La communication et les relations humaines

Ce texte date de 1980. Il donne une lecture de la communication qui ne s’est pas démentie avec les développements de la théorie du Sens et des cohérences humaines à la base de l’Humanisme Méthodologique. De nouveau concepts on été développées depuis mais les bases sont là. La communication humaine est communication de Sens et son enjeu est le conSensus qui va permettre de partager une tranche de vie.

S O M M A I R E

PREAMBULE

I – LA COMMUNICATION

1 – Le Sens et les réalités

a) l’ordre des réalités

b) l’ordre du Sens

c) le rapport entre l’ordre du Sens et l’ordre des réalités

2 – Le schéma relationnel

3 – les problèmes de communication et leur résolution

a) les objectifs de la communication

b) les problèmes et les difficultés de la communication

– problèmes de conscience

– problèmes de fonctionnement

c) conduite des communications

– la méthode

– stratégies

– les moyens

Cet article est suivi par la série « Les jeux d’identité » qui développe une typologie des relations et communications humaines

PREAMBULE

La théorie des Cohérences Humaines, avec les cartes générales des cohérences offre une nouvelle approche des phénomènes de communication et des relations inter-individuelles. Elle permet d’en intégrer les trois dimensions :

– Les processus de communication qui relient les interlocuteurs:

dimension fonctionnelle

– Les circonstances et situations de communication qui amènent

les relations ou en sont les conséquences :

dimension situationnelle .

– La nature de la relation dont le Sens se joue par les processus

de communication, dans les circonstances de relation et selon

les tendances propres des interlocuteurs, c’est-à-dire les jeux d’identités :

dimension personnelle .

Une relation entre deux individus est, en circonstance, la rencontre

particulière de deux mondes. L’univers de chacun avec son histoire personnelle – ses objectifs, sa personnalité, ses modalités propres, professionnelles, affectives, familiales

– se croise avec l’univers de l’autre. Ce croisement appartient

à leur histoire individuelle mais aussi commune. Cette relation entre deux personnes peut être réussie ou ratée, satisfaisante ou frustrante, mobile ou figée, stable ou fugace, possible ou impossible. La vie de chaque individu est constituée de l’ensemble des relations avec autrui.

Elles forment la trame de son histoire et de de sa personnalité. Elles en sont aussi le moyen et l’enjeu. A part dans un monde machinique où tout serait normalisé, aseptisé, les relations à autrui resteront l’essentiel des enjeux de vie même s’ils se dissimulent quelquefois comme de simples moyens.

Dans le monde du travail, par exemple, les entreprises sont faites d’un réseau complexe de relations et d’intercommunications. Certains pourraient penser qu’il n’y a là qu’organisation rationalisée au seul service des objectifs de production ou de profit. La part de temps que les hommes y consacrent permet de soupçonner que c’est la vie même qui se déploie dans ces jeux de relations aussi codifiés, aussi appauvris soient-ils, l’histoire des jeux relationnels inter-individuels dont la communication constitue les circonstances comme causes et conséquences. Ses processus sont des processus de communication dans lesquels les pratiques de production s’insèrent comme media. On pourrait aussi dire exactement l’inverse, c’est-à-dire que les relations s’insèrent dans les processus de production.

En fait l’approche ici s’attache à la cohérence de l’ensemble. Les uns jouent sur les autres et l’action sur les uns agit sur les autres. Processus de communication et circonstances de relation sont ainsi complément interdépendants. Ils le sont aussi avec les personnalités spécifiques qui y participent.

Une erreur quasi générale consiste à envisager à fond l’un de ces aspects en ignorant les autres. Il n’y a de situations réelles qu’intégrant les autres. Il n’y a de situations réelles qu’intégrant l’ensemble des trois dimensions. L’abstraction qui est le plus souvent faite de l’une ou l’autre de ces dimensions empêche de déboucher sur des pratiques véritables malgré tout l’intérêt des connaissances qu’elles permettent. Ignorer la dimension personnelle ne permet que de traiter de questions formelles, objectivées. L’absence de la dimension situationnelle idéalise l’humain en le déconnectant de son environnement véritable. Sans les processus de communication, il n’est pas possible de sortir d’une vision statique.

Le fonctionnement de la relation est ce qui la fait vivante et donc réelle. Il n’y a pas d’autres possibilités d’intégrer toutes ces dimensions que par le concept de cohérence qui sera développé plus loin.

Il ouvre aussi sur deux directions.

– L’une est la dimension collective . C’est par le tissu relationnel que se constitue le réseau social qui fait un groupe, une organisation, une société.

Ces ensembles sont aussi bien circonstances initiales que résultantes des relations inter-individuelles. L’environnement humain pèse lourd sur les relations entre les personnes. Il les conditionne d’une part, mais il n’est aussi que leur produit. Ainsi il y a une influence possible des systèmes sociaux par les jeux relationnels. C’est important d’en connaître les possibilités et les limites bien sûr. Comme on le verra, les relations

intergroupe, les relations individus- groupe en sont des aspects notables.

L’autre direction ouverte est celle de la dimension individuelle . Que ce soit dans la conduite de sa vie, en toutes circonstances, que ce soit aussi dans des situations très importantes comme les relations de couple, certaines relations professionnelles, ou des moments graves, les rencontres et communications avec autrui sont essentielles. Sa propre vie dépend de la qualité ou de l’échec dans ses relations. C’est aussi par elles que l’on apprend à se connaître, si l’on sait en lire le Sens pour choisir, ou du moins chercher, celui de sa vie.

I – LA COMMUNICATION

1 – LE SENS ET LES RÉALITÉS

Pour caractériser ce qui se passe entre deux personnes on peut essayer de décrire ce que l’on observe.

 Une relation commence à s’établir dans des circonstances particulières, au restaurant, dans un bureau, dans la rue, en vacances, à l’hôpital, etc… Ces circonstances représentent un peu la scène où tout va se jouer. Elle est définissable par son lieu, le moment, les objets et accessoires disponibles, les autres spectateurs, peut – être, mais aussi les habitudes ou stéréotypes qui s’attachent à tel ou tel lieu.

On n’établira pas forcément la même relation avec quelqu’un que l’on retrouve sur le quai d’une gare qu’avec un collègue dans un lieu de travail. L’histoire de la rencontre, comme les possibilités de son développement ne sont pas les mêmes.

La scène repérée, il s’échange entre les partenaires des gestes, des mimiques, des expressions diverses mais aussi des mots. C’est ce que l’on appelle habituellement la communication. On pourrait essayer d’inventorier ainsi tous les éléments de la scène et de ce qui s’y déroule.

L’entretien lui-même a son histoire qui s’achève rapidement, ou continue en jouant sur les circonstances elles-mêmes, on peut changer de lieu, de moment même et y voir un premier effet de la communication. L’observation ne devrait pas s’arrêter là, mais se pencher sur les résultats de la relation établie pour les partenaires. Ces résultats pour l’un et pour l’autre se développent dans le temps quitte à renouveler l’expérience relationnelle elle-même.

Tout cet ensemble, effleuré ici, représente l’aspect objectif de la relation, ce que l’on appellera ses réalités. Si on s’intéresse à son fonctionnement, elles représentent les réalités mêmes de la communication.

Or on sait bien que la communication ne peut se réduire à ses réalités. Une série de mots prononcés ou écrits est destinée à signifier pour l’interlocuteur. Chacun donne Sens à ce qu’il reçoit dans une relation. Ce Sens là n’est pas forcément évident, il n’est pas automatiquement communiqué sinon toute communication serait objectivement parfaite.

Il faut développer tout cet autre aspect de la communication qui est celle du Sens. Tout d’abord ce terme de Sens doit être explicité par ses interventions dans le contenu et le fonctionnement d’une relation où on le découvre sous plusieurs modes.

