En finir avec la prospective au lampadaire

La prospective en temps de mutation est particulièrement sollicitée. Malheureusement les modèles mentaux et les façons de penser dominantes, dénuées d’imagination, sont incompatibles avec une prospective efficace. La méthode des cercles de prospective opérationelle est l’alternative de l’Humanisme Méthodologique.

PROSPECTIVE POUR UN TEMPS DE MUTATION

La prospective opérationelle

Prospective territoriale, prospective économique, urbaine, sociale, comment s’en passer lorsque l’on fait des projets à moyen et long terme dans un contexte de changement et d’opportunités aussi ouvert qu’une mutation.

Reproduire et extrapoler le présent ou le passé du 20° siècle c’est la formule de l’échec assuré.

Y-a-t-il cependant beaucoup de visionnaires qui savent se projeter au-delà des horizons connus? Ils ne sont pas légion mais c’est la fonction même d’une prospective opérationnelle que d’assurer une projection dans le futur appropriée. Or si l’évocation du terme de prospective se fait à nouveau plus fréquente, les pratiques sont dans l’ensemble dérisoires.

Cette courte analyse en examine les causes qui déterminent les conditions de réussite d’une véritable prospective. Sera évoquée l’alternative de la Prospective Opérationnelle et la méthode des Cercles de Prospective Opérationnelle conçue sur la base des apports de l’Humanisme Méthodologique.

1) LA PROSPECTIVE AU LAMPADAIRE

Un ivrogne tournait autour d’un lampadaire depuis un long moment. Un passant intrigué lui demande : “que faites vous là”. L’ivrogne répond : “je cherche mes clés”. “C’est là que vous les avez perdu ?” demande le passant. “Non mais c’est là qu’il y a de la lumière” répond le chercheur de clés.

Voilà la prospective dans son état d’égarement actuel. Forgée après la seconde guerre mondiale, le Sens c’était la reconstruction, avec le modèle du développement industriel, les conseillers américains… Les élites de ce pays avaient besoin de projeter et planifier leur action d’accompagnement et de soutien d’une trajectoire bien établie. Il y avait un lampadaire et c’est là qu’étaient les clés de l’avenir.

Aujourd’hui le Sens de l’avenir et de la mutation sont autrement plus obscurs, c’est dans l’inconnu qu’il faut chercher les clés.

Comment faire de la prospective dans une culture du conformisme, de la reproduction des modèles, des références, où la peur du risque est érigée en vertu, et la reproduction des normes en compétence suprème. La demande d’être assuré, rassuré est telle qu’une offre “conforme aux idées reçues” aux poncifs et formules à la mode, aux pseudo évidences sans examen critique se déploie largement en la matière.

Les lumières des lampadaires habituels sont des leurres et le leurre est préféré à la peur de l’inconnu, à l’opportunité de clartés nouvelles et d’horizons ambitieux et prometteurs. Premier obstacle. Évidemment les moyens et méthodes y sont choisis en cohérence avec cette addiction pour la reproduction des modèles et des formes communes. La “réflexion du connu” à la place de la pensée du nouveau.

2) LES HORIZONS DU FUTUR

Dans quel catalogue sont-ils inscrits?

Ou bien on scrute le présent avec les lunettes du passé et on voit des changements que l’on interprète avec les références anciennes (19° et 20° siècle), ou bien on discerne le Sens de la mutation au milieu des crises, régressions, crispations qui l’accompagnent. Ces derniers troubles font grand bruit cherchant dans des slogans à conjurer le sort, celui d’avoir à avancer, grandir, changer…

Avalanche d’interprétations en tous Sens, prophéties auto exhauçantes, déficit effroyable d’imagination, enfermement dans des procédures normatives de toute “invention du futur”.

Or s’il existe aussi de nombreux éclairages plus significatifs, l’interprétation générale du phénomène du moment est plus rare. L’éclairage de l’Humanisme Méthodologique permet d’intégrer ces multiples éléments et d’en discerner le Sens et aussi d’imaginer ce qui se prépare, qui est souvent déjà là et se livre à qui sait le lire parce qu’il en connaît le Sens.

Cette vision du futur et de ses grandes clés, dégagée des eaux troubles qui l’accompagnent, est indispensable pour se donner les horizons indispensables pour “projeter” quoi que ce soit dans le futur.

3) L’INJONCTION D’ADAPTATION, DÉPERSONNALISATION GÉNÉRALE

Le futur arrive, adaptez-vous! Telle est l’injonction reçue depuis des décennies.

