Les jeux d’identités 4
Différentes applications des jeux d’identités dans divers domaines
II – EXEMPLES D’APPLICATION DES JEUX D’IDENTITES
Nous allons envisager une série de problèmes traités
en étude systématique. Pour chacun d’eux on va
observer quels visages ils prennent selon les champs avec les
rapports interpersonnels, les circonstances et le rôle
des éléments, les processus de fonctionnement.
Selon le cas, ils seront plus ou moins approfondis. Il ne s’agit
pas en principe de traiter ces problèmes à fond
ici, mais de montrer sur des exemples divers ce que l’on peut
assez rapidement obtenir. Ces résultats peuvent être
utilisés pour des formations, des travaux de réflexions,
d’études, d’interventions. Toutes les questions que l’on
souhaite peuvent être traitées de la même
manière. L’exercice en est enrichissant. On peut essayer
aussi bien un mot, un concept pour en dégager les Sens
: qu’un événement , une situation, un problème
quelconque, y compris pour mieux se connaître soi-même.
Nous allons étudier successivement les problèmes
suivants :
– Les relations médecin-malade.
– Les relations parent-enfant.
– Les relations de couples.
– Les relations commerciales, la vente.
– Autres exemples d’applications.
– L’autorité.
– Le rapport au travail.
– L’entreprise.
– L’argent.
a) Les relations médecins-malades
On va envisager cette relation selon les divers jeux d’identité
avec le fait central que constitue la maladie. Selon les cas,
on pourra voir le principe du traitement et le rôle des
éléments tels que les médicaments par exemple.
Avec ce premier exemple, va être mise en évidence
la différence considérable qu’il peut y avoir entre
les champs. On s’apercevra évidemment que ce qui se passe
vraiment recouvre plusieurs Sens selon les cas. Il apparaîtra
aussi des logiques étonnantes en particulier dans le champ
de la dégradation où ce que l’on dit est bien loin
de ce qui est, où aussi, on en est en général
peu conscient. Nous allons envisager successivement les différents
champs avec pour chacun d’eux quelques unes au moins des quatre
possibilités, les deux complémentaires et les deux
symétriques.
– La conquête – C’est le champ de l’objectif
et du scientifique. Celui où l’identité sociale
et la cause sont importantes. L’homme est surtout vu ici comme
un corps qui produit l’intelligence. La maladie est un signe,
une information ou un ensemble de données qu’il faudra
traiter scientifiquement pour résoudre le problème.
Dans le cas du médecin-vedette, c’est le spécialiste
identifié par le malade à sa cause : la spécialité
avec sa maladie. Le malade militant a les symptômes les
plus conformes possibles à la cause. C’est un beau cas,
un cas intéressant. Plus il suscite l’intérêt
du médecin, plus le malade en est gratifié et en
contrepartie il va militer en collaborant efficacement au traitement
avec "l’équipe soignante". Le médecin
reconnu sur la place ou dans son milieu traite "la maladie"
et reconnaît le malade en conséquence. S’il l’oublie
l’autre pourrait cesser de militer. Le malade est fier d’être
un cas et en parle à d’autres militants et on compare.
Cela donne identité et classifications. On utilise les
meilleures techniques, les dernièrs médicaments,
les plus rares, les plus efficaces. Ceux-ci servent à
mesurer l’importance du cas-cause ; ils en deviennent critère.
S’il y en a une belle panoplie, c’est un bon médecin et
un beau cas. L’administration sinon la gestion de la prise de
médicaments est une activité militante-rationnelle.
Elle est par elle même thérapeutique.
La relation inverse est possible avec les cas célèbres
ou exceptionnels. Le malade identifié à la cause-maladie
trouve des médecins militants qui vont mettre un point
d’honneur à vaincre l’obstacle. Ils vont se consacrer
à cette tâche, se dévouer même. Les
médicaments sont leurs outils et leurs armes. Tout à
l’heure la cause était la spécialité, elle
est maintenant la maladie. La science devient instrument pour
"militer". Le malade montre son cas, en parle pour
le proposer en exemple et comme enjeu. C’est le malade vedette
qui quelquefois aussi en sait plus sur sa maladie que ses médecins.
Une bonne stratégie, beaucoup de courage et d’efficacité
et le malade-maladie est conquis.
Nous passerons rapidement sur le couple militant-militant où
la maladie est la cause commune avec chacun son rôle spécifique
dans le traitement, celui de malade, et celui de médecin.
Le chef-vedette-modèle peut être un professeur auquel
on se réfère de temps en temps. C’est le cas en
particulier où la cause, c’est le traitement, la maladie
en étant certes un aspect indispensable. Les partenaires
médecins-malades essaient d’appliquer au mieux la technique
qui les intéresse beaucoup. Là aussi ils collaborent
ensemble au traitement, chacun avec son rôle, et les symptômes
comme mesures.
Dans ce champ le but est toujours de réussir. On est aussi
dans l’univers de la médecine expansionniste, avec les
progrès de la science et la médicalisation de plus
en plus poussée qui produit des militants-malades.
– La dégradation – La maladie n’est plus le cas,
c’est le mal. Le mal c’est la destruction des réalités
physiques ; atteintes au corps, et la destruction des Sens :
angoisse, souffrance… mais aussi culpabilités, perversions
etc…
Le malade peut être très souvent dominateur. Il
se dit et se montre victime et le médecin est en fait
la victime. Son malade ne cesse de l’inquiéter, de le
mettre en échec, de le culpabiliser, sans compter ses
angoisses personnelles que cela peut réveiller. Le médecin
victime va se trouver appelé la nuit ou le week-end par
ce malade. Il n’ose pas ne pas y aller de peur que ça
soit sérieux et d’ailleurs, le jour où il n’y va
pas arrivent les problèmes et donc la culpabilité.
La maladie est l’instrument de pression, ça guérit
mal, ça dure. Les médicaments et les traitements
semblent toujours ne pas marcher, ils sont mis en échec.
Et puis cela s’arrête comme par enchantement : échec
supplémentaire pour le médecin qui y lit la preuve
de son incapacité.
Le cas inverse est très fréquent, le malade est
victime et la maladie dont il souffre est prétexte à
souffrances supplémentaires. Le malade est placé
dans un milieu deshumanisé, traité comme un numéro,
pire comme un simple organe plus ou moins dégradé
"c’est le foie du 17", "le rein du 22". Le
malade perd aussi droit à la parole, à savoir,
à juger. Il est là pour faire ce qu’on lui impose,
sans discuter sinon tant pis pour lui, on le culpabilise le cas
échéant pour avoir transgresser une pseudo règle
impérative. Le traitement est le chemin de croix du malade,
c’est plutôt un mauvais traitement avec toute la panoplie
des petites cruautés. Le médicament est mauvais,
mais il faut bien traiter le mal par le mal. Tout consiste d’ailleurs
à extirper le mal et on sait bien que dans ces cas là
il ne faut pas hésiter, ni faire de sensiblerie. Le médecin
opère et le "patient" subit. Lorsqu’il en a
assez il meurt ou décide de guérir.
Dans tous ces cas la médecine est une chose plutôt
obscure sinon occulte. On utilise éventuellement quelques
potions ou pratiques étrangères qui ont l’avantage
de faire appel à des forces ou pouvoirs cachés.
C’est vrai aussi bien pour les pratiques médicales et
les médicaments que pour les "sorts".
Dans les relations symétriques dominateur-dominateur on
trouve le médecin et le malade qui se plaignent mutuellement
l’un de l’autre. Le médecin trouve son malade peu coopératif,
difficile, l’autre le trouve peu sûr, trop indifférent,
peu efficace. Ils se détruisent l’un l’autre au profit
de la maladie de l’un et de l’épuisement ou l’anxiété
de l’autre.
La relation victime-victime est celle où par exemple l’un
et l’autre affirment que ça va bien pour se sécuriser
mutuellement. Ils se lient d’amitié et le mal progresse
pendant qu’ils se le cachent. Ils se font victimes pour se sécuriser.
Dans ce champ, bien sûr privilégié pour la
maladie, on peut repérer que les discours ou les pratiques
n’ont guère changé depuis des siècles. On
enferme ou exclue, on purifie et on tue le mal, on extirpe les
humeurs délétères et ce , avec des méthodes
modernes. L’obscurantisme domine toujours.
– L’involution – On passe là du mal aux
"ennuis de santé", ou aux "affections".
Ils demandent du repos, du calme et une convalescence. C’est
l’occasion de se faire dorloter, de se faire soigner et être
entouré de soins attentifs. Le médecin maternant
sécurise, protège des risques et des complications.
Pour cela il donne des conseils, une ordonnance avec des médicaments
qui reconstituent : fortifiants, vitamines, sirops, réparateurs,
tranquillisants… De toute façon ça n’est pas
grave, mais il faut prendre des précautions. Le médecin
est prévenant et il ne manque pas de venir faire un tour
pour s’assurer que tout va bien. Le malade, un peu faible tout
de même, se déplace de son lit à un fauteuil
et fait de petites promenades. Il en profite pour se débarrasser
des soucis habituels et demande éventuellement quelques
menus services au médecin. A force de soins et de prévenance
le malade se porte mieux. Sa maladie ne se manifeste plus. Le
traitement est un traitement de faveur. On fait volontiers appel
à la nature en laquelle on a confiance et qui reprend
le dessus.
Le cas inverse se produit où le malade est maternant d’un
médecin enfant. Le premier le sécurise, lui donne
une maladie "facile", "bénigne" sur
laquelle il peut exercer sa compétence. Le traitement
est un jeu et le médicament bien traditionnel. On trouvera
dans ce cas en particulier de jeunes médecins ainsi aidés
par leurs patients ou patientes expérimentés.
Maternant-Maternant est une relation fréquente entre vieux
habitués. Les petits ennuis de santé sont l’occasion
des rencontres amicales où ils sont traités soigneusement
d’un commun accord, tout en conversant agréablement dans
une reconnaissance mutuelle de ses qualités. La réalité
de la maladie dans ce champ est toujours diffuse.
– L’accomplissement- La relation médecin-malade
est principalement du type maître-pratiquant. Le médecin
considère en face de lui un être humain complet
dont la maladie peut être une expression physique d’une
difficulté personnelle. La maladie est le symptôme
apparent de problèmes de Sens et le malade cherche à
sortir de ces difficultés. Pour cela le médecin
maître de son "art" propose au malade un traitement
: rituel, verbal, médicamenteux destiné à
activer les cohérences en cause et pour donner conSensus
et permettre l’élucidation et en conséquence la
disparition des symptômes. S’il s’agit de séparation,
le travail consiste à activer les cohérences "réparatrices"
naturelles ou aussi bien élucider celles qui s’y opposeraient.