Dans un échange relationnel, il y a d’abord le Sens de ce qui se dit pour l’un et pour l’autre. Si c’est compris, c’est que cela a du Sens pour les partenaires, il y a une logique dans ce qui s’exprime. C’est devenu banal en outre de repérer que d’autres expressions, non verbales, concourent à la communication. Elles font aussi l’objet de perceptions par les Sens. Cette Sensibilité plus ou moins consciente contribue à donner Sens à ce qui se passe. Justement aussi, ce qui se passe a une dynamique, un déroulement vers des objectifs, atteints ou non. Par là même cela a encore du Sens, le Sens de la relation, son pourquoi comme son comment, comme la direction de ses résultats.

N’arrive-t-il pas encore qu’en relation avec autrui, on ressente un décalage entre ce qu’il dit et sa manière de le dire qui peut quelque fois le contredire. On comprend à demi-mot, au delà des mots ou malgré les mots. On appellera cela l’intuition, mais c’est encore une question de Sens.

Nous approchons ainsi d’une autre modalité que l’on appelle le vécu. L’impression que l’on a, comment on sent ou ressent l’autre, se réfère toujours au même contenu : le Sens.

Relation affective, d’agressivité, de plaisir, de souffrance, de sympathie, tout cela fait appel au sentiment, à l’émotion, choses qu’une fois encore l’on ressent comme modalité du Sens.

Toutes ces expressions, toutes ces modalités manifestent la même chose : le Sens ou les Sens dans la communication. Chacune des modalités peut être communiquée volontairement. On veut communiquer du Sens par le moyen de différentes réalités.

Prenons un exemple : une personne pose à une autre une question, en soi assez anodine. Il la pose sur un ton agressif, en souriant, dans une circonstance détendue. Quel est le Sens de la question pour l’interlocuteur ? Si on l’analyse en séquence, interviennent :

Le Sens de la sollicitation, pourquoi à cet instant, dans ce lieu ?

Le Sens direct de la question.

Le Sens agressif qui peut provoquer, inquiétude, réaction, etc…

Le sourire qui dément ou au contraire renforce le précédent.

Les circonstances qui participent au Sens donné à l’événement.

Les personnalités des interlocuteurs et leur connaissance mutuelle.

Pour l’observateur, il y a ainsi une infinité d’interprétations possibles. Pour les interlocuteurs beaucoup moins. Il est probable qu’une réponse va venir confirmer le Sens donné à la question par le second personnage.

En définitive, c’est tout un ensemble de Sens qui s’exprime dans l’énonciation de cette question là. L’interlocuteur peut donner aussi tout un ensemble de Sens à cette question de son point de vue à lui. Le Sens de la question pour lui est en fait l’ensemble de ces Sens ou une sorte de résultante.

Centrée autour de cette question, nous pourrions aussi engager une analyse systématique de tous les Sens, portés par toutes les réalités de la communication. Au travers de leurs diverses modalités, ces Sens sont ceux donnés à l’ensemble des réalités présentes, c’est-à-dire les objets, mots, formes, structures, faits, espaces, temps, etc… L’ensemble de ces Sens est ce que nous appelleront une Cohérence. C’est à la fois la Cohérence de la situation, de la relation et de la communication.

Sont ainsi distingués dans une communication deux ensembles, issus de deux analyses différentes :

L’ensemble des réalités tiré d’une observation objectivable.

L’ensemble des Sens, ou Cohérence, tiré d’une analyse des Sens, ou simple ment d’une approche intuitive, subjective . Objectivité et subjectivité sont bien les deux ordres d’une communication ou interviennent sujets et objets. C’est d’ailleurs là que se différencient les communications humaines et les communications machine-machine, où les partenaires ne sont pas sujets mais simples objets.

Il faut revenir plus théoriquement sur ces concepts de réalités, de Sens et de Cohérences tels que nous les avons envisagés jusqu’ici. Ils sont en effet à la base des théories qui sous-tendent et justifient tout ce texte. Leur usage déborde largement le cadre des communications et des jeux d’identité mais c’est ce qui permet d’en intégrer toutes les dimensions.

Ce passage théorique pourra être consulté dans le cours du texte pour y retrouver la définition des quelques concepts originaux de cette approche.

a) L’ordre des réalités

observation: cette partie se trouverait enrichie par la structure cohérencielle découverte ultérieurement mais déjà embryonnaire Il correspond à une première manière d’observer et de décrire les situations.

Une situation se caractérise comme un ensemble d’éléments objectifs ou objectivables.

Chaque éléments est un « objet », c’est-à-dire défini, délimité de dimensions mesurables, comparable à d’autres objets. Il peut s’agir aussi bien d’objets matériels (« objets », personnes…) ou conceptuels. Un objet est désignable même s’il n’est pas parfaitement mesurable mais on peut supposer que seule une insuffisance de moyens de mesure ne le permet pas.

Dans une situation réelle seront considérés comme objets les éléments et les rapports logiques entre eux (rapports objectifs ou objectivables). Prenons comme exemple un repas de famille dans la pièce habituelle.

La situation objective peut-être analysée dans l’ordre des réalités de la manière suivante.

Inventaire des « objets » présents : personnes, ustensiles, mobilier, plats, paroles, bruits…

Inventaire des rapports entre objets : ustensiles sur la table, ordre dans les plats, dans les places autour de la table, séquence des événements, regards, conversations, etc…

Chacun des éléments pourrait lui aussi être découpé en parties plus petites (par exemple les objets matériels en molécules, puis atomes…, les conversations en phrases puis en mots, puis en phonèmes…)

Une telle analyse de situation est sans limites et on peut recenser une infinité d’objets et établir une infinité de rapports ou de lois de relation entre eux.

b) L’ordre du Sens

Les Sens d’une situation ne sont pas des objets définissables. Pour faire un jeu de mots qu’il faut prendre au sérieux nous dirons que le Sens cela se sent. Nous pouvons parler de certaines de ses modalités par lesquelles il s’exprime ou on y accède. Le Sens se trouve notamment dans :

Le vécu. – La fonction

Le ressenti. – L’esprit

L’intuition. – L’âme

La dynamique. – Le flair

La signification. – La tendance

La logique. – la direction

L’expérience. – L’orientation

La perception. – L’ambiance

La Sensation. – etc.

La liste n’est pas exhaustive. Le Sens est ce que tout cela a en commun ; comme commun dénominateur qui permet d’ailleurs de passer de l’un à l’autre.

Une situation peut-être considérée comme un ensemble de Sens qui s’y exprime dans des réalités. Cet ensemble de Sens est ce que l’on appelle sa cohérence.

La cohérence d’une situation est en même temps, ce qui fait que ses éléments vont ensemble.

Dans la scène du repas de famille, la cohérence de la situation fait l’existence objective de cette situation, la présence et l’articulation de tous les objets en présence.

On utilise fréquemment l’expression « le Sens d’une situation ». En fait il faudrait parler soit de son Sens, soit de sa Cohérence. Cependant on peut aussi considérer que le Sens de la situation est une sorte de résultante ou de dominante de l’ensemble des Sens qui s’y manifestent. C’est encore le Sens de la convergence de ceux d’un grand nombre des objets en présence.

L’ambiance du repas est faite de sa Cohérence, de son et ses Sens. Par exemple, si l’un des objets est un gâteau d’anniversaire, le Sens de la situation se manifestera dans la présence même de ce gâteau et dans tous les autres signes d’une fête et d’un certain type de relation entre les personnes. Le gâteau d’anniversaire peut avoir toutes sortes de Sens, et c’est un certain nombre d’entre eux seulement qui s’expriment dans cette atmosphère de fête.

Ce sont ceux qui font parties de la Cohérence de la situation, faite, elle-même, de bien d’autres Sens.

c) Les rapports entre l’ordre du Sens et l’ordre des réalités

Nous donnerons ici une série de définitions brutes qui seront reprises à l’occasion au cours du texte.

