Pour un développement durable approprié
Comment réduire l’espace entre le discours incantatoire et l’action. Encore faut-il qu’elle soit appropriée aux conditions et par les hommes.
Le thème du développement
durable est de plus en plus répandu dans les références
des politiques publiques de développement, d’aménagement
ou de prévention.
Cependant on ne peut que constater l’écart
entre un certain succès verbal et la difficulté
d’aboutir à des réalisations effectives autres
que formelles (chartes, déclarations, etc…).
Il y là à nouveau un véritable
problème d’appropriation sur le terrain, une
épreuve de réalité.
Cette situation mérite une analyse
pour la comprendre qui mènera à une proposition
opérationnelle.
En effet une série de confusions
rendent le concept inexploitable. Sans retrouver un Sens et une
cohérence de fond qui articule théorie et pratique
le clivage entre le discours et la pratique persistera.
I – L’ANALYSE
Un constat est quelques fois fait, c’est
celui de l’opposition ou de l’ambiguïté entre une
interprétation du développement durable comme projet
de société ou comme strict projet environnemental.
Il y a là en effet un symptôme
dont il faut explorer les sources pour trouver les clés
d’une résolution du problème.
Sont face à face deux conceptions
erronées.
La première conçoit une société
indépendante de son environnement terrestre. Celui-ci
n’est rien d’autre que ressources à exploiter et d’ailleurs
à évaluer dans les termes d’une économie
qui cherche à faire rentrer en comptabilité matières
premières, énergie, espaces et pourquoi pas l’eau,
l’air et les paysages.
L’exemple de ce type de conception, c’est
l’économisme qui conçoit une société
d’exploitation généralisée sans interrogation
sur le Sens de cette exploitation.
Les excès des logiques industrielles
sont bien connus avec leur cortège de pollution, de gaspillage,
d’épuisement de la ressource et leurs raisonnements à
court terme.
Il n’est pas besoin de rappeler comment
de l’exploitation sans discernement des ressources naturelles
on passe à l’exploitation du "capital humain"
devenu variable de régulation des systèmes économiques.
La seconde conception considère
que la terre est porteuse de valeurs, d’exigences sinon d’état
d’âmes, indépendamment de tout jugement humain,
de toute appréciation subjective, de toute évaluation
culturelle. Dès lors l’environnement devient en soi une
valeur, indépendamment de tout usage, de tous enjeux humains
et "l’état de nature" un idéal à
défendre contre toute emprise humaine.
La contradiction interne radicale de cette
thèse n’apparaît pas aux hommes qui la tiennent
et en défendent les certitudes.
Le développement durable est le
lieu d’une tentative de synthèse entre les deux conceptions
mais qui ne semble déboucher que sur un amalgame. Pire,
elle se traduit par une sorte de schizophrénie où
les deux thèses sont simultanément en présence
et entrent en collision dès que l’on veut l’appliquer
sur le terrain.
Comment faire entrer dans les calculs économiques
classiques des facteurs environnementaux qui relèvent
d’une conception qui récuse ce type de calcul?
Comment demander aux hommes de s’approprier
des politiques qui les placent en situation perpétuelle
d’accusés?
Rio et les conférences qui ont suivi
sont le théâtre de cette division masquée.
Derrière l’unanimité apparente (tout le monde est
d’accord sur le développement durable), c’est un véritable
dialogue de sourd.
Pour les uns, il s’agit d’un problème
de gestion accessoire et ils y mettent toute leur habilité
(on va marchander des droits à polluer).
Pour les autres, il s’agit en réalité
d’un combat planétaire contre les emprises humaines (on
parle aussi de la "pression anthropique").
Dès lors ces thématiques
font l’objet de toutes les récupérations possibles
:
D’un côté c’est la gestion
marchande. Les techniques du marketing et de la communication
font de certaines puissances industrielles les meilleurs défenseurs
de l’environnement (contre qui ?).
Quelques technocrates, un temps accusés
de ne rêver que de grand travaux, y trouvent parfois de
nouveaux moyens de contrôle et d’emprise sur les territoires
et surtout sur le pouvoir politique local.