Lorsque sont dénoués les Sens des difficultés
manifestées dans la maladie celle-ci disparaît.
On pourrait y voir négation des connaissances médicales
modernes, ce n’en est qu’une relativisation. Elles décrivent
le plus souvent ce qui est descriptible dans les schémas
de pensée culturellement dominants. Cela est vrai aussi
bien de ce que l’on appelle médecines parallèles,
dans d’autres cultures qui fonctionnent exactement sur ce mode.
Que l’on parle de "sorts jetés", "d’esprits",
de "microbes" on peut distinguer la forme culturelle
explicative (et quelquefois les symptômes "culturels"
qui vont avec) des cohérences qu’elle exprime. La constance
est la relation efficace du maître-médecin dont
la maîtrise repose sur "le Sens" qu’il a de l’autre
dans sa maladie et la "connaissance" de lui même
dans sa maîtrise.
Les chamans et beaucoup de guérisseurs sorciers, etc…
dont les instances internationales reconnaissent la relative
efficacité sont bien souvent d’anciens malades, "mentaux"
fréquemment, et qui ont maîtrisé, pour leur
propre accomplissement, les réalités et les Sens
de ces "maladies".
C’est d’ailleurs indispensable pour pouvoir "donner conSensus"
au malade, c’est-à-dire l’accompagner personnellement
dans et même au-delà de ses difficultés.
C’est vrai aussi pour exercer avec justesse l’art médical
quelqu’en soient les pratiques et les instruments. Le médecin
maître est autre chose qu’un technicien, un expert, un
protecteur ou un "arracheur de dents". Le malade PRATIQUANT
suit la discipline qui lui est proposée dans la mesure
de son désir de résolution. Les élucidations
en sont le produit avec disparition de la maladie. La maladie
est expression d’un être dans son corps, son âme
et dans sa situation personnelle. Elle est à envisager
selon le processus de communication dans ses circonstances, son
évolution, et la personnalité propre du malade.
Comme toute maîtrise celle du médecin ne peut être
ici que le fruit d’une véritable vocation personnelle.
b) Les relations parent-enfant
Là non plus on ne traitera pas le sujet à fond.
L’utilisation des jeux d’identités nous permet d’esquisser
différentes relations bien significatives parmi lesquelles
peuvent s’opérer des choix. On s’attachera particulièrement
à ce que représente l’enfant pour les parents.
C’est le Sens qu’ils donnent à son éducation et
ce qu’ils tendent à en faire plus ou moins consciemment.
Se retrouvent toutes sortes d’attitudes et de "principes"
qui ne sont jamais neutre du point de vue du Sens et des pratiques.
On n’examinera que certains aspects de ces relations avec quelques
exemples selon les quatre champs. Les parents sont considérés
comme de même tendances, ce qui est souvent le cas. Le
rôle et la place de l’enfant dans la relation de couple
sera envisagée par la suite.
– La conquête – La cause c’est, par exemple,
l’éducation. Bien entendu l’exemple, le modèle
à imiter c’est l’éducateur et en l’occurence les
parents. Ceux-ci disent ce qu’il faut faire et ne pas faire pour
devenir un bon… Si la cause est plus moderne, on s’attachera
à suivre les principes correspondants. Il s’agit d’être
reconnu comme bon parent en fonction de son comportement. L’enfant-militant
est là pour suivre les principes des parents qu’ils soient
libéraux ou plus dirigistes. Un militantisme est la condition
pour être reconnu par eux et il a bien à répondre
à leurs attentes en s’adaptant. L’éducation est
adaptation et aussi un enjeu pour l’enfant. Les critères
de la cause sont les formes de comportements, l’identité
sociale et la réussite de l’enfant qui constituent la
panoplie de l’existence de l’identité et de la fierté
des parents dont l’enfant reste un appendice dépendant,
une production réussie.
Quelque fois la relation est inverse et la cause c’est l’idéal
de réussite dont les parents rêvent, l’enfant devient
la vedette, un "modèle" et les parents militent
activement pour cela.
Ils se consacrent efficacement et avec dévouement à
sa promotion. L’enfant est perpétuellement gratifié
lorsqu’il se conforme aux critères d’élection de
la cause. Plus il s’y identifie, l’épouse donc, et plus
il reconnaît de ce fait ses parents. Tout cela dans l’univers
des réalités se fonde autant que possible sur des
critères objectifs, des relations formelles, morales (quelques
que soient ces morales). L’enfant comme les parents sont objets,
objets du système culturel auquel ils appartiennent et
qu’ils représentent de manière stéréotypée.
Selon les milieux ils suivent les modes ou les traditions. Ils
sont très déterminés par l’environnement
et les changements ne sont le plus souvent qu’apparents.
Les relations vedette-vedette surtout à l’adolescence
ou même avant entraînent les rivalités que
l’on connaît et qui font tout basculer dans la dégradation
et émerger des sentiments d’échec et d’ingratitude.
Si l’enfant de militant de la cause familiale se fait vedette
de sa propre cause, voisine de la précédente, ça
ne va plus. Au fond l’enfant objet n’est pas autorisé
à n’être pas conforme. Tous ne s’y résignent
pas, mais peu en réchappent et ils reproduisent les mêmes
modèles…
Une autre relation commune est celle de militant-militant dans
les complicités père-fils par exemple. L’autre
parent est d’ailleurs souvent la vedette, portant la cause. Les
parents se font enfants, militants pour la même cause (critères,
images, stéréotypes sociaux). Quelques fois, ce
sont les enfants vedettes qui se font parents-militants pour
une cause commune, la famille, un groupe, une idéologie…
Dans tout ce champ règne la compétition, le spectaculaire,
la conformité y compris dans la mode et le modernisme.
Il arrive aussi que l’enfant ne soit qu’un des critères
d’une cause parentale dans leur réalisation. Il est donc
simple objet instrumental. On ne parle pas de relation avec un
objet mais d’usage.
– La dégradation – Tout ce qui précède
peut y mener mais reste très différent en général.
Dans une relation parent-dominateur enfant-victime, il s’agit
pour les parents de corriger l’enfant et ses erreurs. Il est
considéré comme un être incomplet, brut peu
sensé, maladroit. Il s’agit de redresser tout ça
et de le discipliner. D’un "sauvage" il faut faire
un civilisé et pour cela lui apprendre à se taire,
à ne pas remuer, à "prendre conscience"
de ses insuffisances et de la nécessité d’y remédier.
Ces parents se plaignent toujours de l’ingratitude de leurs enfants,
pour "tout ce qu’ils font pour eux". Ils les culpabilisent
sans cesse. C’est de leur faute si… Le chantage affectif ou
la menace sont des instruments efficaces pour maintenir la relation.
L’enfant apprend très vite son rôle de victime et
à subir. Il se sent fautif (plus ou moins consciemment),
coupable, et en particulier de ses sentiments agressifs, de ses
désirs aussi. Lorsqu’il les manifeste, il ne manque pas
d’être "justement châtié". On lui
a bien sûr expliqué l’adage "qui aime bien
châtie bien". Comment peut-il être aussi mauvais
pour ne pas aimer ceux qui l’aiment autant. Il est inutile de
décrire la multitude des pratiques plus ou moins subtiles
qui ont fait bien des romans. L’importance est de rappeler que
tout cela se passe dans la souffrance des parents aussi et dans
la plus grande inconscience.
La relation inverse est aussi fréquente. L’enfant est
dominateur de ses parents. C’est lui cette fois qui se plaint,
critique, est souvent malade en tout cas, culpabilise et même
menace ses parents. La culpabilité des parents est bien
facile à manipuler pour des enfants. Depuis celui qui
ne veut manger que sous condition jusqu’à celui qui a
des mauvaises notes pour punir ses parents qui voudraient tant
avoir un enfant premier en classe. Beaucoup d’enfants déjouant
ainsi sans cesse les ambitions de leurs parents qui eux aussi
ne cessent d’essayer de les satisfaire et de les aider. Ces relations
durent quelque-fois toute la vie…
Dominateurs-dominateurs, ou victimes-victimes sont des alliances
classiques aussi, en particulier dans des situations difficiles
de misère physique, économique, mais aussi bien
intellectuelle, spirituelle, mentale. La souffrance des uns amène
celle des autres, que ce soit sous des apparences de soumission
ou de révolte. En tout cas l’autre, parent ou enfant,
peut être de trop, ou ne pas donner ce que l’on en attend.
– Involution – C’est un autre monde où
l’enfant ENFANT est "privilégié", protégé,
nourri, sécurisé. Il est dans une relation de dépendance
affective, physique très grande des parents maternants.
Elevé "dans du coton" il est considéré
comme un être faible, une personne miniature auquel d’ailleurs
on fait jouer quelquefois "au grand". Il sais bien
qu’il a intérêt, pour plaire à ses parents,
à bêtifier et ne pas confondre ses jeux avec la
réalité. Il doit manifester sa dépendance
et en tire bien des profits d’enfant gâté. C’est
un enfant qui ne prend pas de risques à sortir du domaine
familial, où il a tout pour lui. Ces parents sont pleins
d’attentions pour lui et veillent bien à lui éviter
les désagréments de la vie. C’est ce en quoi consiste
l’éducation. Eviter le contact avec les choses dangereuses
ou mauvaises, on maintient ainsi l’ignorance et les croyances
au "père noël". Distribuer nourriture,
douceurs, bon conseils, affection, le tout gratuitement. Les
bons parents maternants cherchent ainsi à se faire aimer,
et dans cette relation, réussissent à obtenir en
échange un enfant "infantile" à souhait
en particulier dans ses imitations d’adultes.
L’inverse Enfant-MATERNANT et parent-ENFANT est aussi très
classique. Les parents "font l’enfant" et se font protéger
par l’enfant-MATERNANT qui est aux petits soins pour eux. L’enfant
est "très sage et très avancé pour
son âge", il rit gentiment aux jeux des parents et
ainsi les gratifie. "On voit bien qu’il comprend tout".