Ces deux ordres sont transcendants, c’est-à-dire irréductibles l’un à l’autre. Un Sens n’est pas objectivable absolument

mais ne peut-être qu’ajusté. Un objet (définissable) n’est pas le Sens, il ne peut être que précisé.

L’ordre du Sens peut être considéré comme premier à l’ordre des réalités (en première approximation logique). De ce fait les réalités d’une situation sont l’expression de ses Sens et sa Cohérence en assure la pérennité au-delà des apparences (exemple : la « personnalité » d’une organisation, sa cohérence au-delà de son historique).

Une cohérence peut s’exprimer dans des réalités différentes (différentes situations, états de la situation, aspects différents de la situation…) Ces réalités sont dites homologues (de même cohérence) (exemple : deux bilans de la même entreprise).

Deux cohérences peuvent être convergentes pour donner une réalité commune. Elles sont dites isologues (exemple : un discours à double Sens).

Un objet dans l’ordre des réalités correspond à un ensemble de Sens (une convergence) dans l’ordre du Sens ou impression symbolique.

Deux objets peuvent avoir des Sens communs, ils sont alors isomorphes par ses Sens là. (exemples : crayon et stylo pour écrire, le mot pour désigner et la chose désignée).

Deux impressions symboliques peuvent être convergentes pour un objet commun. Elles sont dites isotopes . (exemple : le phonème « SO » avec les impressions symboliques de SAUT et SOT…).

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2 – LE SCHÉMA RELATIONNEL

Cette distinction entre l’ordre du Sens et celui des réalités était nécessaire pour comprendre le schéma relationnel d’une communication entre deux individus.

Pour faciliter l’exposé, nous allons examiner en séquence différents aspects du processus de la communication qui, en fait, peuvent très bien être simultanés.

Le processus peut être considéré comme fondement d’une nouvelle théorie de la communication.

Nous allons envisager la communication entre deux personnes A et B supposant que A est initiateur du processus.

En premier lieu, ce que A veut communiquer à B c’est d’abord du Sens, en fait un ensemble de Sens , c’est-à-dire une cohérence que l’on notera K.

C’est cette cohérence K de A qu’il veut communiquer à B et qui veut se communiquer. La cohérence s’exprime comme contenu et motrice d’un message qu’elle sous-tend et qui en est la manifestation. D’ailleurs quand on dit s’exprimer le « s » renvoie bien au sujet comme au contenu (au Sens) du message.

Le message maintenant. La cohérence, de l’ordre du Sens, se manifeste dans un message de l’ordre des réalités. Le message c’est la situation que l’on notera S. La situation est faite d’un lieu, d’un temps, d’objets, de rapports entre eux et notamment de mots, phrases, mimiques, etc…

Le message c’est tout cela à la fois. C’est cette réalité qui manifeste la cohérence K.

Il est banal de reconnaître que la communication entre deux personnes n’est pas faite que de mots, qu’elle a une dimension non verbale. En plus, le lieu, les circonstances jouent un rôle, comme on le verra, l’ »humeur » ou l’ »état d’esprit » préalables des partenaires. Mac Luhan dit, dans un contexte plus étroit : « le médium c’est le message ». En fait, nous disons que le médium (s’il y en a un, écrit, radio…) n’est qu’un des éléments de la situation comme les mots ou les objets en présence.

C’est toute la situation qui est le message porteur de Sens, exprimant une cohérence. Un mot est, dans cette situation, un objet dont le Sens n’est repérable que par sa participation à une réalité faite d’autres mots et du contexte.  

Chaque objet de la situation contribue au Sens mais ne le porte pas à lui tout seul (sauf exceptions rares). Le Sens ou

plutôt la cohérence du message c’est ce qui fait aller tous ces « objets » ensembles. Notons encore que deux « objets » particulièrement importants dans la situation sont les deux individus A et B par leur présence physique. La « tête » de celui qui parle contribue au Sens de ce qu’il dit ; la personne même de son interlocuteur aussi. Il faut souligner encore que la contribution de tous ces objets, de tous ces signes au message n’est pas forcément consciente pour les interlocuteurs. De même la cohérence K ne l’est pas forcément pour son porteur A. Il faudra se rappeler dans tout ce qui suit que nous parlons de ce qui se passe réellement que ce soit conscient ou inconscient pour l’un, l’autre ou les deux interlocuteurs.

Nous en sommes dans notre processus à : K—–> S En dehors de la présence (proche ou distante) de l’interlocuteur,

indispensable pour qu’il y ait deux partenaires et communication, nous n’avons pas encore tenu compte de son fonctionnement.

Le premier point est le fait que B donne Sens (cohérence) au message (la situation S). Sa compréhension de la situation, message S ne dépend que de lui (expérience, histoire personnelle, disponibilité, etc…) Retenons surtout que B est, en ce qui le concerne, le seul auteur du Sens qu’il donne au message.

On supposera, comme c’est évidemment le cas général, que la cohérence qu’il donne d’emblée à la situation S est différente de K et elle sera notée K’.

On peut dire que K’ est la cohérence activée par S pour B. Cette activation dépend en fait de trois facteurs essentiels : De la personnalité propre de B (peut-être inaccessible à certains pour des raisons personnelles ou culturelles…)

Des préactivations qu’il porte en lui au préalable, son « humeur », est une préactivation comme une réflexion, un événement ou une conversation et contribue à donner Sens à la situation S en participant à la cohérence K’.

De la situation S elle-même (heureusement pour A, il a quand même la possibilité de jouer un rôle actif dans la communication. C’est même ce qu’il tente de faire).

On reviendra à plusieurs reprises sur ce phénomène d’activation qui conditionne la pratique de la communication et pose bien des problèmes.

A ce stade si K’ l’exprime (s’exprime) dans une réponse R, son message en retour, c’est encore une situation-réalité R faite d’objets en relation comme l’était S. La réponse R joue pour A le même rôle que S pour B, c’est-à-dire que A va donner Sens à R. Cette activation par R dépend des mêmes facteurs que pour B.

Sa personnalité (A).

La réponse-situation R.

Les préactivations qu’il porte en lui.

Sur ce dernier point il faut noter que cette préactivation est celle de la cohérence K. De ce fait elle jouera son rôle dans le Sens donné à R. Autrement dit le Sens de la réponse pour A est toujours fonction du Sens de son message propre.

Le schéma de la communication est maintenant bouclé et on peut immédiatement penser que le processus continue la boucle. Peu à peu, si tout va bien, K’ tend vers K (ou K vers K’) et la communication idéale est celle K’ et K sont les plus ajustées (identiques).

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Ce schéma de la communication entre deux personnes mérite d’être examiné notamment pour être comparé avec d’autres.

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Tout d’abord, il apparaît que la communication peut s’analyser dans l’ordre du Sens et l’ordre des réalités.

Dans l’ordre du Sens on a l’essentiel de la communication, ce qui en est moteur, mobile et contenu. Il faut souligner par contre qu’il n’y a pas de lien direct entre K et K’ mais médiation par le message S. Il n’y a pas de ce fait communication immédiate du Sens entre deux personnes mais nécessité de passer par une réalité intermédiaire. Il n’y a pas non plus automatisme objectif de la communication du Sens qui est toujours redonné par le récepteur du message.

Dans l’ordre des réalités, on peut noter deux choses : la première est la possibilité de participation de R à S et vice versa. En effet, les deux situations, réalités peuvent avoir des objets communs. De ce fait pour B, R peut n’être qu’un aménagement de S, un énoncé verbal, par exemple. En tout cas, ce qui compte c’est le point de vue sur la situation.