Des tenants d’une renaturation radicale
tentent de défaire ce que les générations
antérieures ont réalisé au nom de la civilisation.
Les médias exploitent les sensibilités
et en font un jeu d’émotions et de fantasmes.
Au total et sauf exeption rien ne marche
bien lorsque le développement durable devient un objectif
pratique et il semble devenir inapproprié dans l’action
sur le terrain.
A ce constat une réponse est apportée
par les travaux de l’Institut Cohérences tant sur le plan
théorique que méthodologique;
Il y a là des problèmes de
Sens, aussi bien sur le plan sémantique que sur celui
des finalités et celui encore des logiques d’action. Cela
retentit directement sur la compréhension du concept et
sur la cohérence des démarches dont l’échec
est la sanction révélatrice.
Et pourtant le développement durable
ne peut pas rester un exercice verbal dans les déclarations
publiques et les discours savants. La coupure entre les deux
versions dominantes se traduit pas une autre coupure entre le
discours et les réalisations. Les enjeux sont trop importants
pour n’y voir qu’une cause mineure.
Ce qui apparaît, au fond, c’est que
se pose aujourd’hui au travers de cela une question fondamentale
qu’on laisse de côté ou du moins les thèses
simplistes des extrémismes.
Un renouvellement de la question permet
d’éclairer en tout cas le problème ici posé.
On se contentera d’en donner un éclairage suffisant, permettant
de comprendre et de résoudre le problème d’appropriation
du développement durable.
Sur le fond ce qui est en jeu, c’est le
rapport de l’homme et de la réalité dans
laquelle il est plongé. Il peut se reformuler en posant
la question philosophique du rapport entre la nature
humaine et la nature des choses . La réponse
que l’on doit ici considérer c’est que ce rapport est
très précisément la culture
.
Dans la première thèse la
culture se définit par opposition à la nature comme
un arrachement qui en vient d’ailleurs à s’abimer dans
l’esthétisme de la représentation.
Dans la seconde thèse la culture
humaine s’oppose à la nature là aussi en tant qu’elle
l’exploite et la dégrade.
Or ici au contraire la culture est plutôt
un accomplissement conjugué de la nature humaine et la
nature des choses.
La culture c’est le produit du croisement
entre :
– les intentions et les aspirations humaines,
– les conditions environnantes.
C’est donc un troisième terme, une
résultante.
Si maintenant on met en perspective la
culture d’une communauté locale alors on arrive au développement.
Le développement c’est toujours
l’actualisation et l’accomplissement d’une culture. C’est la
résultante, projetée dans l’avenir, du croisement
entre les intentions et aspirations humaines et les conditions
du milieu.
Il est clair que ces deux variables ne
sont pas indépendantes et que leur résultante,
par surcroît, a une incidence rétroactive sur elles.
Nous voyons ici que le premier problème
qui était en fait à éclaircir était
celui du développement et de son rapport à la culture
de la communauté locale ou de la cité. Il faut
souligner que le thème du développement durable
vient reposer sur une confusion générale à
propos du concept de développement, les modèles
des dernières décennies ayant tous plus ou moins
failli. On le voit dans les pays dits "en voie de développement"
ou dans les régions en difficulté.
Cette conception du développement
réconcilie respect de l’environnement et respect de l’homme
ce qui est un chapitre qui mériterait aussi d’autres développements
(cf. Les travaux théoriques de l’Institut Cohérences
avec la théorie des Sens et des Cohérences Humaines).
Elle pose ainsi le développement
comme déploiement, actualisation, accomplissement d’une
culture, ce dont on verra les conséquences pratiques et
méthodologiques.
Maintenant vient un autre problème,
c’est le Sens que donne au développement le qualificatif
de durable. On a vu certaines significations parasites qu’il
peut prendre ce qui rend d’autant plus exigeant l’effort sémantique
dont les conséquences sont aussi bien en termes de finalités
et de valeurs qu’en termes de logiques d’action.
Les cultures humaines sont aussi flexibles
que les intentions des hommes et leurs mobiles aussi.