L’enfant est toujours attentif à rendre service et à
prévenir les désirs de ses parents qui ont d’ailleurs
de plus en plus d’attentes de bons soins. Ils songent d’ailleurs
très vite à prendre leur retraite avec de tels
"bons enfants". Les relations symétriques sont
bien fréquentes dans ce champ, soit dans la relation ENFANT-ENFANT
où on joue ensemble à parent-enfant, mais pas vraiment
"pour de vrai". C’est possible dans l’imaginaire protégé
des réalités. C’est aussi plein de plaisirs et
de jouissances. Les relations MATERNANT-MATERNANT font des situations
où bon parent, bon enfant vont ensemble dans le partage
des "responsabilités" familiales. On s’en gratifie
en restant tous ensemble. Il est bien difficile de sortir du
milieu familial à moins d’en reconstruire un bien vite,
équivalent.
– Accomplissement – La relation est principalement
d’un seul type dans le rôle parental tant que l’enfant
n’est pas devenu adulte. Dans la relation les parents occupent
la position MAITRE, les enfants la position PRATIQUANT.
La maîtrise des parents vient de la connaissance d’eux-mêmes
notamment dans l’élucidation de leur propre croissance.
De ce fait il peuvent accompagner l’enfant PRATIQUANT dans son
développement. Les parents sont serviteurs, disponibles
mais la disponibilité n’est que leur fonctionnement normal.
Ils donnent Sens à leurs enfants, ce qui est leur véritable
rôle. Ce don du Sens dans la nourriture comme dans tous
les domaines n’implique pas automatiquement prise de Sens par
l’enfant. C’est la question du respect de l’autre. L’enfant PRATIQUANT
fréquente (en général) ses parents MAITRES
et leur univers de vie. Il en fait ainsi l’expérience
dans laquelle ses parents peuvent ne plus être dans leur
champ de maîtrise, ce qui peut justifier d’autres MAITRES.
Les parents servent à l’enfant à s’expérimenter
dans la vie. C’est pour cela que le modèle familial a
tant d’importance et peut poser des problèmes de dépendance
lorsqu’il n’est pas bien conscient de ces liens.
Le rôle des parents MAITRES est à la fois de proposer
un environnement et des pratiques de vie à l’enfant. Celui-ci
pratique tout cela et les expériences qu’il en fait sont
"consenties" par ses parents. C’est comme cela que
le monde devient réalité, qu’il devient un individu
distinct dans ces réalités mais aussi dans la conscience
de son Sens, la connaissance de lui-même. C’est comme cela
aussi qu’il peut établir des relations à autrui
considéré comme différent , distinct et
comme sujet. Le terme "adulte" peut caractériser
le passage à sa propre maîtrise où cesse
la relation complémentaire et le rôle des parents.
Ne cesse pas pour autant leur maîtrise qui n’a jamais été
que d’eux-mêmes et non celle des autres fussent-ils leurs
enfants.
D’autres relations PRATIQUANT-PRATIQUANT sont possibles mais
cette fois dans des disciplines communes où les parents
cessent de l’être pour devenir condisciples.
Les relations MAITRE-MAITRE ne peuvent être qu’entre adultes
et, s’il s’agit d’une filiation dans une maîtrise, telle
qu’elle exclue l’activation de la relation complémentaire.
Dans ce champ le rôle de parent s’assume pleinement dans
l’autonomie des uns et des autres, ce qui va ici ensemble.
c) Les relations de couples : jeux d’identités
sexuelles
La relation au partenaire, conjoint notamment repose dans sa
dominance sur un jeu d’identités que l’on peut situer
dans l’un ou l’autre champ. Selon le cas cela donne des perspectives
toutes différentes de la relation sous des apparences
quelques fois proches. Sont en question les rôles exercés
hommes-femmes et les relations sexuelles. La présence
de l’enfant peut être envisagée cette fois d’une
autre manière selon son rôle dans la relation de
couple.
– Conquête- Ce terme fait penser à
l’idée de conquête féminine ou masculine
et à l’image du séducteur ou de la séductrice.
Il faut préciser d’emblée qu’elles correspondent
plutôt au champ centré sur l’axe "extériorisation",
décrit dans un prochain chapitre. Envisageons les différents
jeux d’identités :
En relation complémentaire il y a relation d’admiration
du "militant" pour la "vedette". "La
femme "vedette" l’est par son identification à
une cause qui est souvent "La FEMME". C’est en fait
son identification au modèle féminin idéal
qui la fait vedette selon les critères particuliers de
chaque relation. Malgré tout, la conformité aux
canons culturels de la mode et de la beauté (esthétique)
est un atout particulier pour "conquérir" des
militants masculins à cette cause qu’elle représente.
Ces critères ne sont d’ailleurs pas uniquement esthétiques,
ils sont aussi d’attitudes, de comportements, d’expressions.
Dans ce champ, phallique, priment cependant les critères
esthétiques pour une femme et quelques fois des comportements
considérés dans notre culture comme plutôt
masculin. L’homme, militant, se consacre à sa partenaire
en contribuant autant que possible à son élection.
Il fait partie de ses admirateurs. L’inverse, homme vedette,
femme militante est aussi classique avec comme cause celle de
"l’homme viril" ou "l’homme moderne" avec
la panoplie de ses attributs culturels. Dans ces relations le
couple est nettement dissymétrique et on en trouve des
illustrations dans toute la mythologie occidentale, aussi bien
contemporaine, du partenaire dévoué à la
"cause" que représente l’autre.
Les jeux d’identification font des relations sexuelles quelques
chose d’ambivalent. On insiste volontiers dans ce champ sur le
caractère bisexuel des individus. En effet, on est dans
ce qu’on pourrait appeler une "sexualité formelle"
ou la chose prime sur le Sens, plus par ses signes que par son
vécu. Une des figures particulièrement significative
en est le donjuanisme. Derrière chaque femme, Don Juan
cherche la femme idéale. Chacune en particulier est un
signe de celle là, un élément de la cause
ou la femme idéale est LA FEMME en général.
Celle qu’il a conquis s’en fait militante en contribuant à
cette cause. Ce faisant elle est objet dans une relation d’objets.
Dans cette relation complémentaire, l’enfant est un signe
pour la "vedette" de son image. C’est un représentant
de lui-même et presque ainsi son double. Ce qui en fera
un rival. Il deviendra instrument de représentation de
soi sans qu’il ait beaucoup loisir d’exprimer sa propre personnalité.
Pour le militant l’enfant est signe de reconnaissance par l’autre.
Il en fera ce que l’autre en attend et l’enfant deviendra l’objet
de son militantisme. Il faudra qu’il devienne "comme son
père ou comme sa mère", selon celui qui tient
la vedette. Tant pis pour son propre sexe.
Les relations militants-militants se conçoivent sur une
cause commune. Cela peut être "le couple", "la
famille" ou tout autre cause idéologique ou professionnelle.
C’est une relation d’association fondée uniquement sur
la conformité de chacun à son rôle dans la
cause. Lorsque celle-ci est le "couple" la relation
tendra en tout point à se conformer à la représentation
que les partenaires se font du bon couple. Là aussi on
peut parler de sexualité formelle dans la mesure où
le rapport à l’autre n’est fondé que sur son rôle
dans la cause commune. Si cette dernière limite les relations
sexuelles , il n’y en aura peu ; si elle en fait un critère
de modernité, les partenaires vont se jeter sur tous les
modèles et techniques de la sexualité. L’enfant
dans ce couple d’associé ne peut être qu’un produit
selon les critères de la cause. Il devra être éduqué
comme tel ce qui peut en faire éventuellement la vedette
du couple. Cela dépend uniquement de cette cause et de
la présence éventuelle de l’enfant. Si celle-ci,
dans le modèle bourgeois, par exemple limite le nombre
d’enfant à 1 ou 2 (peu importe le chiffre) c’est ce que
l’on tendra à produire en conformité aux règles
du militantisme.
Le couple idéal, l’homme idéal, la femme idéale
sont les trois "causes" les plus fréquentes
dans ce champ et fondent selon les canons culturels ses relations
caractéristiques. De ce fait, c’est celui où, même
derrière les modernismes progressistes, persiste le plus
grand conservatisme. C’est aussi celui, où les "causes
idéales" définissent les règles de
fonctionnement qui font les morales et le droit. Le jeu relationnel
est essentiellement un jeu d’images, images de soi et de la cause
de l’autre. C’est en fait un jeu de relations a-sexuées
derrière des jeux de rôles conformes aux images
culturelles de l’un et l’autre sexe.
Dégradation – Dans ce champ se retrouvent
beaucoup de relations de couple. On peut y repérer les
cas spectaculaires de partenaires qui se déchirent à
grand renfort de cris et de vociférations, on peut aussi
y rencontrer les relations destructrices qui se dissimulent sous
des apparences bien calmes. Y dominent en outre le large champ
de l’amour passion et des relations que la littérature
donne comme modèles. Possession, violence, dévoration,
ponctuent les relations de couple. Le dernier terme peut étonner
mais il a sa place ici comme processus de capture.
Dans les jeux d’identités il est intéressant de
souligner quelques représentations classiques des différents
personnages.
Comme dominateurs figurent le macho, tyran domestique dénoncé
par tous les discours féministes, figurant aussi des hommes-victimes,
les précédents où d’autres qui se présentent
sous des visages misérables, malades, de malchanceux qui
culpabilisent et dévorent leurs partenaires femmes. Les
femmes fatales, vamps ou autres sirènes rejoignent comme
dominatrice les mégères mais aussi celles qui arborent
leurs insuffisances, incapacités, faiblesses, pour mieux
prendre au piège l’homme victime de ses propres culpabilités.
Ces rapports dominateurs-victimes prennent donc des visages bien
différents où se manifestent aussi bien des signes
hypersexuels que peu sexués. Ils vont avec frigidités
et impuissances dans leurs expressions directes ou inversées.
Les relations sado-masochistes en sont des caricatures, mais
sont aussi fréquentes celles ou les visages de victimes
cachent la position inverse.
Dans les relations complémentaires hétérosexuelles
de ce champ, l’enfant détient le rôle privilégié
d’être l’instrument de l’agression ou de la culpabilisation
de la victime. Il devient lui-même dominateur ou victime
selon le cas, mais le résultat est le même. Elevé
comme instrument de chantage affectif il ne peut pas en sortir
indemne. Pour le couple il représentait dès sa
naissance l’enfant non désiré que la victime assume
ou celui désiré dont il lui sera fait reproche.
C’est le cas par exemple de l’enfant dont le dominateur ou la
dominatrice se plaint en le désignant comme celui de l’autre
. C’est un jeu dont on peut sourire par sa banalité mais
bien réel dans son Sens.
