L’évaluation des retombées du tourisme

La question de l’évaluation des politiques de tourisme territoriales et donc l’établissement des référentiels de valeurs indispensables plaident en faveur d’un « tourisme des valeurs » qui apporte en retour les instruments nécessaires.

L’article paru dans vieille entourisme du Québec relayé par vieille info tourisme en France pose une fois de plus la question de l’évaluation de l’activité touristique pour un territoire. Le cas de la Croatie y est évoqué avec une disproportion massive entre l’accroissement du tourisme et les retombées pour le pays.

article Croatie

Évidemment sans évaluation à quoi bon une politique ou une stratégie territoriale? Il faut obligatoirement imaginer sa valeur pour en décider tant qualitativement que quantitativement. Alors pourquoi pas de méthode d’évaluation ni même d’évaluation de fait en général ?

S’il y a évaluation, au contraire, une politique ou une stratégie touristique par exemple deviennent celle d’une “entreprise communautaire” dont on cherchera légitimement à améliorer les bénéfices pour la communauté territoriale et donc aussi à rechercher les moyens et méthodes de “gouvernance” efficace.

On en est encore loin si bien qu’on se contente facilement de mesures qui n’ont aucune signification connue ou certaine pour évaluer l’activité touristique. C’est comme si on mesurait la vitesse du vent pour évaluer le bien être d’une population. Il peut quelque fois y avoir un lien mais surtout on préférera mesurer la vitesse du vent que le bien être que l’on ne sait pas mesurer.

il faut en venir là à une clé tout à fait étonnante. L’étonnement vient de son évidence. Comme la lettre volée d’Edgar Alan Poe le fait qu’elle soit en évidence, à sa place, l’a occultée aux yeux de qui la cherchait.

Toute évaluation suppose l’existence d’un référentiel de valeurs et qui plus est partagé s’il s’agit d’évaluation communautaire.

Il faut donc d’abord s’entendre sur les valeurs auxquelles l’activité touristique doit répondre pour ensuite l’évaluer. C’est très exactement ce que propose le tourisme des valeurs. Il apparaît d’ailleurs non plus comme une fin en soi mais comme un moyen et sans doute de plus en plus le moyen privilégié du développement. Bien sûr, le développement, durable et approprié, doit lui aussi être conçu comme développement de valeur selon des valeurs identifiées.

Ainsi le tourisme des valeurs doit déboucher sur la question de l’évaluation et en venir à la construction d’outils et de dispositifs d’évaluation territoriaux.

Comment? Les travaux de l’Humanisme Méthodologique ont largement traité la question tant en ce qui concerne les entreprises en général (cf. la méthode des référentiels de valeurs partagés MRVP ) tout à fait transposables aux territoires, qu’en matière de contrôle de gestion (avec les travaux du collectif de recherche sur la gestion de l’immatériel CRI et les publications de Dominique Bessire notamment, exemple article afest ou gestion de l’immatériel …)

Les ressources permettant d’élaborer une politique touristique territoriale à partir d’une identité culturelle prospective et les valeurs propres du territoire sont les mêmes que celles nécessaires à l’établissement d’un référentiel de valeur partagé, c’est-à-dire aussi d’un système d’évaluation approprié.

Reste aux communautés territoriales à franchir le pas de l’évaluation de leurs politiques en référence au système de valeurs propres qu’elles ont à élucider.

Les entreprises touristiques

Il y a bien sûr les caricatures de l’exploitation du territoire par des entreprises prédatrices. Cela existe évidemment et il est quelque peu aberrant de confondre leurs critères de profitabilité avec ceux de la communauté territoriale.

Il y a aussi ces sites qui voient défiler des milliers ou des millions de personnes sans que l’on aperçoive quelles retombées sérieuses en résulte, surtout une fois financés les équipements et la gestion. Les financements publics masquent souvent le problème.

Cependant il y a un très grand nombre d’acteurs du tourisme, d’entreprises qui en vivent, publiques ou privées et qui doivent légitimement assurer leur pérennité, leur développement et donc leur profitabilité.

Alors quelle corrélation avec les critères d’évaluation de la communauté territoriale?

La méthode des référentiels de valeurs partagées et les travaux sur lesquels elle repose apportent la réponse.

D’abord la notion de valeurs qui sont toujours à considérer comme des indicateurs “du Sens du bien commun”. La valeur est, elle, la mesure de la contribution au bien commun.

Il n’y a donc pas de valeurs, ni de valeur sans “communauté de référence” déterminée sinon choisie.

Les entreprises peuvent (et le font) choisir comme communauté de référence leurs actionnaires, (valeur actionnariale), leur personnel, leurs clientèles, leur marché, l’ensemble des parties prenantes, etc. C’est leur responsabilité et elles évaluent leur activité selon le système de valeur considéré (pour le pire ou le meilleur).

Cependant elles peuvent aussi choisir la communauté territoriale comme communauté de référence. Des entreprises commencent à le faire dans d’autres domaines, clusters, pôle de compétitivité… pour trouver un ancrage, gage de pérennité.

Dès lors toutes les entreprises touristiques qui en font le choix concourent au développement du territoire selon ses valeurs propres et en retour bénéficient de la puissance de synergie et d’attractivité qui en découle.

Bien sûr les critères d’évaluation propre à une entreprise touristique donnée ne sont pas formellement identiques à ceux de la communauté territoriale. La méthode des référentiels de valeurs partagés apporte aussi la solution avec le principe de traduction locale d’un référentiel général.

Ce sont tous les bénéfices et les applications de la méthode (MRVP) qui sont disponibles pour les entreprises touristiques, tant pour leur “performance globale” que pour un “management par les valeurs” et une évaluation locale et globale cohérente de l’activité touristique territoriale.

Il est clair qu’un référentiel de valeurs partagé par les habitants, tous les acteurs et ceux du tourisme, conduit à un positionnement et une identification cohérente, et aussi à un partage de ces valeurs avec les visiteurs qui les apprécient. Les moyens d’évaluation partagés sont alors à la disposition de tous, condition de maîtrise d’une activité collective et de prospérité de chacun qui y participe.