Il ne suffit pas de refonder le développement
sur la culture encore faut-il y faire le choix d’un Sens, d’une
direction, d’une orientation qui soit bénéfique.
Or comme le montre la théorie des
Cohérences Culturelles chaque culture porte en elle un
"meilleur Sens", c’est celui par lequel elle accomplit
sa vocation singulière, liée à la singularité
de son histoire (récente ou ancienne) et de son milieu
(proche ou distant).
Lorsque le développement vise un
bien commun "inscrit dans la durée" alors le
développement durable trouve son Sens.
Il y a une étroite corrélation
entre le Sens général du développement durable
et le Sens de la vocation culturelle originale de chaque communauté
locale ou territoriale .
C’est comme cela que le développement
durable devient approprié.
En effet,
– il exprime un Sens propre de la communauté
locale, c’est celui de sa vocation culturelle propre,
– il traduit la visée d’un bien
commun dans la durée qui implique par construction:
– persévérance de l’intention
– préservation des conditions
non pas dans une immobilité figée
ou un repli frileux mais dans une dynamique de progrès
et de développement qui accomplit la culture et l’identité
collective.
C’est comme cela que le développement
durable est approprié:
Approprié à la culture, au
milieu, à la communauté locale,
Approprié par la communauté
et ses représentants qui s’y retrouvent profondément
et de façon mobilisatrice.
Voilà donc, dans l’analyse conceptuelle
et sémantique, les clés de l’action et la compréhension
en retour des causes d’échec dues à des interprétations
erronées ou insuffisamment claires.
L’ancrage du développement dans
la culture puis son orientation dans le Sens de la vocation culturelle
de la communauté locale sont la clé de l’appropriation
du développement durable et constituent l’axe de cohérence
de toutes les actions qui y contribuent.
Il faut maintenant passer au deuxième
chapitre, celui de l’action et de la méthodologie qui
apportera encore d’autres éclairages sur la nature et
la culture du développement durable, ouvrant par ailleurs
à un vaste champ de problématiques et de solutions
qui dépassent le présent article.
II – LA PROPOSITION POUR L’ACTION
Elle consiste d’abord en une définition
opérationnelle dont le déploiement méthodologique
donnera le contenu pratique.
Elle s’inscrit par ailleurs dans le cadre
des propositions pour la mise en oeuvre des politiques publiques
et leur appropriation et des projets qui en découlent
(la prise en compte des Cohérences Humaines et la mise
en oeuvre de l’ingénierie humaine).
Mettre en oeuvre un développement
durable approprié, c’est créer une dynamique (culturelle)
d’appropriation active orientée dans le Sens d’un bien
commun durable.
Il faut noter tout de suite qu’il s’agit
de mettre en oeuvre un processus qui deviendra autoporté
(appropriation active) et non pas de formaliser une procédure,
un discours, ni mettre en système des données environnementales.
Il y a là une erreur décisive pour l’action.
Dans le second cas, on ne peut espérer
au mieux qu’une appropriation passive et, le plus souvent, indifférence,
refus ou même simulacre d’adhésion. Il suffit d’observer
authentiquement ce qui se passe sur le terrain pour en voir la
traduction massive.
Il faut aussi soulever ici un point décisif.
L’appropriation active suppose que les responsables et les populations
locales s’approprient effectivement la charge de la connaissance
des problèmes, des prises de position et de l’engagement
persévérant dans l’action et ce à la mesure
des capacités de conscience et de maîtrise des acteurs.
Or les approches précédentes
se trouvent placées devant cette contradiction prôner
la plus large participation démocratique et en venir à
la coercition réglementaire, aux pressions économiques,
à la menace des sanctions pénales et même
à l’attente d’effets magiques d’une communication habile.
Un processus d’appropriation doit résoudre
ce paradoxe d’une volonté déterminée et
efficace des initiateurs et pilotes qui va vers un retrait pour
permettre la montée en puissance de la responsabilité
et l’initiative des acteurs locaux.
On comprend que tout forçage va
à l’encontre de l’appropriation et que ces méthodes
sont vaines… dans la durée !