Dans la relation complémentaire, la femme victime ou l’homme
victime, peuvent apparaître comme provocateurs. Ce sera
souvent eux que la rumeur publique désignera comme responsables
de l’échec ou des difficultés d’un couple et les
"bonnes âmes" s’allieront volontiers au véritable
dominateur. Les silences réprobateurs, douleurs muettes,
pudeurs froissées désignent plus facilement le
coupable que ses réactions revendicatrices ou provocantes.
Les relations symétriques, dans ce champ, sont elles aussi
fréquentes. Dans la relation dominateur-dominateur, l’un
et l’autre se plaint ou accuse. Il est de ces couples qui n’en
finissent pas de s’agresser, de façon démonstrative
ou subtile et dont la stabilité étonne toujours
l’entourage. Madame trouve qu’il ne l’aide pas beaucoup, qu’elle
a trop de travail, lui qu’il a trop de soucis, qu’il est fatigué
et que ces plaintes l’épuisent. Chacun d’entre eux ne
va jamais plus loin qu’il ne faut pour que l’autre puisse continuer
le même jeu. Ils s’expriment en fait mutuellement dans
un harcèlement autodestructeur. L’enfant est considéré
par les deux comme "la tuile" ou une lourde charge,
ou encore comme ne donnant pas beaucoup de satisfactions. Il
paiera par une position de victime le prix de la relation de
ses parents. Dans les périodes où tout le monde
a tendance à se plaindre, cela produit beaucoup d’enfants-victimes.
L’autre relation symétrique victime-victime est celle
de ces couples "méritants" qui font toujours
bonne figure. Ils se disent mutuellement se sentir bien, autonome,
sans problèmes que mineurs, alors qu’ils souffrent de
solitude, de frustration, d’insatisfaction. Ils ne peuvent ainsi
demander l’aide qu’ils voudraient de l’autre qu’ils n’osent solliciter
dans la faiblesse qu’ils devinent sous les attitudes maîtrisées.
Cela s’enferme dans les silences et la solitude dissimulées
sous des apparences plutôt satisfaisantes. L’enfant y sera
considéré comme bien venu alors que chacun le vit
comme une charge sinon un concurrent. De ce fait il fera l’objet
d’attentions extrêmes de part et d’autres à la mesure
de la culpabilité inconsciente qu’éprouve l’un
et l’autre pour leur véritable sentiment. Cela fera un
enfant tyran, couvé par ses parents, qui saura très
vite jouer sur les cordes sensibles, sur ce qui met en échec
le "tout va bien" des parents entre eux et pour lui.
Il expérimentera la position complémentaire de
celle de ses parents en tant que dominateur. Ces parents "exemplaires"
que le sort accable et qui souvent tiennent le coup, font aussi
partie de la littérature. C’est aussi le cas de tous ces
amants contre qui le sort s’acharne sous les visages de la société,
de la malchance, de la loi. Ils se disent forts et contribuent
mutuellement à leur roman qui sert d’idéal ou de
repoussoir. Si les chants désespérés sont
les plus beaux, s’explique le succès particulier des oeuvres
qui décrivent ces relations et dévoilent les souffrances
qui les accompagnent.
La passion mutuelle jamais satisfaite, exigeante ou idéale,
silencieuse ou bruyante, correspond bien aux deux relations symétriques
selon que chacun dans le couple affiche ou cache sa douleur.
Les passions non partagées participent elles de relations
complémentaires où l’amoureux est dominateur ou
victime selon qu’il se plaint ou accuse ou demande et cache sa
peine.
Involution – Les situations de ce champ protégées,
en sécurité, confortables, de plaisir ou de rêve
favorisent des jeux d’identité de PARENTS et ENFANTS.
Le couple reproduit le milieu familial de l’enfance, la chaleur
maternelle, l’inconscience et l’insouciance des premières
années. De ce fait, bien souvent, la relation de couple,
la famille, reconstituent ce climat.
La femme se fait volontiers mère de famille et son partenaire
enfant. Des hommes ENFANTS pris en charge par leur femme MATERNANTE
qui en assure le confort, la nourriture, les plaisirs ; cela
correspond au modèle le plus banal du fonctionnement du
couple conjugal. Le mari "bricole" ce qui rend désuet
son rôle, ou encore joue de maladresse dans des tâches
ménagère où "il ne sait pas se débrouiller
seul". Il est inutile de plaindre l’un ou l’autre dans cette
relation où ils trouvent chacun la présence sécurisante
de l’autre, ce qu’ils attendent.
L’inverse avec l’homme MATERNANT et la femme ENFANT correspond
à ce que cette dernière association des termes
laisse prévoir. L’homme est un père bien maternant
pour sa partenaire "petite fille" qui se joue comme
immature. L’homme la prend en charge, la protège, en est
le nourricier, c’est lui aussi qui lui apprend les choses de
la vie, où il la conduit par la main en lui passant ses
fantaisies. Voilà encore une relation courante.
Dans les deux cas de ces relations complémentaires, l’enfant
est le compagnon de l’ENFANT. On voit le père de famille
et ses enfants maternés par son épouse ou encore
la mère de famille et ses enfants protégés,
guidés par son conjoint MATERNANT. Cette relation complémentaire
favorise l’installation dans des situations confortables et l’importance
primordiale de la "maison", des amis, des petites habitudes
tranquilles. Beaucoup de couples s’installent dans de telles
relations extérieures du champ de la conquête. Les
deux sont en contradiction et seule la "retraite" peut
en venir à bout.
L’enfant dans ce champ "fait partie" du couple. L’ensemble
familial est communautaire, il ne se sépare pas. De ce
fait l’enfant se fera ENFANT comme son parent ENFANT, et on assistera,
ce qui peut être étonnant, au fait que l’enfant
imite son parent justement dans ce qu’il a d’infantile. C’est
ainsi qu’il peut obtenir l’affection et tous les plaisirs venant
de son parent MATERNANT. Ce n’est pas pour favoriser un développement
harmonieux et surtout pour l’autonomisation qui lui serait nécessaire.
Cela fera quelqu’un de très sympathique mais très
dépendant affectivement ou même pour assumer on
existence propre. La reproduction du modèle parental en
sera une voie de solution.
Les relations MATERNANT-MATERNANT sont possibles entre hommes
et femmes. C’est par exemple le cas lorsque l’un et l’autre se
placent dans des situations ou quelqu’un joue le rôle ENFANT.
C’est le cas dans beaucoup d’institutions, familles, associations,
écoles, assistanats divers. L’un et l’autre dans leur
relation propre, peuvent alors se reconnaître comme Maternants
par leurs mérites, leur sympathie mutuelle. C’est le cas
en particulier de relations d’amitié homme-femme dont
le couple peut être alors très stable dans une relative
indifférenciation sexuelle. L’enfant qui viendrait dans
un couple de ce type, éventuellement adopté d’ailleurs,
ferait le "ciment" du couple. C’est par son rôle
ENFANT et commun qu’il assure cette fonction en devenant le centre
d’attention principal sur lequel chacun exerce sa générosité,
sa protection, son affection. Les velléités d’indépendance
de l’enfant risquent cependant de briser ce ciment. Il apprendra
encore son rôle d’ENFANT comme nécessaire à
l’obtention des bienfaits parentaux.
Le dernier type de relation ENFANT-ENFANT se conçoit plus
pour des couples dont l’engagement mutuel est faible au delà
de ses aspects confortables, ludiques, sensuels. Ces couples,
où les sexes sont peu différenciés dans
leur rôle véritable se retrouvent sous la protection
d’une instance maternante, les parents de l’un ou l’autre, ou
encore une personne ou une institution qui les prend en charge.
C’est alors une mise en commun des satisfactions et des éléments
de confort et de sécurité pour faire obstacle à
la solitude. L’enfant n’a guère de place dans ce couple
sinon comme partenaire de jeu, de plaisir. On l’élèvera
de façon très naturelle, mais il servira en même
temps de jouet. C’est l’enfant-poupée de sa mère
et de son père au nom de l’attention et l’affection "naturelle"
qui doivent leur être portés. Plus tard l’enfant
peut devenir MATERNANT en se reconnaissant source de plaisir
et de sécurisation pour ses parents ENFANTS, il apparaîtra
d’une maturité précoce. C’est ce qu’on attend véritablement
de lui comme adulte miniature.
Dans tout ce champ dominent dans les jeux d’identités
les images classiques de bonne mère, du bon père,
d’enfant faible, sans possibilités propres ou au contraire
d’adulte miniature et aussi d’homme-garçon de femme-fille,
l’un et l’autre ENFANT. Au delà de ces apparentes spécifications
sexuelles réside une grande indifférenciation.
La relation fusionnelle qui est en jeu évite ces distinctions
et que la position soit haute ou basse, elle est tout aussi immature.
Elle apporte cependant en contre partie beaucoup de plaisir et
de sécurité ce qui en fait une des tendances majeures
de la bonne image de couple Homme-Femme, compte tenu de ses variantes
et de l’évitement qu’elle permet. Tant que n’intervient
pas la "dure réalité" tout reste serein
et sans problèmes en toutes circonstances.
Accomplissement – Entre la relation confortable
indifférenciée de l’involution et la relation plus
dynamique a-sexuée de la conquête, le champ de la
dégradation donnait notamment une dramatisation de la
relation sexuée dans l’amour passion ou les violences
et souffrances sexuelles. Le champ de l’accomplissement de la
personnalité, est celui de l’accomplissement véritable
de la relation sexuée homme-femme.
Il est à la fois essentiel pour cette relation et en même
temps peu envisagé dans notre contexte culturel. L’examen
dans leurs principes comme dans leur quotidienneté de
ce que peuvent être ces relations dans les différents
jeux d’identités mérite attention.
Après l’indifférenciation fusionnelle, les confusions
ou oppositions puis les distinctions formelles des trois autres
champs, il faut envisager ce que sont dans leur spécificité
les tendances sexuées dans ce dernier champ. (observation:
la théorie du cohéenciel a beaucoup apporté
à cette question)
Le Sens de l’accomplissement, de conscience du Sens des réalités
suppose une tendance à l’élucidation des distinctions.
Ce que nous avons posé comme domaine d’intérêt,
c’est celui du couple et donc uniquement ce qui correspond à
la relation spécifiquement sexuée, et non à
ce qui en est tout à fait indépendant comme le
fait de pratiquer la même discipline, d’avoir la même
maîtrise où le même art ou de mener une oeuvre
sociale ou matérielle commune. Ce n’est pas qu’alors les
sexes s’effacent mais qu’ils ne spécifient plus la relation.