S est le message de A vu par B

R est le message de B vu par A

Même si R et S étaient identiques les points de vue ne sont pas forcément les mêmes et peuvent être considérés comme séparés : R différencié de S

Dans cet ordre des réalités, la relation entre S message initial et R réponse est particulièrement intéressante. En effet, si l’on ignore K et K’, (l’ordre du Sens) la communication se résume à ce rapport S – R.

C’est le rapport entre un stimuli S et une réponse R comme résultat. La communication est objectivée, le schéma général montre qu’il n’y a de lien entre S et R que médiatisé, c’est-à-dire dire par le jeu du Sens et des cohérences.

Par contre les théories classiques objectivantes (ignorant K et K’) cherchent à établir un rapport logique entre S et R. Ce rapport, dans une telle perspective, implique un canal qui est la matérialisation d’une circulation qui fait passer de S à R.

On rejoint la cybernétique et la théorie de l’information. L’information va jusqu’à être quantifiée et on travaille aux problèmes de codage, de transports d’information, de circuits, de canaux, etc… toutes choses qui tendent à matérialiser la communication. Or entre S et R il n’y a pas de lien direct sur notre schéma, chercher à en instaurer, c’est tenter une rationalisation objective d’un phénomène qui ne l’est pas totalement (subjectivité de la communication humaine). On peut de là dénoncer ces théories qui pourraient présenter l’ordinateur comme modèle pour la communication alors qu’il n’en est qu’une pâle image. Cette tendance conduit à objectiver les sujets, à faire de l’homme un pur organisme mécanique.

Dans cette approche qui objective le phénomène de la communication en ne s’intéressant qu’à l’ordre des réalités, le concept de « boîte noire » est souvent utilisé pour indiquer le processus entre S et R. On notera l’ironie de cette image de boite noire, qui est noire non parce qu’il y a des mécanismes internes inconnus mais parce qu’elle est vide.

Ainsi cet examen dans les deux ordres nous conduit à considérer qu’ils sont indispensables l’un et l’autre, l’un à l’autre. C’est là la source de toute la richesse des communications humaines et aussi de toutes les difficultés.

Les modèles simplistes rendent compte des choses dans une certaine mesure où tout se passe comme si… Par contre il est nécessaire d’avoir une vue d’ensemble du phénomène pour pouvoir en tirer quelque chose dans la pratique. Les modèles qui réduisent la communication à l’un ou l’autre des deux ordres sont séduisants par l’impression qu’ils donnent d’une facilité de compréhension des phénomènes.

Cela va au détriment de la résolution concrète des problèmes qui ne sont jamais conformes à leurs prévisions.

Nous allons aborder maintenant différentes conséquences théoriques, pratiques et méthodologiques du schéma général de la communication.

3 – LES PROBLÈMES DE COMMUNICATION ET LEUR RÉSOLUTION

Le phénomène de la communication est tellement banal qu’on peut avoir du mal à l’envisager comme un problème. Il n’est pas toujours évident de prendre conscience que ces problèmes sont au coeur de difficultés de toute nature et dans tous les domaines, qu’il faut essayer de résoudre.

Ils sont aussi au cœur de la plupart des projets de tous ordres que l’on se donne. 

Pour les difficultés, prenons par exemple un problème de productivité insuffisante dans une entreprise. Sans nier tous les facteurs qui font la réalité de cette situation, toute action sur celle-ci passera obligatoirement par une communication (obtenir une réponse R plus favorable).

Pour les projets, toutes les actions qui impliquent la participation d’un tiers au moins sont fondées sur une communication (obtenir une réponse R conforme au projet). Tout le champ de l’action est conditionné par la communication pour faire faire ou transmettre une expérience, sans compter que très souvent l’enjeu de l’action est une relation.

Tout ceci n’est vraiment clair qu’à partir du schéma de la communication dont la caractéristique est sa dynamique, c’est-à-dire le mouvement qui mène à une conséquence, à un résultat. Toute communication a un Sens, un objectif.

a) Les objectifs de la communication

Communiquer n’est jamais gratuit, c »est toujours pour obtenir quelque chose et c’est dans cette perspective que l’on peut en comprendre le processus. C’est aussi la condition pour passer à la pratique : obtenir un résultat.

Le schéma indique immédiatement deux types de résultats qui peuvent être recherchés selon l’ordre où on les envisage.

Dans l’ordre du Sens le résultat recherché est, par la communication de cohérence, un conSensus ; conSensus signifiant ici uniquement Sens communs (même cohérence). Tout le champ relationnel s’y retrouve. Que les modalités du Sens soient d’ordre intellectuel, affectif et même physique, c’est toujours une recherche de conSensus qui fait l’enjeu de la relation dont le processus est la communication.

Pourquoi faire ? quelques fois rien d’autre, qu’établir un conSensus et en tirer jouissance. Il se trouve aussi que le conSensus est la condition pour que s’établisse une conscience des réalités et même se produisent des réalités communes.

Dans l’ordre des réalités, la communication peut viser directement un résultat R comme réponse à la communication. Il faut noter que R est le situation-réponse comprenant l’individu B, ses expressions personnelles et aussi les circonstances. Ce schéma de communication conduit alors directement à la situation résultante et non à une pure description de celle-ci. C’est toute la différence entre la transmission d’un savoir faire et d’un savoir purement descriptif par exemple. C’est aussi ce qui différencie les discours d’une communication efficace.

La communication est ainsi, soit une fin en soi dans le conSensus, soit le moyen d’obtenir une réponse (en situation) c’est-à-dire un résultat. L’intégration des deux est la base des processus de prise de conscience et de changement, personnels ou collectifs.

Si l’on regarde maintenant de plus près ce qui se passe dans le processus de communication, on s’aperçoit qu’au fur et à mesure qu’il se poursuit, le conSensus tend à s’établir.

En effet, si une première boucle part de K1 pour donner S1, K’1, R1, la réponse va donner pour A un déplacement possible d’activation K2 qui va amener S2, K’2, R2, etc… Normalement la communication tend à se stabiliser sur une cohérence commune pour A et B. C’est l’établissement du conSensus mais aussi d’un relation stable. En effet, plus K’ est proche de K, plus R active K et plus K tend à se manifester à nouveau. Le processus est autoamplificateur. Si un conSensus ne s’établit pas, il y a obligatoirement rupture de la communication. Un désaccord réel sur le

fond (c’est-à-dire le Sens) entraîne une rupture (sauf illusion commune qui serait la marque d’un autre conSensus moins conscient).

En définitive toute communication entre individus tend à se stabiliser en s’amplifiant ou à se rompre. Encore faut-il, si elle se stabilise, que ce soit sur un conSensus favorable. En effet, dans une communication entre A et B, si A influence B il est aussi influencé par B. En partant de K, il peut très bien se trouver dans un conSensus très différent. Cela peut-être satisfaisant ou poser bien des problèmes, tout dépend de l’objectif recherché.

Cela dépend aussi de la capacité de conduire une situation d’entretien à deux pour amener ce que l’on cherche plutôt qu’être purement réactif, c’est-à-dire activé par l’autre. C’est une question de pouvoir sur le Sens autrement dit de puissance.

Avant d’aborder les problèmes de communication explicités par le schéma, il faut faire une remarque importante pour la suite. Dans une relation stable, on a vu qu’un conSensus s’établissait sur une même cohérence K différent de K’ et que S comme R en étaient les réalités.

On peut considérer que la situation de communication elle-même est de cohérence K. Ainsi cette cohérence est à la fois :

– La cohérence de la situation relationnelle (dimension situationnelle).

– La cohérence de la communication (dimension fonctionnelle).

C’est ce qui fait que les circonstances, pour les interlocuteurs sont inséparables de la communication elle-même.

Elles y jouent un rôle et en sont influencées. Ceci est vrai aussi bien pour tout un réseau de communication comme une organisation dont la cohérence générale est celle des relations qui s’établissent entre ses membres et ses partenaires.