C’est là que l’on trouve un des
aspects décisifs de cette approche qui est le type de
pilotage approprié et que le terme de "gouvernance"
cher à Christian Brodhag à juste titre, permet
de recouvrir.
L’originalité profonde par rapport
aux pratiques habituelles mérite bien un tel néologisme
(et d’autres encore).
Le débat sémantique est là
aussi décisif. Il en va radicalement de la réussite
ou de l’échec puisque c’est le Sens même de l’action
qui est en jeu.
Il faut souligner maintenant le fait que
l’auteur de toute action est humain, individu et collectivité
et que c’est donc le processus humain d’appropriation sur lequel
il faut travailler plus que sur le contenu du développement
durable qui sera plutôt le fait de ceux qui se le seront
approprié. Or on est là aussi à l’inverse
de ce qui se fait trop souvent et qui revient à imposer
analyses et solutions que personne ne peux ensuite s’approprier.
La compétence requise pour la maîtrise
d’oeuvre des projets de développement durable approprié
est une compétence de construction et de conduite de processus
humain, dans le cadre duquel seulement les travaux techniques
prendront place au fur et à mesure des besoins d’appropriation.
Cela revient à définir des
métiers d’ingénierie humaine qui manquent cruellement
et à en promouvoir et transmettre les compétences
(cf. Ecole).
Enfin la méthodologie qui est ici
proposée est transposable à toute politique publique,
prévention des risques, gestion des eaux, aménagement,
politiques sociales, etc.).
Dès lors il suffit qu’elle soit
ancrée dans la vocation culturelle de la communauté
locale pour qu’elle concoure ipso facto au développement
durable. C’est là un point majeur à considérer
puisqu’il touche aux trois critères de l’évaluation
de toute politique publique.
– Le critère de pertinence : Est-ce
que cela va dans le bon Sens ? (approprié à la
vocation locale),
– Le critère de cohérence
: Est-ce que tout concoure au même but ? (différentes
politiques et projets)
– Le critère de performance qui
correspond à la mesure même de ce concours.
LA METHODOLOGIE DU DEVELOPPEMENT
DURABLE APPROPRIE
Les préalables
Il faut toujours considérer qu’un
tel projet intervient dans une situation et dans une histoire
qu’il faut connaître et pour cela il faut repérer
quelle est la communauté concernée et quels sont
les relais "autorisés" qui vont y donner accès
(les représentants politiques en principe). Au niveau
de ces préalables toutes sortes de cas de figure peuvent
être envisagés et c’est là que des actions
publiques peuvent avoir un effet propédeutique intéressant
qui facilite ces préparations.
1) L’analyse des racines culturelles
Sur ce point les travaux de l’Institut
Cohérences sont décisifs offrant des outils opérationnels
d’analyse en profondeur des cohérences culturelles locales.
Selon le cas, on peut même mener des analyses très
rapides mais suffisantes ou alors aller plus à fond dans
la compréhension profonde des cohérences culturelles
en se servant de l’analyse comme d’une occasion de mobilisation
identificatoire.
Ce type d’analyse permet de comprendre
de façon explicative (plus que descriptive) la logique
des rapports à l’environnement, les valeurs de référence,
les logiques d’interprétation du réel, les projections
d’ambitions, les stratégies de l’action, les processus
de décision, etc… On dispose alors d’un système
explicatif d’une très grande force et dont la pluralité
des Sens permet de comprendre aussi les contradictions et la
diversité des possibles.
Elle permet aussi de dégager le(s)
Sens derrière les formes et donc de discerner les constantes
et les permanences au-delà des variations historiques
ou conjoncturelles. On a donc là les racines à
partir desquelles on pourra "projeter" diverses ambitions
de réalisation.
Ce type d’études est donc aussi
un préalable à toute intervention ou communication
ce qui fait qu’elles devront être souvent prudentes ne
sachant pas à l’avance dans quel Sens (le meilleur) agir.
2) S’orienter dans le sens de la
vocation culturelle de la communauté locale
Il s’agit là de repérer et
de comprendre et d’apprendre à connaître le Sens
culturel de la Vocation de la communauté locale dans son
milieu tel qu’on l’a définit précédemment.
