Pour réhabiliter le politique

Il est temps de repenser le politique pris entre une scène publique de disqualification et une scène locale où le dévouement au bien commun et la confiance des électeurs restent majoritaires.

Il est vrai que la conception machiavelienne du politique qui est souvent celle des partis et de « techniciens » des collectivités ou de l’Etat ignore le Sens du bien commun y substituant un supposé intérêt général bien particulier.

Le politique , on le voit, réclame une nouvelle compréhension et de nouveaux repères. Il est presque entièrement dominé par des logiques qui ressortissent de cohérences humaines préjudiciables à tous :
celles de la possession et du pouvoir d’emprise

celles du rationalisme qui résout la question au prix de l’abandon du réel de l’humain au profit de ses seules formes, fussent-elles idéalisées.

celles du naturalisme, qui s’éloigne des deux et se fondent sur la négation du spécifique humain, ramène le politique à une gestion des choses.

La logique que nous développons ici fait du Sens l’essentiel et le spécifique de l’humain donc l’enjeu essentiel du politique, sa justification même. Il y faut associer des modalités indicatrices qui permettent aux hommes politiques d’en suivre la flèche, au moins déjà du regard.

I – COHERENCES POUR REHABILITER LE POLITIQUE
ET S’IL FALLAIT A NOUVEAU SE METTRE A PENSER ? (1990)
C’est aujourd’hui un sentiment diffus : Rien ne va plus au royaume du politique. Les hommes politiques reçoivent de plein fouet le soupçon d’être la cause d’une certaine crise de confiance sans doute en l’absence d’une crise de conscience trop longtemps différée.

Peut être faut-il voir un peu plus loin que la dénonciation des turpitudes et celle d’une incompétence masquée par les petites et grandes manoeuvres du pouvoir.

Les politiques seraient-ils si vils qu’alors le politique en aurait perdu toute noblesse ? Sans parler de la politique ! Elle est populairement comprise trop souvent comme art de la manipulation intéressée de tout et de tous.

Dans d’autres milieux (dans les entreprises le terme de politique fait partie de ces concepts flous fréquemment utilisés) n’entend-t-on pas dire aussi « ma politique c’est de faire ceci ou cela », ou même « la meilleure politique c’est de ne pas en avoir », sans doute pour signifier que seul l’évènement commande l’action, toute réactive, de l’homme de pouvoir ?

Il y a là un signe qui doit nous alerter. Si les politiques ont si mauvaise presse, c’est peut-être que le « politique » est un terme qui a perdu son sens.

Au fond n’y a-t-il pas un rapport entre la signification du terme et le sens idéologique du gouvernement de la cité.

Lorsque meurent les idéologies alors meurt le sens qu’elles portent et celui des termes qu’elles soutenaient de leur élan et de leurs horizons.

La crise du politique est une crise du Sens, symptôme d’une crise de civilisation, si souvent évoquée, jamais ;lucidée. Tel n’est pas notre propos ici.

Cependant réhabiliter le politique ne peut s’envisager qu’en lui redonnant un Sens.

Sens de l’action politique, Sens du rôle des politique, Sens de l’avenir engagé, Sens qui fait la substance des CON-SENSUS. C’est aussi le Sens qui donne une cohérence à la vie des hommes et des communautés, des individus et des sociétés, à l’action présente en vue de l’avenir, à l’identité collective qui est projection, donc en projet (il y a là une définition de la notion de cohérence par l’unité de sens d’un ensemble de facteurs).

Réhabiliter le politique, c’est renouer avec l’essentiel, mais c’est aussi oser déroger à la loi du superficiel qui n’est pas sans contribuer à creuser le vide où il semble devoir s’abîmer.

Au contraire, n’est-ce pas en touchant au coeur de l’homme que le politique va retrouver son Sens -Sens humain, il va de soi.

Mais alors n’y aurait-il pas quelque cohérence à avouer entre :

La noblesse du politique ancrée dans une éthique qui donne valeur par son Sens au coeur de l’homme.

L’autorité politique fondée dans sa nature d’incarnation d’un con-sensus lequel justifie, en retour, l’élu du coeur de la communauté.

La maîtrise de l’action politique qui est pouvoir, pouvoir d’accomplir la vocation singulière de la cité, voie ou Sens d’accomplissement du lien d’urbanité.

Et enfin, si le Sens est le coeur de l’homme, c’est la nature humaine qui fonde toute cohérence du politique et qui ressource toute réhabilitation.

Telle est la perspective ouverte par l’anthropologie nouvelle inaugurée par la Théorie des Cohérences Humaines et sa vision « cohérencialiste » du politique.

Aussi le projet de réhabilitation du politique peut-il n’être pas vain ou simple réhabillage de conscience (bonne) ou de façade (belle).

Aussi est-il clair que la crise du politique trouve sa source dans la perte de vue de la question du Sens et le déclin de ses prothèses-idéologiques.

Elle se révèle simultanément :
– dans le soupçon qui subvertit la noblesse faute de sens éthique,
dans l’absentéïsme et la dérision démagogique disqualifiant l’autorité, rendue in-signifiante faute d’incarnation d’un con-sensus.
– dans les jeux possessifs du pouvoir compensant l’absence de maîtrise, faute d’avoir discerné le Sens de la marche où toute communauté trouve à accomplir sa vocation propre.