Ainsi la cohérence d’une situation d’entreprise, par exemple, indique celle des relations qui s’y établissent et vice versa. D’autre part, l’action sur la cohérence (établissement, renforcement, changements…) peut être menée aussi bien par l’un ou l’autre : situation et jeux de relations. C’est l’objectif de la plupart des actions et des communications dans les entreprises et organisations humaines.  

La troisième dimension, personnelle, intervient aussi dans le type de cohérences en jeu. C’est ce qui fait le contenu du chapitre sur les jeux d’identité. On y verra que les objectifs de la communication dépendent des cohérences personnelles qui sont encore celles que l’on trouvera en jeu dans les situations et les processus de communication.

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La cohérence est encore une fois, ce qui fait aller tout

cela ensemble. Sa connaissance permet de comprendre et d’y intervenir

par la communication dont on voit tout l’enjeu

et donc les véritables objectifs possibles.

 

b) Les problèmes et les difficultés

de communication

 

Le schéma du processus de communication entre deux individus

montre déjà que la communication ne peut être

parfaite. K’ est d’emblée différent de K et bien

que les deux cohérences tendent par la suite à

s’ajuster, on ne peut être certain d’une absolue identité.

 

Problèmes de conscience – La communication

peut aussi présenter de graves dysfonctionnements que

l’on peut observer et comprendre en suivant chaque étape

du processus. Nous le ferons après avoir abordé

un aspect important laissé de côté jusqu’ici.

C’est celui de la double dimension consciente et inconsciente

de la communication. En effet, on peut n’être que partiellement

conscient des réalités (S ou R) et partiellement

conscient du Sens et des cohérences en jeu. C’est le cas

le plus général mais avec des degrés divers.

 

Traitons d’abord deux cas extrêmes d’inconscience.

 

Une absence totale de conscience du Sens réduit la communication,

telle que la perçoivent les interlocuteurs au seul aspect

objectif S – R. Seules les apparences sont prises en compte (à

condition encore qu’elles soient perçues). On retrouve

alors les visions objectivantes de la communication où

les interlocuteurs se perçoivent eux-mêmes comme

des objets. N’est-ce-pas le cas chaque fois que l’individu n’est

considéré que dans sont statut, son rôle,

son matricule, ses apparences extérieures. Très

matérialisée, la communication est en fait abstraite,

abstraite du Sens (en tout cas telle qu’elle est vécue

par les participants). Dans ce cas la communication idéale

est celle de deux ordinateurs auxquels, au fond, s’identifieraient

volontiers les deux personnes. Le problème, on le verra

à plusieurs reprises, est que ce qui se passe (S – R)

est malgré tout porté par K et K’ et que les interlocuteurs

n’en comprennent pas le Sens et donc ne le maîtrise pas.

Le déroulement des événements, des actions

peut être tout à fait différents de ce qu’ils

pensent sans même s’en apercevoir. Pire, ils peuvent chercher

des « raisons » à ce qu’ils voient de la situation,

ailleurs que là où ça se décide,

où ça s’explique, en eux-mêmes notamment.

La sécheresse de relation qui en découle y est

agravée par toujours plus d’abstraction pour chercher

des raisons qui échappent toujours. A la limite, on fera

appel au hasard, à des forces occultes, à la magie,

à la science, à la « nature des choses »,

pour justifier ce que cette inconscience du Sens provoque. On

a là l’exemple le plus général des problèmes

de communication dans un monde technicisé et mécanisé.

 

L’autre extrême serait l’absence de conscience des réalités,

S et R seraient niés. Les interlocuteurs vivent l’illusion

d’une communication immédiate, fusionnelle. L’irréalisme

que cela implique se traduit bien sûr par des réveils

difficiles au contact de la « dure réalité ».

Cette illusion est quelquefois une illusion affective où

le « vécu », l’émotion, la sympathie, etc…semblent

être les seules composantes véritables de la relation.

La dimension personnelle était tout à l’heure absente,

c’est au tour maintenant de la dimension situationnelle d’être

ignorée (S et R). La communication s’engage, se déroule

et aboutit à une sorte d’utopie fusionnelle, idyllique

qui s’oppose quelquefois au premier type d’inconscience de manière

d’autant plus séduisante qu’elle s’éloigne de toute

réalité. Les interlocuteurs dans cette communication

tendent à s’abstraire de la situation où ils évoluent

et d’eux-mêmes à la limite.

 

Dans le cas le plus général on aura une part de

conscience des réalités et une autre, souvent plus

faible, des Sens.

 

Examinons sur le schéma ce que cela produit :

 

CJISCH5.png

 

Les fuseaux rayés indiquent le champ de conscience. « A » est conscient d’une partie de K, des Sens donnés à

S dont il n’est qu’en partie conscient.

 

B est conscient d’une partie de S qui n’est pas la même

que celle de A. De ce fait S n’a pas la même réalité

pour A que pour B. Il y en a une partie commune, une autre spécifique

à A ou B et une autre inconsciente pour les deux, exprimée

inconsciemment par A, perçue inconsciemment par B. B donne

Sens K’ à S mais n’est que partiellement conscient de

sa cohérence.

 

Le même processus se renouvelle pour R. A n’en perçoit

consciemment qu’une partie et n’est que partiellement conscient

de son Sens.

 

Ainsi chaque interlocuteur est en partie sourd et aveugle et

ne comprend qu’une partie de ce qui se passe.

 

L’ennui est que chacun n’est pas conscient de ce qui lui est

inconscient et donc ne s’en rend pas compte. En plus, il l’est

encore moins éventuellement de ce qui est conscient ou

ne l’est pas pour l’autre. Dialogues de sourds ne sont ainsi,

souvent, que « malentendus ».

 

Plus le champ de conscience est étroit plus il risque

d’y avoir de malentendus et donc de difficultés de communication.

La dimension personnelle joue donc de façon considérable

et si elle n’autorise qu’un faible champ de conscience, celui-ci

a tendance à ne permettre que des communications limitées

et stéréotypées.

 

Cette limitation des possibilités de communication, le

dysfonctionnement qui en découle, la différence

entre les niveaux conscient et inconscient se traduisent par

différents problèmes dans la communication.

 

On en retiendra en particulier trois.

 

Dans la plupart des communications il faut noter une différence

quelquefois considérable entre ce qui ce dit et

ce qui se passe .

 

Ce qui se passe est la mise en jeu du processus global de la

communication (conscient ou inconscient), ce qui se dit, ou est

entendu représente quelquefois la seule partie consciente.

Le Sens spécifique de ce qui est échangé

par le langage peut être différent de celui du message

global, de la situation ou encore de ce qui se passe vraiment

(S ou R).

 

Ce qui est dit et entendu fait partie de la situation mais peut

très bien en trahir le Sens général en ne

présentant qu’un seul aspect. Dans certains cas ce qui

se dit s’oppose même au Sens de ce qui se passe. La situation

dément le langage (et vice versa). L’interlocuteur qui

ne prêterait attention (conscience) qu’à ce qui

se dit risque de mal interpréter ce qu’exprime vraiment

l’autre.

 

En outre chacun peut très bien ne pas se rendre compte

qu’il exprime (S ou R) bien plus que ce qu’il dit et être

ainsi surpris de l’intuition ou au contraire l’incompréhension

de l’autre qui n’a pas forcément le même champ de

conscience.

 

Un exemple de la différence entre ce qui se dit et ce

qui se passe est tout à fait caractéristique dans

les relations conflictuelles stables. Deux partenaires peuvent

se quereller souhaitant que cela cesse : ce qu’ils disent. Ce

qui se passe ne cesse de le démentir. On en trouve aussi

des cas quand, sous prétexte d’intérêt général ou pour le bien des autres, c’est l’inverse que l’on constate.

Cela s’appelle aussi mensonge, mais il peut être sincère

(non conscient).

 

Un autre aspect de ce problème peut se trouver entre les

dimensions verbales et non verbales de l’expression.