Il faut, à ce stade, faire quelques
observations sur cette élucidation et son intérêt
pour la suite.
La vocation s’exprime d’abord par un Sens
qui peut prendre des formes très variées au fil
de l’histoire et qu’on ne peut donc figer dans une forme quelconque.
Par contre, c’est en la "projetant"
dans un contexte actuel et prospectif que l’on pourra élaborer
des projets de développement, durables et appropriés.
Le Sens élucidé en constituera
l’axe de cohérence. En outre, il se traduira aussi en
une certaine logique culturelle de l’action sur laquelle on va
bâtir une stratégie de conduite du processus d’appropriation,
lui-même non standard, car propre à la culture du
milieu (la méthode n’est pas une procédure mais
un guide pour l’aventure).
Le Sens culturel de la vocation est à
déployer selon tous les plans de l’existence collective
ce qui fait que toutes ses facettes sont impliquées dans
le développement durable et il servira donc de principe
de cohérence à de multiples actions.
Le Sens est encore évidemment ce
qui relie, comme dans la marche, un pas au suivant et au but
final, c’est-à-dire qu’il relie court, moyen et long terme.
En tant que Sens d’une Vocation il est
aussi celui par lequel s’expriment les meilleurs potentiels,
talents, compétences collectives et, en définitive,
qualifications de la communauté. Cela constitue une dimension
de son originalité et la source des meilleurs services
qu’elle peut se rendre ainsi qu’aux communautés environnantes.
De ce fait l’identification à cette
vocation est en général très gratifiante
et c’est le principal vecteur de maturation collective. En effet,
pour qu’il y ait appropriation active il faut qu’il y ait une
motivation collective d’engagement forte qui ne peut s’appuyer
que sur une projection identificatoire gratifiante.
Il faut remarquer qu’il y a là une
clé de la durabilité, en effet les mobilisations
résultant de la crainte ou de la menace s’épuisent
avec le gain de sécurité et ne sont donc pas durable.
C’est ce qu’ont malheureusement compris
bien des dictateurs et qu’il faudrait expliquer chaque fois que
les tentatives de menace, pression et contraintes apparaissent
pour arriver à ses fins. (En dehors bien sur de certaines
situations exeptionnelles inscrites dans une stratégie
pédagogique d’appropriation).
La connaissance de la vocation culturelle
propre de la communauté locale donnera ainsi aux initiateurs
et responsables les bases pour concevoir la stratégie
ad hoc d’appropriation active pour l’élaboration et la
mise en oeuvre d’un projet de développement durable ou
de tout projet qui y concoure.
3) Concevoir un processus d’appropriation
active collective du projet
L’appropriation active ne doit pas être
conçue comme intervenant après que le projet ait
été défini mais avant.
Plus précisément le projet
s’élaborera de façon appropriée pendant
le processus. Le but du processus n’est pas simplement l’élaboration
d’un projet ni même la seule prise en charge du projet
mais il est aussi l’initialisation d’une dynamique de développement
durable qui continuera durablement une fois le processus terminé
en s’incarnant dans toutes les formes appropriées.
A noter là que l’élaboration
d’un projet n’est pas à considérer comme consistant
à dresser un plan bon à exécuter mais comme
la médiation d’une mobilisation et le guide d’une réalisation
dont les formes réelles seront souvent imprévisibles.
On est loin des réflexes planificateurs
et programatiques sauf à s’en référer aux
meilleures réflexions de certaines époques.
Si chaque scénario stratégique
d’appropriation active est original, s’inscrivant dans la logique
vocationnelle de la collectivité, il n’en répond
pas moins à quelques principes généraux.
– Le principe de maturation et
de génération
Sous la condition qu’il soit conduit de
façon stratégique, le processus est à la
fois une progression dans la conscience et la maîtrise
jusqu’à sa conclusion auto suffisante dans l’action et
à la fois une progression dans la génération
de l’action appropriée qui passe par une phase de connaissance,
d’engagement et d’action.
L’importance et le rôle du pilotage
extérieur décroît, lui, au fur et à
mesure jusqu’à ce qu’il soit totalement approprié
par ceux qui en ont la charge dans la communauté.