LA NOBLESSE DU POLITIQUE
c’est le courage d’assumer le Sens de ce qui fait Valeur pour les hommes. Il y faut des hommes valeureux. Et ce qui fait la valeur, c’est ce qui contribue au bien de l’homme, c’est-à-dire ce qui va selon l’éthique.

Mais que serait le bien de l’homme s’il devait être radicalement ; pendant de la Nature humaine. Y-a-t-il une éthique des composés biochimiques ? S’il y a des faiseurs de ce genre d’éthique alors ne nous étonnons pas que leurs éventuels alliés politiques ne trouvent âme qui vive le jour des élections sauf peut-être quelqu’âme biochimique ou quelqu’amer esprit de sel.

Peut-on réhabiliter la Noblesse du politique sans retrouver référence à l’essentiel, à ce qui, dans sa nature, propre marque en l’homme la voie de son accomplissement.

L’AUTORITE DU POLITIQUE , c’est l’incarnation responsable du Sens en consensus (qui, donc, en répond).

Elle est ainsi, avant tout, symbolique, c’est-à-dire figure signifiante et signifiant l’alliance qui noue le collectif en communauté : territoriale, nationale, locale, citoyenne, etc… Mais si le lien est Sens partagé alors l’identité collective se forme en projet commun, perspective de développement et non en simple mirage statique ou statistique. Alors l’identité élective est celle de celui qui, s’en faisant comme l’Auteur, se retrouve faire Autorité.

La Théorie des Cohérences culturelles montre que toute communauté humaine, nation, cité, a une personnalité culturelle dont l’un des sens détermine une « vocation » originale. Donnant une finalité possible à la collectivité le politique y trouve sa justification et son enjeu.
Son projet politique, dans lequel se reconnaît la communauté est ce par quoi il en est reconnu. Reste à connaître du consensus, le plus intime, l’âme de la communauté sa personnalité culturelle profonde, ce que mettent de leur coeur en partage les hommes qui la composent.

LA MAITRISE DU POLITIQUE , c’est, on s’en doute, la maîtrise du Sens. Mais comment ne pas en appeler au sens de la maîtrise, celui qui dans la tradition signifiait Pouvoir, pouvoir « servir », étymologiquement racine des termes « ministre » et « administration » . Sens de la maîtrise qui ne peut être autre que celui d’un talent selon une vocation, comme celle que le compagnon cultivait en allant son chemin.

Ici, la compagnie est la communauté, dotée d’une vocation propre, l’homme politique, le compagnon qui l’accompagne. Comme le disent si bien les mots, si on en écoute le Sens, partager le pain en compagnie ne suffit pas, encore faut-il qu’il y ait une fin, un Sens, un consensus (l’économique est condition, mais pas fin du politique si tant est que l’homme ne se nourrit pas que de pain).

La maîtrise du politique, c’est l’art d’accomplir en actes la vocation commune, c’est la science des voies et moyens du développement de cette vocation dans son économie et dans ce qu’elle réclame d’éducation pour se conduire et dans ce qui y a de potentialités à y mettre en culture pour faire civilisation.

C’est encore la méthode par laquelle l’homme politique responsable pourra :
– Discerner le Sens de la vocation collective au coeur de la personnalité culturelle de la communauté : quartier, nation ou cité,

– Eclairer le Sens de son devenir et de ses horizons spécifiques au travers d’un projet identificatoire. Projet d’entreprise commun et aussi des lumières que chaque événement obscur réclame.

– Incarner le Sens pour faire repère et le signifier au travers d’actes symboliques et des signes de l’Autorité afin que le lieu du lien social soit rappelé et en appelle toujours au meilleur.

– Impulser le Sens afin que la parole politique s’incarne aussi en mouvement collectif par le biais des relais indispensables et selon les stratégies qui conjuguent intentions et circonstances.

La maîtrise du politique est celle de la pertinence et de la cohérence de l’action toujours selon un Sens : celui d’une vocation collective.

On en vient à découvrir que s’il n’y a pas de vocation à discerner et accomplir dans les communautés humaines alors le politique n’a pas de Sens et les hommes politiques ne sont que marionnettes en théâtre, actionnées par les fils de leurs faims.

Il faut pour cela reconsidérer l’anthropologie celle qui dit quelque chose de la nature de la personne humaine et, par voie de conséquence, du lien du Sens de la communauté, l’axe de cohérence des affaires et entreprises humaines.

Peut-être faut-il aussi essayer de se mettre à penser pour dépoussiérer quelques visions idéologiques figées dans les contingences historiques des passés qui sont leurs, pour aussi ne pas se laisser aller au courant qui, d’un même mouvement, creuse le vide de sens du politique et se réalise dans des visions « modernistes » ;omécanistes qui s’offriraient volontiers à le combler de Néant. Autogénérateur paraît-il. Ah ! l’amour du désordre en politique ! Révolutionnaire non ?

Peut-être faut-il se mettre, à penser le politique autrement qu’à réfléchir en miroir le déjà pensé.C’est ce qu’offre aujourd’hui à engager la Théorie des Cohérences Humaines, cohérences aussi bien de « l’homo-politicus », le nouvel homme politique réhabilité.