Un homme comme une femme peuvent avoir alors des qualités
dites culturellement féminines ou masculines.
La relation étant d’accomplissement, il est important
de voir en quoi elle l’est. Dans ce champ la relation à
l’autre est de conSensus tendant à s’élucider comme
prise de conscience de son propre Sens. De ce fait le partenaire
sexuel vient pour donner conSensus sur une réalité
commune où il est irremplaçable. Cette réalité
se manifeste dans l’acte sexuel et dans sa fécondité.
Ce dont il peut être pris conscience dans ce conSensus,
c’est de sa propre réalité, sexuée, c’est-à-dire
distincte, différente, et de son Sens particulier, virilité
ou féminité. C’est-à-dire malgré
cette différence, de la plénitude de sa personne.
On peut être séparé de l’autre, distinct
et entier quand même sans avoir besoin de fusion, d’identité,
ou d’opposition conflictuelle dans les autres champs. De ce fait
chacun est pour l’autre l’espace qu’il n’est pas mais en plus
l’espace du conSensus sur sa propre existence, complète
par la jouissance, jouissance d’être et son fruit l’enfant.
La tendance spécifiquement féminine est de se manifester
comme matrice, espace, qui donne réalité, à
la virilité masculine et corps à l’enfant. Celle
spécifiquement masculine est de se manifester comme fécondante
donnant Sens à la féminité et vie à
ce qui prendra corps comme embryon. De ce fait et dans cette
relation la femme peut être plus spécifiquement
attentive au corps, à l’espace, aux réalités
matérielles, l’homme plus spécifiquement, à
l’esprit et aux réalités spirituelles.
Examinons maintenant plus particulièrement les différents
jeux d’identité :
La relation PRATIQUANT-PRATIQUANT est celle d’une communion,
d’un exercice commun de la sexualité, de ce fait d’un
apprentissage et d’une émulation fondée sur l’attirance
des sexes mais aussi la réactivant facilitant ainsi son
élucidation. Ces pratiques entre partenaires sexuels se
placent sur l’axe NON-ETRE où c’est dans l’autre que se
cherche son propre Sens.
L’enfant né d’une relation de PRATIQUANTS peut apparaître
comme un fruit accidentel dans la mesure ou ce n’est pas en MAITRISE
qu’il a été conçu. Cependant il prend Sens
dans le conSensus qui en a été l’origine même
s’il n’était pas conscient. Il a ainsi toutes les chances
d’être aimé pour ce qu’il est comme fruit que par
ce qu’il représente comme manque. Cette relation PRATIQUANT-PRATIQUANT
est probablement celle qui justifie le plus la stabilité
de la constitution d’un couple s’instituant comme conjugal, et
dont le Sens est la pratique commune.
Les relations Maîtres-pratiquant maintenant. Il faudrait
que le domaine de la maîtrise de l’un et de la pratique
de l’autre soit justement la sexualité (ou relation sexuée).
Le maître en ferait profession, l’autre exercice. Ce que
l’on sait néanmoins, c’est que chaque fois qu’il y a une
relation maître-pratiquant il ne peut être question
de production autre que celle du pratiquant lui-même par
sa pratique. Ce ne peut donc être une relation génératrice
d’enfant en elle-même, dans ce champ bien sûr.
La relation Maître-Maître est celle de partenaires
ayant la maîtrise de leur personnalité sexuelle.
Ils n’ont pas de ce fait besoin de l’exercer mais cet exercice
peut se faire visant la production de l’enfant. La relation ne
se déroule plus comme pratique conjointe mais comme productrice
de conception commune. La relation sexuelle ne se conçoit
plus alors que comme génératrice. Ce faisant elle
contribue néanmoins dans son accomplissement, c’est-à-dire
la génération, à l’extension du champ de
maîtrise de chacun. Ainsi, paradoxalement peut être,
c’est lorsque la relation de couple sexuée devient de
maîtrise qu’elle se réduit dans son fonctionnement
à cette génération. C’est ce qui est peu
compréhensible lorsqu’on n’est pas soi-même maître.
C’est d’ailleurs vrai de toutes autres maîtrises que l’on
n’a pas. Cependant cette maîtrise est certainement une
des plus profondes et des plus achevées qui puisse être
avec en même temps son caractère exceptionnel. L »enfant
qui peut en être issu est placé dans une situation
où il est complètement distinct du couple tout
en en étant le fruit. C’est ce que les différentes
voies de l’accomplissement personnel tendent sans doute à
reconstituer pour soi-même.
d) Les relations commerciales – la vente
Le domaine est tout autre que ceux plus impliquants des relations
de couple ou parent-enfant. On l’examinera au travers des différents
types de relations et du rôle particulier des éléments
que sont le prix, le produit et le contrat.
La conquête – C’est l’un des champs porteur
de beaucoup de stéréotypes et de pratiques commerciales.
Le dynamisme, certaine agressivité, mais surtout les caractères
spectaculaires et objectivistes dominent. Il faut montrer, valoriser,
mesurer, conquérir, les clients, le marché ou …
le produit. La monnaie est la mesure du prix, terme du contrat
avec le produit.
Dans ce champ la référence centrale est la cause,
le contrat une expression, le produit un critère, le prix
une mesure. Autour de cela se jouent les relations. Il s’agit
de savoir qui est l’autre et quelle est la cause.
Si l’acheteur est "chef vedette" le produit pour lui
se définit comme signe de son identité (identité
à la cause). De ce fait le produit n’existe que selon
les signes qu’il donne, qui doivent être les meilleurs
selon les critères de la cause. Celui qui est le meilleur,
le premier, c’est le client et c’est pour cela que le produit
est présenté comme le meilleur selon les critères
du client.
Le vendeur milite pour la cause, c’est-à-dire qu’il la
défend, argumente, s’accroche, se dévoue presque
pour le produit. S’il le fait selon les bons critères,
ceux du client, le produit aura du prix pour lui, le contrat
sera le signe de l’accord formel, accord sur la relation dont
il est la sanction.
Il faut souligner que le produit n’intervient là que comme
support des représentations de la cause et non en tant
que tel. Inutile de parler de son utilisation si cela fait partie
des bons critères pour le client. Celui-ci "reconnaît"
le vendeur militant par le contrat. Le problème pour ce
dernier est de ne pas confondre la cause du client avec n’importe
quelle autre, la sienne ou celle de l’entreprise qu’il représente.
Cette situation est incompatible avec les fonctions de représentant.
Ces dernières au contraire interviennent lorsque le client
est militant d’une cause que le produit représente. Le
vendeur peut être vedette et s’identifie alors à
la cause, le produit en étant une expression ou un instrument,
un moyen d’appartenance. Il peut alors représenter la
cause en la décrivant comme belle grande et gratifiante.
Acheter le produit pour le client militant c’est adhérer
à la cause. Le prix est ce qu’il est disposé à
payer pour adhérer et être reconnu. Le vendeur y
consent en lui présentant le produit et ses valeurs. Le
client est acheteur et se consacre activement à l’établissement
du contrat et l’acquisition du produit qui est cette fois signe
d’appartenance. Le vendeur comme vedette ne doit pas se présenter
comme solliciteur, mais comme présentateur dominant son
sujet. Il fait acheter mais ne vend pas, n’argumente pas mais
présente. Les critères de la cause doivent cependant
toujours être ceux qui correspondent au client du produit
et donc de celle de la relation établie.
Les relations militants-militants consistent pour le vendeur
et le client à militer dans leur rôle spécifique
pour une cause commune que le produit représente, le vendre
pour l’un, l’acheter pour l’autre, constituent le moyen d’être
reconnu dans leur identité. La cause commune peut être
l’entreprise, de l’un ou de l’autre, ou une idéologie,
une activité, une entité quelconque. Le produit
se définit encore comme le représentant de cette
cause mais plus favorablement comme outil pour y accéder.
Dans tous les cas la vedette "possède" la cause
et le client vedette achète pour posséder ; le
militant au contraire tend à y accéder et le produit
en est un moyen, le prix en est dans les deux cas la mesure ;
le contrat, la sanction. Dans tous les cas, le produit se présente
selon les critères de la cause et ne se définit
pas en lui-même, la cause dépend toujours du client.
L’art du vendeur consiste à conduire la communication
de manière à déplacer le client dans son
identité favorite sur la bonne cause et d’y situer le
produit par des images et des éléments de valeurs
et de mesure. C’est toujours "objectivement" un bon
produit.
La dégradation – On y trouvera la vente
"coup de poing" ou au contraire vécue comme
prostitution. La relation commerciale est considérée
comme mauvaise, perverse. En tout cas, elle est mal vécue.
Le client peut être dominateur et le vendeur demandeur
se faire victime. Le premier tendra à se plaindre de la
mauvaise qualité du produit et le vendeur victime n’arrivera
jamais à être convaincant. C’est pour cela qu’il
vendra, parce que le client veut et aura le dernier mot. Si le
vendeur se veut le plus fort il sera encore plus victime par
l’échec de la transaction. S’il se soumet, il vendra,
avec quelques difficultés toujours, mais sera payé
de l’identité qu’il permet à son client. Le produit
représente l’instrument de domination du client, c’est
donc pour ses insuffisances possibles qu’il sera acheté,
comme moyen de pression, de menace, de culpabilisation. C’est
souvent le moins cher qui est alors acheté.
L’inverse est le cas du client victime (c’est fréquent
aussi) avec le vendeur dominateur. Celui-ci tend à dévaloriser
son client, le culpabiliser en insistant sur ses insuffisances.
Le produit représente ses manques. C’est le cas où
il en éprouve fortement le besoin. Le vendeur présente
le produit comme une tentation afin de combler le manque ou d’éviter
l’angoisse ou le malaise (ne serait ce que par son attitude).
Le client achète, cher, pour se débarrasser de
son malaise (besoin, culpabilité, etc…) et reste ainsi
victime. Il se fait bien souvent avoir, ce qui fait le plaisir
de bien des vendeurs.
La relation dominateur-dominateur correspond à une relation
de critique mutuelle dont le produit, le contrat, le prix sont
l’enjeu. Le produit représente cependant pour le client
un instrument de pouvoir sur quelque victime de son entourage.