C’est au cours du processus d’appropriation
de la connaissance que des études techniques seront opportunes
en réponse au souci de connaître plutôt que
d’amener un savoir tout fait en réponse à des questions
qui ne sont pas posées.
Il en va de même au niveau de l’engagement
et des décisions qui ne peuvent suivre des procédures
standards sans que les intéressés soient dépossédés
de leurs cheminements culturellement efficaces.
Encore plus au niveau des solutions qui,
pour être appropriées, doivent être leurs.
Les solutions de développement durable seront les siennes
pour la communauté si elle a fait siens les problèmes
et les aspirations qui s’y rapportent.
On observera ici qu’il y a une grande différence
entre le processus d’appropriation active défini ici et
les pratiques participatives classiques, très décevantes
après avoir soulevé des enthousiasmes. Il y a deux
raisons à cela. Elles ne sont pas supportées par
une source de motivation puissante et durable qui est la Vocation
collective avec les modalités particulières qui
l’expriment. Elles n’arrivent pas à articuler travail
en profondeur (analytique, décisionnel ou de conception
de solutions) avec la spontanéité nécessaire
de participations informelles ce qui conduit soit à un
simulacre de participation soit à un spontanéisme
stérile producteur de lieux communs.
Il y à là aussi un problème
qui doit être résolu à ce propos. C’est celui
du rapport entre une logique top-down et une logique bottom-up
qui loin d’être opposées doivent être conjuguées
à condition de ne pas se tenir sur le même plan.
La démarche verticale est celle de l’initiative du processus,
de l’orientation, de la conduite stratégique et de l’élaboration
des conclusions et décisions sur le fond. La démarche
horizontale participative est celle exploratoire, validatrice,
créatrice et agissante.
– Le principe de relais et d’entraînement
Il est hors de question d’envisager d’initier
un processus d’appropriation active avec toute une population
et on ne peut que s’inquiéter de ce qui est fait et recherché
trop souvent au travers de grandes scènes publiques.
Il y a donc à utiliser l’appui de
relais dont l’appropriation personnelle servira de relais vers
le plus grand nombre.
En réalité, les communautés
évoluées ne sont pas formées d’une masse
d’individus et d’un noyau de dirigeants, elles sont structurées
de façon à relayer et faire concourir les nombreuses
activités et relations de la cité.
Cependant il faut reconnaître que
les structures de la société ne sont pas toujours
l’expression pertinente de sa vocation culturelle et qu’elles
véhiculent quelquefois des logiques et des valeurs qui
ne lui sont pas appropriées.
Aussi faudra-t-il rechercher à partir
de l’autorité politique des dirigeants quels sont les
relais les plus pertinents dans le Sens de la vocation collective
qui seront les véritables appuis pour l’entraînement
de la collectivité.
La stratégie d’appropriation active
ne mise donc pas seulement un petit groupe de personnes et même
si elle peut déjà impliquer un nombre plus important
de personnes (de plus en plus en avançant), elle aura
toujours à ménager la transmission de la dynamique.
Elle pourra heureusement s’appuyer bien souvent sur des relais
compétents et autonomes pour cela d’autant plus qu’ils
se seront bien appropriés la démarche.
Pour la conception et la construction de
la stratégie d’appropriation active, la méthode
de "créativité générative"
(Institut Cohérences) est particulièrement utile
pour imaginer une démarche originale (appropriée),
structurée, juste et intégrant les multiples aspects
du processus à conduire.
Le pilotage du processus d’appropriation
active d’un projet de développement durable.
Il s’agit d’une des compétences
de l’ingénierie humaine mais aussi d’une pratique qui
doit être relayée par les dirigeants de la cité
ou leurs délégués pour la conduite des dynamiques
de développement durable approprié.
Le terme de gouvernance paraît pertinent
pour englober un grand nombre de principes et de méthodes
tant cette dimension est complexe et déborde largement
les conceptions qui aujourd’hui sont devenues notoirement insuffisantes.
Là aussi la terminologie et la question sémantique
sont décisives.
