025 – La conscience analytique
La conscience est re-présentation de l’expérience humaine. Cette re-présentation est une expérience que l’on appelle conscience de la réalité. La conscience analytique qui est décomposition en éléments correspond à la dimension objective de l’expérience de conscience. Ces derniers termes seront repris lorsqu’il s’agira d’autres dimensions et composantes de «l’expérience de conscience» , l’expérience de pensée par exemple.
La conscience analytique est re-présentation d’une expérience première mais ce peut être de toutes et de chacune des dimensions et composantes de cette expérience. Ainsi on peut considérer que chaque type de conscience peut s’appliquer à chacune des dimensions et composantes de la réalité de même que chacune de ces dimensions et composantes de la réalité première peut être re-présentée par chacun des types de conscience. Cela peut paraitre compliqué mais l’expérience de la conscience l’est même si les principes sont simples et l’ignorer est source d’égarements que l’histoire humaine nous fait connaître. Nous verrons, le moment venu que cela dépend du Sens dans lequel nous sommes disposés. Pour en finir avec cette introduction il faut rappeler que la conscience est une expérience qui elle-même est enjeu à son tour de re-présentation. La conscience s’applique à la conscience. On peut en effet développer une pensée de la pensée d’un philosophe par exemple ou de n’importe quel discours. On pourrait parler d’une méta conscience. Seulement cela pourrait se développer à l’infini. C’est dire l’intrication des re-présentations, des expériences réalisatrices, la complexité du monde d’expérience humaine, la difficulté de retrouver sous ces couches de conscience, l’être qui en est le lieu en son Instance. C’est pourquoi l’homme en développant sa ou ses consciences peut en arriver à se perdre de vue en tant qu’homme. La sagesse serait-elle comme cela a déjà été préconisé d’économiser la libre conscience individuelle pour éviter de se perdre? Oui s’il elle divague, non si elle se discipline pour atteindre l’effet inverse, la révélation de son humanité transcendante. C’est à cela que sert la connaissance de la conscience humaine et des clefs de sa complexité.
La conscience analytique procède par objectivation. Il s’agit de distinguer en se distinguant. Décomposer, séparer, différencier, dénombrer, compter, prendre en compte, en sont des actes élémentaires. On peut s’étonner d’analyses qui se ramènent à des tableaux de chiffres qui font le courant de professionnels éclairés et dont la représentation quantitative est le mode de conscience privilégié. Ils nous parlent cependant de réalités complexes et même peuvent donner aux chiffres le statut de réalité première. Si la conscience analytique s’applique à la dimension objective de la réalité, expérience première du Consensus, la présence de l’altérité et de l’aléa, alors la probabilité quantifiée est un mode de conscience analytique. La quantification, la numérotation, le comptage d’éléments sont les figures types de cette conscience analytique objectivante d’une «réalité objective». Il se construit des sciences quantitatives là-dessus et même des théories des nombres amenant à de nouveaux degrés de re-présentations. Qu’on en vienne à croire que la réalité est nombre il n’y a qu’un pas depuis longtemps franchi.
Mais la conscience analytique est aussi re-présentation de la dimension subjective, intentionnelle. Elle tente d’objectiver, de distinguer différentes intentions et leur mode de présence (présentation). Elle va par exemple établir des typologies avec des moyens de distinction. Nous en utiliserons avec les cartes de Sens ou de Cohérences. Les intentions sont l’expérience première du Sens rappelons-le. Ici on va donc distinguer, les qualités, les quiddités, en nommant pour distinguer. On pourra distinguer des aspirations, des motivations et il est bon qu’il en soit ainsi pour ne pas tout confondre. C’est un mérite de cette conscience séparatrice. Reste à s’assurer qu’elle discerne bien son objet à objectiver. Là viennent des problèmes. Ce mode de conscience ne peut y pourvoir seul. Confierait-on à un statisticien le soin de dénombrer les intentions s’il n’est pas en mesure d’établir des critères objectifs des différences subjectives? Un problème majeur d’une conscience sinon d’une science impuissantes à objectiver une subjectivité qu’elles ne discernent pas.