Le vendeur dans cette relation présentera son produit
par les inconvénients qu’il y aurait à ce qu’il
le vende à son client qui énonce les inconvénients
qu’il aurait à le lui acheter. C’est comme cela que la
vente se conclue comme un pacte dont quelque tiers sera victime,
peut être les entreprises qui les emploient, quelque collaborateur
ou personne proche.
Les relations victimes-victimes correspondent de manière
favorite à la commercialisation de mauvais produits. L’un
comme l’autre, du vendeur et de son client, les déclare
bons, pas chers, avantageux… les deux se font victimes de leurs
mensonges bienveillants. Le client mal servi, le vendeur mal
payé ou victime de difficultés diverses. Il peut
y avoir quelque part quelques dominateurs qui les exploitent
l’un et l’autre.
Le produit est toujours instrument de domination, de maîtrise
au Sens de contrainte. Il est aussi fonctionnellement imparfait
(d’autant plus que le contraire est dit). Le prix est, soit très
élevé, soit très faible. Le contrat est
en général peu clair, mal formalisé, source
de contestation.
L’important pour le vendeur pour conduire sa relation s’il n’en
a pas le choix, est d’être clair sur ce qui se passe au-delà
de toutes les dissimulations de ce champ.
L’involution – Les deux premiers correspondent
à l’essentiel des représentations habituelles de
la vente qui y sont déjà bien différenciées.
Dans le champ de l’involution on peut situer d’autres pratiques
qui existent aussi. Elles se fondent plus sur le plaisir, le
confort, la sécurité, que le produit représente
et déterminées par la relation. La sympathie l’amitié
même, mais aussi la bonne table, font partie de la vente.
Les sentiments, les attentions, les cadeaux comptent beaucoup
plus quelquefois que les réalités. De ce fait les
concrétisations se font attendre, les contrats sont très
informels, le prix n’est pas la mesure du produit mais une sorte
de paiement du vendeur pour sa relation.
Le vendeur peut être maternant et le client enfant. Le
vendeur invite son client, le soigne bien, l’aide, lui porte
conseil et lui évite les difficultés. Ce peut être
le vendeur conseil. Le client considère cela comme normal
et le reçoit avec plaisir. Acheter n’est malheureusement
pas une décision mais ne peut être qu’une demande
de satisfaction sans prix en échange. De ce fait c’est
au vendeur de s’en occuper en évacuant au maximum les
servitudes ou les problèmes d’intendance. A cette condition
le client acceptera comme un jouet, une nourriture, une sécurité,
le produit qui lui est ainsi confié. La relation inverse
se déroule aussi avec un client maternant et un vendeur
enfant. Si celui-ci lui demande de bien vouloir lui acheter pour
lui faire plaisir, lui éviter des ennuis, l’autre le fera
avec force conseils pour lui rendre service. Il ne faut pas non
plus trop insister et passer pour victime ce qui changerait de
champ et de position. Le client Maternant invite le vendeur,
le reçoit bien, l’aide à faire son travail. Le
vendeur remercie. Le MATERNANT qui a déjà pris
le produit risque d’oublier en plus de le payer. C’est l’inconvénient
de cette relation bien facile mais qui ne se concrétise
pas aussi facilement.
Les relations MATERNANT-MATERNANT consistent à se pencher
avec attention sur le sujet qui peut être le produit ou
tout autre chose. C’est à titre de bonne résolution
mutuelle qu’une vente peut être envisagée. On peut
parler de la pluie et du beau temps et, si le vendeur arrive
à y placer son produit, toujours par des aspects pertinents
dans ce champ, il a quelque chance de le vendre en étant
payé en échange.
La relation ENFANT-ENFANT est possible en faisant du produit
l’enjeu d’une satisfaction immédiate à laquelle
le vendeur participe éventuellement. Le contrat et le
prix sanctionnant, la vente restant encore dans le flou. C’est
toujours en présentant non pas les réalités
mais les avantages de plaisir, de confort, de sécurité
que le produit peut être acheté dans ce champ. Il
l’est toujours pour la qualité de la relation plus que
pour sa valeur intrinsèque ou son intérêt.
Le prix est toujours un obstacle, comme le contrat. Il faut qu’il
soit aussi placé dans la relation comme instrument de
plaisir, de sécurité en évitant tout ce
que cela a de formel. Un MATERNANT paiera s’il est assez riche
et verra cela comme une sorte de don de sa part indépendant
du produit. Un ENFANT paiera par jeu, insouciance, ou pour être
tranquille, mais toujours plus pour la relation que pour le produit.
L’accomplissement – La relation commerciale
est affaire de réalité et de Sens. Banalement cela
consiste à traiter comme une même affaire les réalités
du produit et des Sens dans la relation. Il n’y a plus d’écart
entre ce qui est dit, montré et ce qui se passe dans la
relation et dans la fonction du produit. La vente est l’établissement
d’un conSensus clair dont les marques sont le contrat, le produit
et le prix.
Ce conSensus que la relation sert à établir porte
sur les Sens du produit pour le client, c’est-à-dire ses
fonctions quelqu’elles soient, pour lui-même, à
partir des Sens (connaissance, savoir-faire, etc…) qui y ont
été mis. La relation consiste à élucider
tout cela pour clarifier le Sens du produit pour le client et
donc le service qu’il en attend. Le prix est l’expression pour
lui de ce service. Il n’y a pas ici de vérité objective
des prix mais justesse, c’est-à-dire correspondance à
l’usage.
La seule référence ne se fonde que sur le bénéfice
qu’en retire le client par cette relation. Le vendeur ne peut
que proposer et faciliter ce conSensus. Pour ce faire il doit
avoir la maîtrise de son produit, c’est-à-dire le
Sens pour lui de ses réalités. Il ne peut se trouver
qu’en position de MAITRE avec un client PRATIQUANT. Cela éclaire
la relation commerciale qui consiste par sa maîtrise à
proposer une démarche élucidatrice pour que cela
prenne Sens pour son client. C’est celui-ci qui prend conscience,
selon ce qu’il est lui-même, de ce que lui apporte comme
Sens ce produit, c’est-à-dire comme service. C’est toujours
une vente de service. Le prix payé par le pratiquant est
une réalité homologue au produit, c’est-à-dire
de même cohérence, celle du conSensus établi
par la relation.
Le service peut être de n’importe quelle nature, n’importe
quel Sens, l’important est qu’il soit élucidé.
La démarche d’analyse de la valeur qui consiste notamment
à mettre en parallèle des fonctions et des coûts
peut servir d’exemple à la conduite d’un tel processus.
Les relations MAITRE-MAITRE ne peuvent être des relations
commerciales. Elle sont de génération, de création
mais pas d’échange de service ce qui les mettrait dans
le cas précédent.
Dans les relations pratiquant-pratiquant il ne peut y avoir d’autres
transactions que de troc. En effet, les partenaires ne sont pas
en situation de service, ce qui serait maîtrise mais de
coactivation. Un bien s’évalue contre un bien équivalent
selon une estimation intuitive ou une règle d’équivalence.
Les biens échangés le sont par conSensus soit sur
le produit, soit sur la règle. L’élucidation n’étant
pas possible, le prix ne peut être évalué
par négociation. La relation est limitée à
l’expression mutuelle des besoins et l’échange dans des
biens équivalents. Cela ne peut être considéré
comme une pratique de vente courante dans notre contexte culturel,
même s’il y aurait intérêt à penser
ce que le développement de tels échanges présenterait
comme avantages.
D’une manière générale les pratiques de
l’accomplissement ne sont possibles que si les deux partenaires
y trouvent conSensus. Là comme dans les autres champs
il importe pour celui qui conduit de repérer le champ
dans lequel le client place son identité favorite pour
la situation. Le fait de se placer dans un champ ou dans un type
d’identité qui n’est pas compatible avec celui de l’autre
fait l’impossibilité de la relation et encore plus de
son aboutissement commercial. Tout produit peut prendre Sens
dans l’un quelconque des champs, cependant ils peuvent plus favorablement
correspondre à tel ou tel champ dans un univers culturel.
De ce fait les relations commerciales seront plus favorablement
de l’un ou l’autre type. Le fait d’étudier la cohérence
d’un produit, son Sens dominant peut permettre de choisir l’orientation
correspondante d’une politique commerciale et de certains types
de relations commerciales avec leurs modalités spécifiques.
Le moins efficace est la confusion des Sens qui limite la relation
et disperse son fonctionnement dans un ajustement qui ne s’achève
pas.
e) Autres exemples d’application
Nous allons toujours par le même procédé
traiter quelques questions où les jeux d’identités
interviennent aussi.
e-1 – L’autorité.
L’examen de cette question va consister à en préciser
le Sens dans les quatre champs en l’illustrant en termes de jeux
d’identités.
La conquête – L’autorité est synonyme
d’élection , elle est fonction de critères variables
selon les lieux, donc les causes. Elle peut être de savoir,
de diplôme, de grade, de place. Elle ne peut être
que fonction de la reconnaissance qui lui est portée.
L’autorité est ainsi constituée des signes qui
font l’identité sociale. C’est ce qui fait que tout ce
qui est institué fait autorité, a autorité
sur son domaine. La condition en est d’avoir des militants. Cette
autorité de chef-vedette-modèle ne s’exerce que
sur des militants, de la même cause. Elle est nulle sur
tous autres sauf sur d’autres causes, d’autres militants ou dans
d’autres champ mais ça n’a plus le même Sens. Les
signes de l’autorité selon les critères de la cause
sont ce qui la définit. Les usurpations sont faciles puisque
les apparences, mêmes très élaborées
comptent seules. Celui qui a la casquette, a l’autorité
pour ceux qui la respecte. Des autorités ne peuvent être
que hiérarchisées sur la même cause, ce qui
ramène à une, sinon il y a conflit et perte d’autorité
dans ce champ.
La dégradation – On rentre dans le domaine
où l’autorité a des consonances désagréables.
L’autorité, c’est ce que donne le pouvoir de sanctionner,
de contraindre mais aussi ce qui s’impose comme inattaquable.
C’est donc toujours une menace. Sa mise en cause est un danger
encore plus grand si bien que cela réclame une autorité
encore plus grande, d’où la sévérité
et la rigueur toujours plus grande de ceux qui on déboulonné
l’autorité précédente.
L’autorité est l’apanage du dominateur quelles que soient
ses variantes et même s’il n’en a pas les signes. L’autoritarisme
n’est pas fonction des titres ou places. De même cette
autorité ne se manifeste pas sous forme de menaces directes.