Les travaux de l’Institut Cohérences
sur le "gouvernement des projets et des entreprises humaines"
apportent de nombreux matériaux conceptuels et méthodologiques
à cet égard.
Nous indiquerons simplement ici quelques
aspects de ce travail de "gouvernance".
Il a d’abord comme charge de tenir le Sens
de la démarche qui aura ici été élucidé
en tant que Sens de la vocation culturelle propre de la collectivité,
celui donc du développement durable approprié.
Il aura, bien sûr, fallu le valider
soigneusement au préalable et se garder de plaquer un
Sens général ou inapproprié ou encore de
se trouver engagé dans un Sens inopportun faute de discernement
et de maîtrise.
Le travail de gouvernance est aussi un
travail de consensus (faire partager le même Sens). C’est
une des dimensions de la stratégie d’appropriation collective.
C’est un travail de motivation où
la référence à une "projection identificatoire"
gratifiante et enracinée dans les meilleurs potentiels
de la culture est le meilleur vecteur.
C’est un travail de maturation dont il
faut ménager les étapes et assurer les rythmes
appropriés.
C’est un travail d’appropriation progressive
ce qui fait qu’il faut savoir se retirer progressivement de l’initiative
et ménager une prise en charge, ni trop rapide, ni trop
lente.
C’est un travail d’évaluation de
la situation et de la marche en avant du processus en considérant
les trois critères indiqués :
La pertinence (le bon Sens)
La cohérence (tout est bien articulé
dans le même sens sans contretemps)
La performance (la mesure de contribution
à l’avancement et aux enjeux).
C’est un travail de pédagogie et
même de macro pédagogie dont la portée concerne
une collectivité entière et qui peut passer par
une multiplicité d’acteurs et d’actions et notamment des
actions "symboliquement structurantes".
C’est un travail de concourance non seulement
pour faire concourir à un même but les différents
acteurs et les différentes actions mais aussi pour mettre
en concourance des activités, organisations, institutions,
projets, réalisations, etc. qui, participant au développement
de la cité vont quelques fois dans tous les Sens.
C’est un travail de qualification qui fait
se révéler et s’exercer des talents et des compétences
spécifiques si bien que c’est en les "cultivant"
que le développement durable trouvera les ressources humaines
appropriées liés dans un cercle vertueux de qualification.
C’est encore un travail d’identification
qui joue sur la conscience collective et l’évolution de
l’identité culturelle qui se projette dans une représentation
de ses horizons futurs: le projet de développement durable.
C’est un travail d’animation qui réclame
quelques compétences spécifiques aussi bien en
petit groupe que pour l’animation d’un processus faisant intervenir
un grand nombre d’acteurs.
C’est un travail de maîtrise d’oeuvre
faisant appel à un véritable métier, qui
doit articuler différentes spécialités,
notamment techniques, et faciliter les synthèses, conclusions,
formulations…
Si elle s’initie le cas échéant
par le travail d’un seul, la gouvernance débouche obligatoirement
sur un travail collectif.
Conclusions
Un des défi de notre époque
est d’avoir à aborder des enjeux et des problèmes
radicalement neufs alors que les outils conceptuels et méthodologiques
ne sont pas encore élaborés.
Il est facile, bien souvent, de détecter
des modèles conceptuels, idéologiques et les paris
praxéologiques tout à fait classiques qui opèrent
à l’insu de ceux-là mêmes qui prônent
le changement.
Les travaux de l’Institut Cohérences
portant sur les Sens et Cohérences Humaines ont développés
de nouveaux outils conceptuels et méthodologiques fondés
sur les plans épistémologiques, anthropologiques
et praxéologiques et largement expérimentés
depuis 20 ans dans des centaines de situations.
Ils sont maintenant disponibles et suffisamment
rodés pour être investis dans les enjeux de ce type
et viennent à point pour donner au développement
durable des assises théoriques et méthodologiques
qui lui font défaut sous l’angle de l’appropriation active.
Il s’agit alors autant du Sens du développement
durable que des facteurs de réussite de l’action, tout
cela intégré dans la formule : "développement
durable et approprié".