La situation-message est faite non seulement de mots mais aussi

de tout l’ensemble des attitudes corporelles, des mimiques, des

signes de toutes natures émis par celui qui s’exprime.

C’est à l’ensemble que l’interlocuteur donne Sens (K’)

et auquel Sens avait été donné initialement

(K). Chacun peut être conscient ou inconscient de ses expressions

non verbales et /ou de celles de l’autre. Pourtant elles entrent

en jeu dans le processus. Quelques fois là aussi les unes

peuvent démentir les autres, ou en tout cas n’avoir pas

forcément le même Sens.

 

Un dernier aspect de ce problème conscient /inconscient

dans la communication est celui de l’écart entre une

« parole » et un « discours ». On en

évoquera rapidement le principe. Un « discours »

correspond à ce qui peut être présenté

du message (plus ou moins ostensiblement) sans qu’il en exprime

vraiment le Sens. « Parler pour ne rien dire » en est

un exemple. Quelques fois, vouloir convaincre un interlocuteur

correspond en réalité à lui imposer quelque

chose, se défendre ou l’agresser. Ce qui est dit tend

en fait à dissimuler le véritable Sens de la communication.

C’est un « discours » qui est malgré tout l’un

des instruments de ce véritable Sens. L’interlocuteur

risque de se piéger entre le Sens de ce qui est dit et

ce qu’il ressent vraiment, entre K’ et le Sens de la partie du

message-situation que constitue le discours. Ce qui est dit dissimule

un « non dit » différent. De même d’ailleurs

ce qui est entendu peut dissimuler un « non entendu »

d’un autre Sens.

 

La « parole » correspondra au cas où ce qui est

dit est significatif justement de la situation et donc de K.

Elle exprime clairement le Sens de la relation et de la communication

et caractérise une maîtrise, meilleur gage d’efficacité

sur la situation.

 

Problèmes de fonctionnement – Ils se

combinent avec les précédents pour augmenter les

difficultés de la communication. On va suivre sur le schéma

différents stades où se placent ces difficultés.

 

Commençons par S. Tout d’abord le message situation est

fait d’éléments, circonstances, expressions, qui

n’ont pas forcément le même Sens pour l’interlocuteur.

 

Si on s’exprime dans une langue étrangère ou avec

des comportements, rituels, signes d’une autre culture, l’interlocuteur

ne pourra pas comprendre. Autrement dit le Sens (ou la cohérence

K’) qu’il peut donner au message-situation S ne peut qu’être

très différent de K. Si B ne comprend pas S comme

A l’attend, il peut très bien, ce qui est probable, lui

donner un Sens (K’) et répondre d’une manière cette

fois incompréhensible pour A. Celui-ci peut très

bien d’ailleurs donner à R le Sens d’une insatisfaction

qui fait que K peut se déplacer dans un Sens générateur

de conflit. Le problème est celui des différences

de culture, d’éducation, de langue, de jargon, de vocabulaires

ou d’habitudes d’expression simplement.

 

Le premier problème est donc de trouver des réalités

(mots, signes, etc…) qui aient le même Sens pour les

interlocuteurs, ce que l’on appelle aussi un langage commun.

C’est tout simplement aussi le rôle du langage verbal.

 

A ce premier niveau du processus, on peut rencontrer deux autres

problèmes. La faiblesse du message et sa dispersion. Si

le message est peu exprimé, non répété,

diffus, peu marqué, il risque de n’activer qu’insuffisament

la cohérence K’ pour B. Cette activation insuffisante

peut produire deux sortes d’effets. Soit elle est tellement faible

que toute autre cohérence préactivée dominera

la compréhension de B sans que S arrive à l’influencer

vraiment. B n’a pas eu son attention suffisamment attirée

ou n’a que très partiellement entendu et compris. Soit,

encore, l’activation K’ a pu se produire sans qu’elle soit suffisamment

forte pour que B l’exprime. B apparaîtra dans les deux

cas pour le moins indifférent à A.

 

L’autre problème est celui de la dispersion. La situation

S peut-être faite d’une grande diversité d’éléments

de toutes sortes de Sens. Le message est alors confus pour B,

qui peut encore donner des Sens erronés ou prendre un

Sens secondaire pour le principal. La force et la précision

du message comptent donc, comme on le sait tous, à la

communication du Sens. Encore faut-il penser que le message,

c’est toute la situation S.

 

Passons maintenant au problème qui se pose au stade suivant,

pour K’. Le processus normal est que B donne Sens K’ à

la situation-message S. On peut dire aussi que K’ est la résonance

de B (consciente ou non) à la situation S. Il y a problème

lorsque K’ est très différent de K.

 

Cela peut déjà se produire lorsque le personnage

B est lui-même préactivé fortement par d’autres

choses. S’il vient de vivre un événement important,

s’il a une idée fixe, leurs Sens peuvent toujours dominer

l’activation par S. Par exemple si quelqu’un est de bonne humeur,

cela colore sa compréhension de ce qu’il entend. Il voit

tout en rose. Cela signifie qu’il a tendance à donner

ce Sens là aux messages qu’il reçoit. Tout ce passe

comme si K était (pour S) en concurrence avec les cohérences

préactivées chez B et que K’ en était la

résultante. Ce qui veut dire encore que B comprend les

choses non pour ce qu’elles disent (K) mais en fonction de ses

propres préactivations combinées avec leurs résonances.

L’expression a beau être juste et consciente, parfaite

en un mot pour A, la communication dépend aussi de B.

A n’en est pas maître.

 

Ceci implique qu’on ne peut pas se contenter à la place

de A de bien s’exprimer, il faut encore veiller à ce qui

se passe pour B (K’).

 

Concrètement cela se traduit par la nécessité

pour A de tenir compte de B pour communiquer ce qu’il souhaite

et éventuellement s’épargner un échec. B

ne comprend pas la même chose, il n’est pas disponible,

il semble persister sur son idée. Il faut aussi souligner

le cas fréquent où, pour des raisons personnelles,

certaines cohérences sont plus ou moins activables chez

un individu dans telle ou telle situation. Il y a ainsi des difficultés

pour activer les Sens souhaités et même quelquefois

impossibilité. Nous retrouvons l’importance de la dimension

personnelle qui sera envisagée au prochain chapitre.

 

Dans la suite de la boucle, R exprime K’. On retrouve les mêmes

problèmes que pour l’expression S de K. A ce stade se

sont donc posés dans le processus :

 

– le choix et les modalités d’expression S de K.

– la cohérence K’ qui en est donnée par B.

– le choix et les modalités d’expression R de K’.

 

Se posent encore les problèmes de langages, de cultures,

etc… Même si K’ est très voisin de K bonne communication

du Sens, on peut avoir une réponse R inadaptée,

du moins pour les attentes de A. Les formes d’expression de B

ne sont peut-être pas celles qu’il attendait. Pour finir

la boucle, il y a le Sens que A donne de R. Etant préactivé

par K (si le circuit est assez rapide) cette cohérence

influe sur sa compréhension de R. On a tendance (le plus

souvent) à trouver que les réponses obtenues sont

relativement satisfaisantes même si elles sont tout à

fait fausses. Il peut arriver aussi bien que l’on trouve non

satisfaisante une réponse qui a pourtant la bonne cohérence.

Ainsi A n’est souvent pas très bon juge de la justesse

de la réponse de B. Fausse, il peut la croire juste, juste,

il peut la croire fausse. En tout cas il n’a que R comme « feed

back » et c’est par une succession de boucles que la communication

peut s’ajuster.

 

D’ailleurs, pour A, R peut déplacer l’activation initiale

K, si bien que dans la suite de la communication, le Sens évolue.

C’est la phase d’ajustement de toute relation qui va trouver

sa cohérence de fonctionnement, différente quelquefois

de celle qui l’avait engagée. D’autre fois, l’ajustement

n’aboutissant pas, la communication cesse.