L’autorité morale par exemple joue plus quelquefois des
sentiments de culpabilités que de menaces formelles. Les
victimes de l’autorité soit la subissent en silence, soit
la provoquent, notamment par une opposition qui , la remettant
en cause, la justifie d’autant plus à ses yeux. Les revendications
renforcent l’autorité de ceux à qui elles s’adressent,
ne serait-ce qu’en les reconnaissant comme détenteur du
pouvoir de les satisfaire ou non. Des autorités de même
force entrent toujours dans des jeux Dominateur-Dominateur. Les
jeux d’autorité dans ce champ sont parmi les plus difficiles
à déjouer dans la mesure où leurs justifications
occultent toujours leur Sens véritable. Cela constitue
souvent le piège dans lequel les victimes se prennent
volontiers en s’installant dans la dépendance.
L’involution – L’autorité est celle qui
distribue des bienfaits, qui prend en charge et protège
(de fait et non comme piège). L’autorité est ce
à quoi on se confie. Elle représente la sûreté,
la puissance nourricière, le conseil, la nourriture, l’aide
et le soutien…Celui qui a l’autorité est celui sur lequel
on peut se reposer en confiance. Ses critères sont donc
de confiance fondée sur l’expérience (supposée)
sur la prévenance et en tout cas sur la prise en charge.
L’autorité qui s’occupe de tout est reconnue comme telle,
de ce fait aucun critère objectif ne la caractérise
mais simplement le sentiment de sécurité, de sérénité,
de plaisir, d’attention que les ENFANTS reconnaissent aux MATERNANTS.
Entre maternants l’autorité mutuelle est sans problème,
elle sert à se conforter mutuellement en s’exerçant
éventuellement conjointement sur des tiers ENFANTS. Pour
que l’autorité soit, les tiers doivent rester ENFANTS
sinon elle se perd.
L’accomplissement – Dans les autres champs l’autorité
dépend de son exercice dans une relation complémentaire
(ou symétrique quelquefois). Dans le champ d’accomplissement
elle s’associe à la MAITRISE qui n’est jamais que de soi.
L’autorité est sur soi et fondatrice de ce qu’elle autorise
pour soi. Le MAITRE de ce fait n’exerce pas l’autorité
il l’est (dans le domaine de sa maîtrise). Les autres,
PRATIQUANTS, le sont parce qu’ils se placent sous l’autorité
du maître-professeur, artisan, etc…Ce faisant ils pratiquent
une discipline qui n’est pas une contrainte mais une expérience
choisie qui "autorise" un accomplissement personnel.
Le MAITRE fait autorité, l’exercice est le fait de ses
pratiquants. Ceux-ci peuvent aussi exercer cette autorité
auprès d’autres pratiquants en devenant maîtres
dans le même domaine. A ce moment ils sont investis de
l’autorité de leur propre Maître et à leur
tour font autorité dans cette relation.
L’autorité de deux maîtrises en relation ne s’exerce
pas pour eux, elle conçoit et génère.
A cette occasion on peut envisager comment ceci se pervertit
dans les autres champs. Dans la conquête les apparences
hiérarchisent le rapport et s’attachent à établir
des critères de l’autorité, à formaliser
en "cause" le domaine, à faire de la discipline
une technique, du maître une vedette, du pratiquant un
militant. Dans la dégradation le maître impose et
régit, la discipline est une contrainte, un devoir, une
pression morale ou affective. Il menace d’exclusion, de sevices
ou de contraintes, le pratiquant est victime. C’est le Sens donné
par quelqu’un qui voit les choses depuis le champ de la dégradation.
Dans l’involution le maître est bon, généreux,
aimant. Il assume et prend en charge le pratiquant qui est ENFANT,
la discipline est un jeu, celui de l’apport du maître en
nourritures matérielles ou spirituelles.
Le champ de l’accomplissement n’est aucun des trois autres qui
peuvent en être vu comme des réductions ou des perversions.
e-2 – Le rapport au travail.
C’est un sujet d’actualité dans la mesure ou bien souvent
on constate qu’il évolue mais aussi qu’on ne voit pas
très clairement ce qu’il pourrait être. La logique
des comportements échappe lorsqu’on n’en voit pas le Sens,
on s’y perd aussi lorsqu’on ne voit pas quelle direction on pourrait
choisir.
La conquête – Le travail est d’abord ce
qui procure les signes d’identité conforme à la
cause, selon des critères qui y sont conformes aussi.
Dans un monde de la conquête où les biens matériels
sont critères, leur production est travail pour obtenir
leur possession comme signe d’identité. Le travail consiste
à produire, selon sa spécialité dans la
cause, c’est l’affaire des militants qui ainsi militent efficacement
pour la cause commune. Le chef vedette est là pour représenter
la cause. Son rôle est donc de motivation en se présentant
comme identifié à cette cause. Il dit la cause
et renforce et encadre ainsi le militantisme. Le travail est
motivant puisqu’il conduit à la reconnaissance et à
l’existence d’une identité. La spécialité,
la performance, la compétition donnent le dynamisme, le
progrès et le gain vers une meilleure identité
dans la cause (le rêve d’être N° 1 toujours moteur).
La dégradation – Le travail est instrument
de torture. C’est ce que donne une certaine éthymologie
du mot et ce que vivent beaucoup de travailleurs. Le travail
est une souffrance, une tâche plus ou moins sale à
laquelle les victimes consentent par contrainte, menace, chantage,
culpabilité. C’est le moyen de la survie (quelque soit
le niveau de rémunération). Le travail intellectuel
et le travail manuel n’ont rien à s’envier. Il n’y a pas
de victime sans dominateur, ce qui nécessite un encadrement
qui donne des ordres, des consignes, qui surveille et sanctionne,
qui "maîtrise", au Sens de contrainte, et nécessite
des "agents" eux-même victimes de dominateurs
supérieurs. Le travail est affecté de culpabilités
comme condamnation (travaux forcés) et comme devoir (rédemption
par le travail). Le produit n’a pas l’importance de la conquête,
ici l’effort, la rigueur, la soumission, la "discipline"
comptent plus.
L’involution – Le travail est un jeu, occasion
de rencontre, de sympathie. C’est aussi une habitude où
la répétition est confortable. Donner du travail
est bien une sorte de distribution gratuite, automatique. Mais
ce que l’on appelle travail n’est ni une activité productrice,
ni une contrainte, mais une sécurité, un confort,
un apport. Faire de ce travail une tâche ou y introduire
une notion d’efficacité est un non-Sens dans ce champ,
parfaitement incompréhensible pour les ENFANTS qui consentent
à faire plaisir à leur patron MATERNANT en l’aidant
comme un enfant aide son père ou sa mère qui, en
lui donnant un travail dans ce champ, lui donne un plaisir et
réaffirme son attention et le sécurise. Ils ne
faut donc pas attendre de cette vision du travail, activité
ludique, de plaisir, de protection, un intérêt particulier
pour les objectifs formels. La gratuité y est associée
contrairement aux enjeux des champs de droite.
L’accomplissement – Pour le MAITRE le travail
est tout simplement expression de soi non en référence
à quelque critère extérieur, mais fondé
en soi-même.
C’est une oeuvre commune entre maîtres qui en est le fruit.
Ce qui compte n’est pas le produit exclusivement mais le processus
de conception et de génération. C’est dans ce qui
consiste à faire émerger son propre Sens que se
produit le travail. Le résultat n’est pas un objectif
mais un fruit. La création compte par son cheminement
et non par la valeur du résultat formel obtenu. Celui-ci
n’en peut être exclu dans la mesure où il peut servir
de médiateur dans la communication d’un service proposé
à un autre PRATIQUANT.
Pour les PRATIQUANTS le travail consiste à exercer une
pratique. C’est une expérience comme pour l’apprenti dont
la production compte pour ce qu’elle lui a permit de découvrir,
comme savoir faire. Le travail est bien sûr accomplissement
non en tant que tel mais en tant que modalité particulière
que prend pour un individu l’exercice de sa discipline ou l’expression
dans sa maîtrise. L’argent, la contre partie viennent par
surcroît : la valeur financière du travail est celle
de ce qu’en prend le pratiquant comme Sens (service).
e-3 – L’entreprise
Là aussi compte-tenu des mises en question actuelles,
il est bon de pouvoir comprendre le Sens de ce qui se passe et
aussi choisir une orientation. Réinventer l’entreprise
dans le champ de l’accomplissement, c’est-à-dire comme
oeuvre humaine, paraît particulièrement opportun.
On ne pourra qu’effleurer le sujet, mais cela constitue des indications
pour un travail plus approfondi.
La conquête – L’entreprise c’est le plus
souvent la cause ou une de ses parties. L’objectif est le développement
de l’entreprise, son expansion. Il faut que ce soit une belle
et bonne entreprise. C’est le moyen pour les militants d’être
reconnus, d’avoir une "place" dans la société.
Les militants travaillent en équipe à leur poste
et militent activement sous la direction représentative
de leur chef. Le chef d’entreprise doit être vedette-modèle
aussi, en tout cas très représentatif puisqu’il
représente la cause-entreprise. Ce type d’entreprise est
hiérarchisé rationnellement, tout y est défini,
délimité y compris les progressions. Les véritables
critères de valeur sont uniquement ceux qui définissent
la cause, l’entreprise. On utilise des méthodes de pointe,
on y est toujours moderne, diplômé, avec un minimum
de prestige attaché à ce que l’on est ou ce qu’est
l’entreprise. L’appartenance à l’entreprise consiste à
épouser sa cause ce qui donne identité. Pour ce
faire on peut s’y consacrer activement et efficacement, y compris
en prenant des risques. Le plus grand est celui de perte d’identité.
La dégradation – On pourra y distinguer
deux types d’entreprises. Celles d’abord qui sont dirigées
par un despote qui tient les gens sous sa férule. Il n’y
a pas beaucoup de hiérarchie mais des "contremaîtres"
victimes du patron et dominateurs du personnel. Le travail est
une obligation à laquelle on ne peut se soustraire et
que l’on est condamné à subir sous peine d’exclusion.
C’est d’ailleurs la menace qui pèse le plus et qui justifie
la soumission. Il n’y a pas besoin d’organisation, de formation,
de réflexion sur le fonctionnement de l’entreprise. Seul
le patron sait et les critiques ne sont pas tolérées.
