait d’être (co) auteur de son existence et cette maturité vient de la confrontation avec les figures d’autorité et de leur respect.
Respect demandent-ils, il faut des autorités respectables pour y répondre, c’est-à-dire qui portent chacune et ensemble témoignage d’autorité humaine.
2) La communauté
La réalité de l’existence de chacun se construit dans l’espace de relations humaines que constituent les communautés. C’est là que se construisent non seulement les corps mais aussi les psychismes et le Sens du devenir.
Bien sûr il y a des communautés archaïques qui n’arrivent pas à se gouverner pour évoluer et grandir. Est-ce une justification pour disqualifier le fait communautaire et le remplacer par une abstraction juridique, un lien social administré ? C’est pourtant là une base du “modèle français” en faillite.
La régulation se fait dans la trame même des relations communautaires et le grandir en dépend totalement, sous condition que les repères appartiennent à la communauté, des repères d’autorité.
La République n’est que communauté de communautés et les communautés sont des communautés de personnes appelées à être auteurs de leur existence. Si la république se veut seule communauté, elle tue la liberté d’être humain. Seules les communautés avancées en réchappent, un temps. Ça souffre en France.
Lorsque l’éducation nationale abdique de sa vocation éducative et que les communautés qui portent seules la possibilité même d’autorités parentales et donc du grandir, sont disqualifiées, alors c’est un modèle de désintégration sociale qui est à l’œuvre.
On le voit partout où les communautés ne sont pas assez fortes, évoluées, pour tenir malgré tout.
3) Le Sens du bien commun
Lorsqu’il n’y a pas un “Sens du bien commun” dont il est témoigné par des figures d’autorité au sein de communautés (sans lesquelles rien n’est en commun) alors il n’y a pas de justice. Le juste et le non juste ne sont plus repérables. Ils le disent.
Si un Etat républicain a une utilité, c’est bien de faciliter la possibilité d’une justice sur les lieux même où elle se joue, les communautés. Mais à quoi servent les communes et communautés territoriales sinon à constituer des espaces de devenir en commun. On préfèrera sans doute en faire des espaces administratifs pour quadriller le territoire ou de ces entités définies par le flux des choses plus que par l’âme des gens.
Si l’Etat monopolise “la justice” et en dépossède les communautés humaines alors les plus fortes continuent à établir malgré tout une régulation du juste et de l’injuste chez elles, les plus faibles ne peuvent pas. Cà brûle. Ce n’est pas la justice d’Etat qui est en jeu mais la capacité pour les communautés d’assurer d’autorité, le Sens du bien commun. Les gens dans les quartiers tentent de le faire en se faisant communautés de devenir. Qui va les y aider sans se substituer à elles?
4) L’empowerment ou capacité d’assumer son destin
Il se cultive au sein de communautés protectrices, éducatives, formatrices qui construisent l’individu puis la personne responsable, engagée dans la charge du bien commun.
Or “l’empowerment” réclame des compétences, des méthodes adaptées à chaque âge de maturation. Prises en charge dans les moments les plus archaïques, facilitation de l’apprentissage de capacités d’auto-subsistance, d’habitation, de sécurité et de confort. Participation ensuite à des affaires communes et enfin engagement à des responsabilités dans le devenir de la communauté-cité, politiques donc.
Le modèle français veut ignorer le premier et second stade ainsi que le quatrième. Il n’y a plus d’escalier, ni d’ascenseurs pour accéder à l’étage des abstractions rationnelles et institutionnelles, ni aller au-delà d’ailleurs (disqualification du politique). On a retiré l’échelle.
Il n’y a « d’emploi » qu’à cet étage. Par contre il n’est pas permis aux autres communautés de grandir par leur travail. Elles le font alors dans l’illégalité, délinquance, travail au “black” dit-on maintenant.
Les faiseurs de loi mettent hors la loi ceux qui ne sont pas de leur caste. Ils ne veulent pas non plus que le Sens du bien commun leur soit signifié pour interroger leur responsabilité “politique”.
L’Europe, bon miroir du modèle français, refuse d’assumer la dimension politique en disant le Sens de son bien commun. Elle érige des barrières pour que ceux qui ne sont pas à son étage ne puissent y accéder. Ces barrières quadrillent aussi nos territoires, nos villes. Pas de quartiers ! La question est dans la rue.
Que faire ? Les principes et le principal.
1) Considérer les communautés réelles avec leurs complexités humaines, communautés de communautés à toutes les échelles. (Éthique de la considération, du “nous” et de la conscience collective des communautés).
2) Se soucier du Sens du bien commun qui n’est pas n’importe quel Sens porté par la communauté mais le meilleur.
Il faut l’élucider, il touche aux profondeurs culturelles du lien inter-humain; inconscient collectif sans doute avec tous ses potentiels et ses risques.
3) Reconnaître, rassembler, toutes les figures d’autorité, repères d’une même communauté pour incarner le même “Sens du bien commun” de la communauté. Tout un travail, surtout avec des représentants de “l’autorité publique” souvent dénués d’autorité personnelle.
4) Engager des stratégies “d’empowerment” selon les niveaux de maturité collective avec les compétences et méthodes différenciées qui conviennent.
Cela “donne du travail”, engage les potentiels culturels, cultive intelligence et compétence collective, favorise initiative, créativité, esprit d’entreprise et enfin la prise de responsabilités “politiques” dans la cité.
Ne nous y trompons pas, c’est une véritable révolution qui est à opérer, intellectuelle, conceptuelle, méthodologique, une autre échelle de valeurs où la fraternité ne sera plus un simple idée juridico-sentimentale mais le nom même du lien communautaire interhumain, le propre de l’homme.
Mais pour cela il faut assumer les “prises en charge” aux stades les moins évolués.
il faut aussi permettre l’apprentissage de l’auto-subsistance, l’auto-construction, l’auto-organisation progressive.
Ne pas croire qu’un emploi, salarié, c’est-à-dire un contrat de subordination est la bonne voie, unique, de l’empowerment.
Il y a là une masse d’obstacles des tenants du “modèle français” qui veulent interdire ces marches là et crient au loup plutôt que de permettra ça. Bien pratique pour détourner l’attention de l’essentiel.
Il n’y a que des “sagesses communautaires”, communautés territoriales, communautés de tous ordres, de toutes dimensions, considérant leur Sens du bien commun, qui peuvent en venir à bout.
Ne confiez pas à ceux qui n’en veulent pas au fond d’eux-mêmes le soin de restaurer l’escalier social (pas seulement l’ascenseur qui ne marche que pour les élites).
Enfin restaurer le politique, figure d’autorité, incarnant le Sens du bien commun. Ne pas tolérer les disqualifications constantes pour détourner sur les politiques la faute des technocrates et des idéologues ceux qui disqualifient l’autorité de l’homme, à tout âge.
Au travail ! Une fois le feu provisoirement éteint par la police, sous l’autorité de la nation, dans le Sens de son bien commun.
Des textes nombreux qui traitent de ces questions :
Directement
L' »empowerment » des territoires
Autorité politique et cohésion sociale
Politiques locales de sécurité
indirectement
La bulle rationaliste ou le mal français
Le lien social lien de concourance
La fraternité et le lien social
La fraternité principe républicain
Mondes et communautés humaines
Crise des représentations crise de la raison
Niveaux de maîtrise de l’action
Pour un développement durable approprié (bis)
L’évaluation des politiques publiques