 

La communication apparaît donc comme un processus très

mobile, qui pose des problèmes de Sens (activations, préactivations)

et des problèmes de réalités (langages,

formes d’expression, cultures…) Il y a beaucoup d’occasions

de dysfonctionnement et de difficultés de réussite.

De ce fait, une pratique plus efficace de la communication est

souvent nécessaire. Ces analyses le permettent.

 

C) Conduite des communications

 

Le schéma et l’analyse des difficultés précédentes

permettent d’envisager les principes de la conduite d’une situation

d’entretien entre deux personnes.

 

On peut tout d’abord expliciter en quoi consiste cette notion

de conduite avant d’envisager comment cela peut s’opérer.

Le terme de conduite se rattache aux objectifs réels de

la communication. Il est donc entièrement lié à

ce qui se passe réellement au-delà des apparences

ou de ce qui se dit.

 

Globalement l’objectif de la communication pour A était,

comme on l’a vu : communiquer une cohérence, manifestée

en retour par B. La conduite par A de la communication consiste

à piloter la relation dans les trois dimensions fonctionnelles,

situationnelles, personnelles. Ce terme de pilotage donne l’image

d’une conduite où ce n’est pas celui qui parle le plus

fort ou le mieux qui conduit obligatoirement même s’il

apparaît dominer la situation (et qu’il le croit). Le pilotage

consiste plus à réguler ce qui se passe que d’en

être le moteur principal. L’un n’empêche pas l’autre

d’ailleurs, mais ne doit pas être confondu.

 

Pour A, réguler le processus de relation avec B consiste

à ajuster K’ et R en modulant son expression S en fonction

de ce qui se passe pour lui et pour l’autre. La conduite vise

à établir la relation sur la cohérence voulue

: K peu différent de K’ pour avoir éventuellement

les bonnes manifestations.

 

Il faut noter que cela demande une grande souplesse dans l’optique

suivante. Si en effet ce que l’on vise avant tout, c’est l’établissement

de la relation sur une cohérence particulière,

il faut pouvoir accepter une réponse R qui appartienne

plus à B et que l’on ne peut pas toujours prévoir

: on lui laisse l’initiative de la forme dans l’objectif de la

relation.

 

Par contre si on cherche exclusivement une forme, il faut accepter

qu’elle puisse avoir un autre Sens K’ pour l’autre, quitte à

modifier le sien K pour s’adapter.

 

Dans l’un ou l’autre cas, celui qui conduit doit s’adapter à

l’autre (et le reconnaître ainsi comme sujet). Deux cas

différents sortent de ce schéma. Si A veut obtenir

cohérences et forme, soit il cherche à l’imposer

et il n’y a pas respect de l’autre, soit il s’agit d’une action

pédagogique auquel cas l’autre est libre de ne pas « apprendre »

et A prend le risque du refus ou d' »apprendre » lui-même.

Tous ces cas seront réexaminés avec la carte générale

des cohérences.

 

Dans tous les cas la conduite d’une communication ne peut-être

considérée comme une démarche mécanique,

objective. Ce n’est jamais que B qui donne Sens K’ à S

et y répond R. Tout ce que peut faire A, c’est agir sur

S au plus juste dans la relation. Ce « vouloir agir »

de A n’est de toute façon rien d’autre que K qui se manifeste

et s’exprime dans et par S.

 

Pour passer maintenant au comment, il faudra distinguer d’abord

la méthode, ensuite les stratégies et enfin les

moyens. Cette distinction peut-être considérée

comme relativement arbitraire, elle n’a d’intérêt

que pour aborder différents aspects de la question.

 

La méthode – Elle découle directement

du schéma de communication et s’applique aussi bien à

une conversation courante qu’à une opération de

communication très construite. Pour obtenir R la première

question est : quel Sens cela a-t-il pour B : la cohérence

K’ comme il s’agira de la « mettre en scène »

avec des formes et langages ad-hoc : S est une mise en scène

de K’. On a ainsi les meilleures chances d’activer pour B la

cohérence K’ et obtenir la réponse R. (attitude,

comportement, expression…).

 

Dans ce cas le principe méthodologique est ceci :

 

– Recherche de la cohérence K’ de R.

– Mise en scène de cette cohérence : S.

– Vérifier R.

– Ajuster S.

 

Lorsque c’est uniquement une cohérence K qui cherche à

être communiquée le principe consiste de même

à :

 

– Elucider la cohérence K pour soi.

– Mettre en scène cette cohérence : S.

– Vérifier par R les effets pour B.

– Régulation de S.

 

Dans les deux cas les points clé de la méthode

sont :

 

– L’effet de régulation surtout.

– La mise en scène S d’une cohérence.

– La connaissance préalable de cette cohérence.

 

Les deux derniers points seront indissociables. Ils peuvent être

améliorés par l’effet itératif du premier.

Cela permet de choisir une stratégie pour la conduite

des communications.

 

Stratégies – Avant de revenir sur les

moyens, il est utile d’envisager les deux stratégies connues

par ailleurs sous les termes de directivité et non directivité.

Leur habituelle ambiguïté mérite d’être

clarifiée ici. Tout d’abord il faut éliminer ce

qui est directivité ou non directivité d’apparence

sans conduite véritable. A peut bien s’exprimer « autoritairement »

dans S sans qu’il conduise en rien la situation même si

elle lui semble « réussie ». De même une

apparente non directivité peut très bien s’associer

à l’absence de conduite véritable. Dans les deux

cas la caractéristique est la conscience très partielle

de celui qui prétend être ou non directif.

 

Venons en à la conduite qui implique une certaine maîtrise

et conscience de ce qui se produit. La stratégie directive

sera celle qui consistera à établir à priori

les éléments de la situation. Elle se fonde sur

une élucidation préalable de la cohérence

en jeu, c’est-à-dire aussi ses objectifs. Cette cohérence

est ensuite « mise en scène » délibérément

dans S pour obtenir les résultats que l’on attend. Cette

stratégie de communication directive est sans doute moins

appropriée à une relation spontanée qu’à

une opération prévisible. La stratégie non

directive se fonde plutôt sur le caractère intéractif

de la communication. C’est à partir de R que, selon le

Sens qu’on lui donne, s’exprime S pour amener des ajustements.

 

Dans la stratégie directive S est construit pour activer

d’emblée K’ et obtenir la bonne réponse R. Dans

la stratégie non directive S est adapté aux ajustements

nécessaires pour R qui tend à s’améliorer.

Dans ce second cas B peut « apparaître » comme

dirigeant.

 

Pour reprendre l’analogie avec le pilotage.

 

– Dans la stratégie directive A est moteur et pilote.

– Dans la stratégie non directive A est pilote, B est

moteur.

 

C’est toujours le pilote qui conduit, qui donne le Sens à

la situation de communication.

 

Dans la pratique les situations réelles peuvent être

mixtes. Il n’est guère possible d’établir une communication

satisfaisante avec une stratégie strictement directive

ou non directive. Même si l’une domine, selon les circonstances,

il faudra pouvoir utiliser l’autre. C’est le cas particulièrement

pour le début de toute communication entre deux personnes

où se déroule une phase d’ajustement. Cet ajustement,

pour celui qui conduit, consiste notamment aussi à utiliser

l’une ou l’autre stratégie jusqu’à pouvoir privilégier

celle qu’il retient.

 

Les moyens – On aborde là l’essentiel

de la pratique des communications. En reprenant les principes

méthodologiques les deux problèmes pratiques sont

celui de la connaissance des cohérences, et celui de la

« mise en scène » S. Pour ce qui nous préoccupe

ici, c’est-à-dire la communication entre deux personnes,

ils se ramènent aux problèmes de l’écoute

et à celui de l’activation. Pour des problèmes

de communication plus larges, il s’agirait des techniques de

recherche de cohérence et celles de « mise en scène »

et « d’animation stratégique ».