Dans leur intérêt les personnes qui y travaillent
doivent travailler plus dur, gagner moins sinon "l’entreprise
est en péril" et eux avec. En fait c’est le patron
qui l’est et le fait assumer par son personnel. Même si
l’entreprise gagne de l’argent on considère toujours qu’elle
n’en a pas et qu’elle est en danger, cela maintient la menace.
La crainte de l’exclusion du licenciement fait qu’on s’y accroche.
Un autre type d’entreprise différent est celle en général
plus grande qui est vécue comme une machinerie étouffante
et déshumanisante. Elle est très organisée
avec une direction anonyme mais omniprésente, et un anonymat
très grand des personnes liées à la standardisation
par exemple. La crainte est d’écrasement, d’étouffement,
de perte de son âme, de sa personnalité en devenant
un rouage. On n’en connait pas les finalités, les mouvements
individuels paraissent impuissants. L’absentéisme s’y
développe favorablement (ce n’est pas le cas dans le premier
type). Le rêve est d’en partir. Beaucoup d’entreprises
de la conquête qui en changeant de champ ont perdu leur
finalité, leur vocation, deviennent des machineries de
ce type. Les rapports dominateurs-victimes dans ces entreprises
sont moins directs que dans le premier cas. Elles se traduisent
par la perte de Sens des victimes, par les règles multiples,
la profusion ou la disparition des repères, la perte de
conscience de soi et de confiance en soi. L’automaticité
des mécanismes mis en oeuvre par la hiérarchie
déshumanisée, anonyme, fait perdre le Sens de sa
propre existence en dehors du poste occupé. Le personnel
et la hiérarchie de ce type d’entreprise peut être
bien payé, c’est le prix de leur âme et de leur
autonomie de jugement abandonnée faute de répondant.
Dans ce champ comme toujours ce qui se voit et ce qui se passe
s’opposent. Dans le premier type d’entreprise, on entretient
plutôt des discours de l’involution "c’est pour votre
bien, votre sécurité, votre confort, pour vous
protéger etc…" Dans l’autre des discours de la
conquête "pour la cause, la morale, le droit, l’identité,
la carrière, les objectifs, l’efficacité, la rationalité,
le respect de l’image, etc…" Chacun à son niveau
dans les hiérarchies est victime du dessus et d’autant
plus dominateur du dessous . Le caractère dominateur des
"petits chefs" est souvent le plus accentué.
– L’involution – L’entreprise c’est la maison,
dirigée par un patron maternant, elle n’a pas d’autres
ambitions que de subsister confortablement. Elle y arrive en
période stable ou dans un environnement protégé.
Les rentes de situation de certaines activités le favorisent,
petites administrations, certains commerces, production pour
un marché local stable, services… Les entreprises doivent
toujours être de relative petite taille. Elle risquent
de changer de champ en grandissant. Le personnel ENFANT y est
très attaché quelquefois sur plusieurs générations.
Il est très fidèle et son confort n’a pas de prix.
Les choses se passent de façon routinière mais
avec l’agrément des relations et du train-train quotidien
à peine troublé par les anniversaires des uns ou
des autres, les fêtes, les départs à la retraite…Il
n’y a pas de hiérarchie sauf la prédominance des
anciens plus maternants que les jeunes. Il y règne un
esprit de famille et des rapports équivalents fondés
sur la bienveillance et l’appui mutuel. La productivité
y est faible mais suffisante pour maintenir la stabilité.
Il n’y a pas spécialement d’organisation, ni de méthode,
le besoin ne s’en fait pas sentir, la tradition y supplée.
L’accomplissement – Il est certain que dans
notre culture il n’y a guère d’entreprises dans ce Sens
et notamment celles qui s’affublent de buts humanitaires. La
condition y est que toute activité émane de celui
qui l’exprime ou prenne Sens pour lui. L’activité se réfère
aux personnes dans leur accomplissement personnel, ni d’obligation,
ni de confort ou de bien être, ni pour rassembler les signes
de la réussite sociale au travers d’une cause quelconque.
L’entreprise est un rassemblement de personnes autour d’une oeuvre
entreprise en commun par des maîtres et par laquelle ainsi,
des pratiquants peuvent exercer leur discipline ou en recueillir
le service.
L’entreprise ne peut être que la conjonction des maîtrises
particulières de ses partenaires. Elle est l’émanation
de leur conSensus s’exprimant dans leur profession, leur savoir
faire, leur connaissance. Les pratiquants peuvent y faire un
apprentissage personnel en s’exerçant. C’est ce que pourrait
viser la formation dans l’entreprise que d’en faire le lieu de
l’apprentissage, à condition qu’il y ait aussi des maîtres.
D’autres pratiquants sont ceux qui en achètent les services
ou le produits selon la valeur qu’ils y consentent.
Le Sens de l’entreprise pour les maîtres qui la constituent
est le développement de leur maîtrise dans et par
l’accomplissement de l’oeuvre entreprise. Ce ne peut être
qu’une vocation personnelle dans le contexte culturel. L’intérêt
social est de proposer des services à des pratiquants
pour y prendre Sens, de la recherche spirituelle jusqu’à
l’usage matériel en passant par l’apprentissage et tous
services et toutes disciplines dont la pratique est enrichissante
pour la personne. Cela implique l’inverse d’une politique du
secret, de l’occultation des fins et des moyens. L’intérêt
de l’entreprise se fonde et se confond dans l’accomplissement
de ses partenaires. La production n’est qu’un moyen et une pratique.
e-4 – L’argent
C’est quelque chose de tellement banal qu’il peut être
intéressant d’en discerner des rôles très
différents sous l’apparence d’une seule réalité.
On étudiera avec la carte générale des cohérences
ses différents Sens, se dessinant les représentations
qui lui donnent sa fonction comme élément de communication
interpersonnelle et sociale.
La conquête – Comme tout ce qui est dans
ce champ, c’est un élément objectif, une mesure
d’équivalence formelle. L’argent est un signe et sa valeur
est de référence selon un cours, des critères,
un marché. En tant que signe, il peut être lui-même
un simple signe ; écriture sur un chèque, sur un
compte et n’a même pas besoin d’être une réalité
palpable. L’argent compte pour sa quantité qui situe les
choses et les gens, les uns par rapport aux autres. C’est un
système de mesure. L’argent gagné par le militant
est le signe de son niveau avec lequel il peut avoir des signes
de reconnaissance équivalents à son engagement
pour la cause. Le chef vedette paye avec de l’argent le militantisme.
Payer fait partie de son image comme signe de sa prodigalité,
signe de reconnaissance, l’argent ne compte pas pour lui. Malgré
tout il en dispose d’assez pour "tenir son rang". L’argent
est pour lui celui de la cause auquel il est identifié,
cela est un des signes. Les ors et les richesses brillantes,
l’argent donc, disent le triomphe et la munificence de la cause
et de son représentant confondus.
La dégradation – L’argent y joue deux
rôles si on prend les références psychanalytiques
classiques anales et orales. D’une part, d’abord, il est accaparement,
accumulation, capitalisation. C’est de la matière prise
(gardée) contenue. L’intérêt est l’accumulation
avarice ou capital. L’idéal est l’auto-développement
de la matière monétaire. Il n’est pas inutile d’ailleurs
que l’argent soit palpable, billets, pièces, valeurs,
etc… C’est la fonction de beaucoup d’objets de luxe. Cet argent
est toujours entouré de secret, de tractation ou d’origines
occultes avec un soupçon de malpropreté. Le dominateur
l’accumule en l’économisant et surtout en le soustrayant
à la propriété d’autrui. La quantité
n’est pas significative pourvu qu’elle paraisse grosse et qu’elle
marque son pourvoir. Pour lui l’argent est une forme de sécurité.
La victime en manque toujours et n’arrive pas à économiser
suffisamment pour se sentir en sécurité. Cela maintient
sa dépendance.
L’autre argent dans ce champ est au contraire une sorte de nourriture.
C’est quelque chose que l’on consomme et qui dans ce champ n’est
pas bon, pas sain. Cet argent ne se conserve pas il est fait
pour être consommé, dépensé. Le dominateur
gaspille, il paye éventuellement bien les victimes qui
de ce fait sont achetées, prises dans leur culpabilités
vis-à-vis de cet argent qui justifie leur soumission.
Cet argent, ils n’osent pas à leur tour le dépenser
et le placent dans des dépôts dont ils ne tirent
guère jouissance et où il s’amenuise ou encore
ils le perdent, au jeu par exemple.
L’involution – La tendance a ne pas prendre
conscience des réalités fait que l’argent est considéré
comme sans valeur très objective. Ou on en n’a pas besoin,
ou on en rêve comme d’un trésor mythique, de fortunes
colossales, sources de toutes abondances. Le plaisir de le recevoir
ou de le donner compte comme expression affective, comme don,
plus que par sa valeur. L’argent est distribué par le
maternant avec le plaisir de donner et il est reçu comme
chose normale par l’enfant qui y voit le plaisir et le confort
que cela signifie.
Si l’argent a de la valeur, c’est pour lui-même, une pièce
d’or vaut mieux qu’un billet de même valeur nominale. Les
petites économies sont plus des petits trésors
de pièces que de billets, leur valeur est plus imaginaire,
sentimentale qu’économique.
L’accomplissement – L’argent n’est pas absent
de ce champ puisqu’il est une réalité. Cette réalité
doit être élucidée ou encore être l’expression
juste d’un Sens (quelqu’il soit). Il correspond au prix d’un
service rendu dans la relation maître-pratiquant. Pour
ce dernier il exprime la valeur pour lui personnellement de ce
service par rapport à la valeur pour lui de l’argent.
C’est un fait, un don, une offrande en contrepartie (subjective)
du service, du Sens pris.
C’est donc la réalité d’un conSensus, terme d’un
contrat dont il est une forme d’expression. Pour celui qui le
reçoit en position de maître en principe, cela représente
un des fruits de son activité, de son existence dans sa
maîtrise. Cela permet d’être aussi pratiquant et
de ce fait offrir de l’argent à d’autres MAITRES.
La somme et les modalités d’un paiement sont expression
d’un Sens pris par le pratiquant, le client, et ce Sens est à
élucider, l’occasion d’une prise de conscience éventuellement.
La somme demandée par le maître lorsque cela se
produit est une proposition d’élucidation et non une facture
obligatoire. L’argent n’est pas la mesure de toutes choses mais
une réalité qui médiatise le conSensus dans
une communication. Ce conSensus se place dans ce champ en tant
qu’élucidable.