La conscience objective, analytique, est aussi re-présentation de la réalité projective. A ce titre elle va distinguer des degrés dans des ordres rationnels, des écarts par rapport à des critères de développement ou de progression. Elle peut dénombrer et distinguer des parties dans des ensembles en développement. Seulement si elle ne dispose pas d’une dimension projective de la conscience elle va réduire une réalité spatio-temporelle, un développement existentiel, en tableaux de chiffres et classements hiérarchiques. Nous voyons là ce qu’est un réductionnisme. L’objectivation ne sachant saisir son objet redécoupe la réalité projective selon ses critères. Par contre si elle sait appréhender le processus de développement elle pourra le caractériser par ses critères propres et les distinguer par sa re-présentation analytique. Un problème classique de gestion ou de contrôle de gestion où les critères «comptables ne sont pas ceux de la construction et la conduite des processus. La conscience analytique réductrice en vient à atomiser le continuum des processus de développement au lieu de permettre de l’évaluer selon ses propres échelles de valeurs. Le drame de l’évaluation analytique sans conscience projective.
La conscience analytique et objective de la réalité sensible. La réalité sensible est l’expérience de l’affectation de l’Instance par celles qui partagent un conSensus. L’éprouvé est le vécu du rapport dans la relation de présence absence selon le Sens en jeu. La conscience objective re-présente cette composante dans la distinction de ce que l’on peut appeler les nuances du vécu ou les nuances attribuées à la réalité considérée. On trouvera dans l’analyse des nuances émotionnelles, celle des sons, des couleurs, des goûts et autres musiques ou «vibrations de l’âme» une marque de la conscience objective. Des quantifications, des mesures, dénombrent des quantités, des degrés, des fréquences, des rythmes avec toute une arithmétique de la sensibilité. Le réductionnisme objectiviste ira jusqu’à considérer que ce sont les seules configurations numériques qui expliquent les nuances, les sensations, les effets émotionnels.
La conscience objective analytique de la réalité factuelle. Distinguer et dénombrer les faits, les effets, les masses, les caractères physiques des choses et de leurs comportements est une activité de conscience objectivante classique. Ces mesures constituent des re-présentations objectivées de la réalité à tel point que ces représentations peuvent passer pour la réalité elle-même, comme si les nombres étaient agissants, les compositions et décompositions le seul principe actif. La conscience objective distingue et sépare les corps et nous distingue et sépare en tant que corps individuel. Le réductionnisme objectiviste oublie que c’est l’Instance de ce corps individuel qui objective. L’objectivation est un acte qui réclame un sujet et l’objectivité est une attitude, pas un fait. La conscience objectivante fournit des re-présentations de l’expérience première et peut être prise pour réalité première par cet oubli.
La conscience objective de la réalité formelle va s’attacher à distinguer, séparer, dénombrer des formes. Elle procèdera par catégories et typologies quantifiables, classements. Le «numérique» est cette activité qui gère des quantités d’informations en re-présentation des formes, images, modèles, textes, langages, etc.. Le réductionnisme objectiviste fera de cette re-présentation numérique la réalité première. De même l’analyse quantitative viendra comme source explicative des formes et des structures de l’expérience et des réalités formelles. La statistique par exemple pourrait se substituer aux identités culturelles, aux représentations mentales, aux idées, qui ne seraient éventuellement que quantités d’impulsions cérébrales. On retiendra là aussi la différence entre la conscience objective, dimension de la conscience existentielle qui prend acte de l’altérité dans l’expérience du conSensus et le réductionnisme objectiviste qui fait passer cette conscience comme source de la réalité objectivée et les modèles quantitatifs comme source de toutes formes.