 

La question de l’écoute se définit

toujours comme écoute du Sens. Si on se place toujours

en A, il s’agit d’écouter B. B s’exprime par R mais c’est

uniquement ce que cela réactive pour A qui en est pour

lui le Sens. En fait l’écoute de l’autre se ramène

pour A à l’écoute de lui-même dans ce qui

est réactivé en lui par R. C’est le premier principe

de l’écoute. pas toujours bien compris. Il ne s’agit pas

de porter attention uniquement à tel ou tel aspect de

l’expression de l’autre. En effet, on pouvait recenser tellement

d’éléments de R qu’il ne serait pas possible de

tout suivre. Par contre, c’est ce qui fait aller ces éléments

ensemble pour A, c’est-à-dire la cohérence que

ça active pour lui qu’il s’agit d' »écouter ».

Ecouter veut dire aussi ressentir. De ce fait, d’une écoute

globale comme écoute des Sens, on peut revenir aux réalités

R. Elles sont aussi bien ce qu’exprime B, que les conditions

et circonstances de cette expressions.

 

Un silence peut être « entendu » dans une communication

ne serait-ce que par les circonstances où il se place.

C’est par exemple de ce qui ne peut être traduit faute

de réalité en soi mais porteur de Sens par le contexte.

 

Cette écoute qui demande disponibilité est le moyen

de prendre conscience du Sens de ce que répond B. Elle

peut aller avec le recul nécessaire à la construction

d’une expression S mais aussi s’en passer. La disponibilité

a ses propres réactions se manifestera aussi avec une

justesse suffisante si on se laisse réagir. L’écoute

n’implique pas forcément prise de conscience et encore

moins examen intellectuel. Ce qui fait d’ailleurs la relative

inefficacité de certains modèles de la communication

où d’autres définitions de l’écoute, c’est

qu’elles ne permettent pas ce réflexe sans passer par

une distanciation difficilement pratiquable en situation réelle.

 

La question de l’activationmaintenant vise ce qui se passe de S à K’. Il s’agit d’élaborer

un message-situation S qui permette une activation suffisamment

forte et suffisamment juste. La situation étendue a un

très grand nombre d’éléments, comme on l’a

vu, vise cependant à ne pas communiquer n’importe quels

Sens. Si l’on n’y prend garde il peut y avoir dispersion de Sens

et malgré l’écoute éventuelle de B, il peut

n’entendre que des choses confuses. Il est possible aussi que

certains éléments, ce qui est dit par exemple,

se situent dans un contexte où bien d’autres Sens s’expriment

ou sont compréhensibles. Chaque élément,

mot, phrase, lieu, objet, est porteur de toute une pluralité

de Sens. Pour que le message soit « cohérent »,

il faut que ces Sens convergent et constituent une cohérence.

 

Un ensemble d’éléments prend un Sens compréhensible

par les Sens qui convergent. C’est le Sens commun à plusieurs

éléments qui par sa répétition domine

et peut être activé de manière privilégiée.

Ainsi, pour ajuster au mieux un message il faut « surdéterminer »

son Sens. Surdéterminer consiste à cette répétition

d’éléments isomorphes (de Sens communs). C’est

tout l’intérêt de l’illustration d’un message sous

plusieurs formes. C’est aussi celui de sa répétition

sous une forme différente mais homologue (de même

cohérence). Cette répétition surdétermine

cette cohérence commune au détriment d’autres Sens

particuliers qu’aurait chacune des formes particulières.

 

Sachant que tous les éléments de la situation S

participent au message, ils sont tous utilisables pour les surdéterminations

ou, si l’on n’y prend garde, pour des parasitages. Ainsi la manière

de dire surdétermine (ou parasite) ce qui est dit. Le

moment, le lieu, les circonstances, les modalités d’expression,

etc… tout y contribue.

 

L’intérêt de soigner et d’imager une communication

se trouve là et uniquement là

. A moins que ce soit une manière de communiquer un Sens

particulier qui mette en vedette celui qui parle plus que ce

qu’il dit.

 

Constituer des ensembles d’éléments isomorphes

et de messages homologues est le moyen de toute communication

juste surtout dans une stratégie directive. Il se trouve

aussi que cela favorise la prise de conscience du Sens qui va

bien au-delà de la simple compréhension. Cela fait

de cette surdétermination l’un des moyens techniques de

la pédagogie et de ce qui vise un changement pour l’individu.

Pour celui qui écoute, cette surdétermination éclaire

ce qu’il ressent par les convergences qui dominent peu à

peu.

 

La surdétermination dans la situation S (ou R) présente

en plus un double intérêt. Elle permet de « lire » ou « entendre » le Sens d’une situation-message en s’attachant

enparticulier à un de ses aspects. Par exemple, les circonstances

dans lesquelles s’instaure une relationpeuvent très souvent

porter le Sens de la communication qui va s’établiret que l’on peut aussipré-sentir ou pré-voir. D’une

manière générale dansunecommunication

établie, chacune des dimensions fonctionnelles, situationnelles,

personnelles, porte la même cohérence. Les circonstances

donnent le Sens de la dynamique de communication et des dimensions

personnelles en jeu. De même le jeu interpersonnel donne

le Sens de la situation en jeu et le déroulement des événements

dans la communication.

 

Tout cela va nous être utile au prochain chapitre, pour

utiliser la carte générale des cohérences

avec les dimensions personnelles.

 

Le dernier intérêt de la surdétermination

est celui du renforcement de l’activation par l’effet de répétition.

 

Le renforcement de l’activation vise à ce que celle-ci

prenne le pas sur d’autres préactivations et aussi qu’elle

soit suffisante pour provoquer une réponse R satisfaisante.

Le renforcement peut être opéré, soit par

la répétition, soit par l’intensité. Parler

fort permet de mieux se faire entendre. Ceci est une évidence

pour cette raison notamment. En fait, il s’agit toujours d’activation

et de renforcement de Sens. Plus l’activation est forte, plus

il y aura de réaction (R) en formes et intensité.

C’est vrai aussi pour A, s’il est activé (ou réactivé

par R) son expression S en sera plus riche. Ce degré d’activation

est aussi ce que l’on peut appeler le degré d’implication.

Plus on est activé, plus on est impliqué et plus

ce que l’on exprime renforce l’activation de l’autre (effet de

contagion ou d’entraînement dirait-on banalement). Les

degrés d’implication peuvent se repérer notamment

dans les modalités d’expression des Sens, intellectuels,

affectifs, physiques qui vont souvent en croissant.

C’est pour cela que les aspects non verbaux comme les mimiques

peuvent avoir un poids considérable dans une communication

ainsi que les aspects affectifs. Ils dominent par leur effet

de renforcement l’aspect strictement logico-intellectuel de ce

qui est dit. Le Sens de que l’on dit est en effet bien souvent

dominé par celui des sympathies ou antipathies, des humeurs

ou affectations, et par les effets de la présence et du

contact physique.

 

Si tout cela est bien homologue, il n’y a pas de problèmes

mais cela implique une grande clarté personnelle et une

grande conscience de Sens en jeu. Dans le cas contraire, le plus

fréquent, on peut être surpris des effets de ce

que l’on exprime. Le processus itératif permet heureusement

un ajustement progressif. Cela se traduit tout de même

bien souvent, comme beaucoup de mal-entendus ou mal-exprimés,

par des conSensus conflictuels ou des ruptures de communication.

 

Les jeux d’identité et la carte générale

des cohérences peuvent aider à y voir clair pour

le Sens de ce qui se passe dans une relation. C’est en cela qu’ils

constituent un outil pour la communication.

 

Voir pour la suite la série d’articles « les jeux d’identité »

 

Les jeux d’identités 1

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