Plus les choses sont tendues, plus il faut coller aux images du futur qui nous sont livrées (selon la méthode réflexive de prospective au rétroviseur). Ce faisant, c’est une concurrence effrénée qui est engagée ainsi qu’une dépersonnalisation traduite en banalisation des modèles, des enjeux, des solutions. “C’est le marché qui veut ça” disent les ventriloques. La demande n’existe pas concernant les innovations qui n’existent pas encore. C’est l’offre qui forme la demande, le marché et non l’inverse comme Ford l’avait bien vu en offrant un seul modèle de voiture, la Ford noire, pour répondre “à la demande”. Il ne s’est pas trompé sur les attentes implicites.

La prospective demande à chacun un effort de rétrospective pour s’inscrire dans l’histoire mais aussi d’introspective pour se positionner sous ses valeurs et potentiels originaux. Qui n’a pas d’identité, n’a pas de projet. Mais l’identité et aussi une projection dans le futur des originalités et ressources propres réévaluées. Seulement seuls les hommes ont une histoire et ce sont les communautés humaines qu’il faut inviter à cette prospective reposant sur une introspective et une rétrospective significative.

4) UN PROJET APPROPRIÉ ?

La prospective sert à élaborer un projet. Un projet inapproprié restera lettre morte, souvent bien classé après avoir été bien présenté. Les projets sont souvent réduits à la gestion des budgets au travers d’opérations qui font la joie de ceux qui peuvent exercer leurs technicités familières et conservatrices. Ces projets ne sont pas appropriés par les populations et acteurs que cela concernerait au premier chef mais par des gestionnaires qui ont bien sur horreur de l’inconnu, de l’incertain, de l’innovation véritable, du mouvement.

Or l’appropriation est indispensable pour mettre en mouvement et pour assurer les mutations et saisir les opportunités du futur. Il faut alors concevoir l’élaboration d’un projet comme véritable exercice de prospective, comme un processus collectif de “réalisation du futur”, d’abord en conscience et en imagination et ensuite en maîtrise et en action cohérente.

Ce travail d’appropriation demande évidemment des préparations, des anticipations, des méthodes appropriées. C’est l’un des volets de la prospective opérationnelle.

II – LES CERCLES DE PROSPECTIVE OPÉRATIONNELLE

Le principe dynamique, l’image est celle de cercles concentriques ou d’un essaimage progressif à partir d’un cercle initial, pilote et donc directif. Il anticipe par ses analyses, sa créativité, la conception des processus d’appropriation. Il intègre les ressources et les apports originaux de différents cercles pour établir une synthèse cohérente. Cet ordre là est indispensable:

– anticipation du premier cercle

– processus d’appropriation (multiplication progressive des cercles)

– intégration des retombées du processus, synthèse du projet

– conduite du projet

La prospective opérationnelle s’appuie sur une méthode en trois temps ajustée à chaque situation.

Premier temps.

Élucidation des valeurs propres de la communauté (territoriale, économique, sociale, etc.) au travers d’études de cohérences culturelles avec une méthode spécifique de l’humanisme Méthodologique.

Elles mettent en évidence les potentiels originaux qui permettront de qualifier et d’affermir un positionnement, une ambition pour l’avenir, une vocation. C’est l’axe de cohérence d’une volonté, celle d’un « nous” et d’un “je” collectif.

Deuxième temps.

Visions du futur, évaluation prospective et positionnement. Exercices de discernement des clés de la mutation (Sens et seuil de passage), évaluation des potentiels et valeurs propres dans les nouveaux champs d’opportunités. Positionnement en cohérence avec les potentiels originaux et les opportunités du futur. Imagination et formulation de visions du futur propres (appropriées).

C’est un exercice de créativité générative débouchant sur une ébauche de projet.

Troisième temps.

Elaboration appropriée du projet. Cette élaboration doit s’appuyer au préalable sur une appropriation forte par un noyau dur disposant d’une autorité politique (symbolique). Celle-ci doit aussi se doter d’une méthode basée sur la conception d’un processus cohérent avec la culture propre et avec les horizons poursuivis.

C’est sur cette base que le principe d’essaimage en cercles de prospective opérationnelle est à construire. Ces cercles seront soit des cercles élargis pour les moments d’appropriation générale et synthétique, soit des cercles spécialisés pour travailler spécifiquement sur des axes stratégiques ou des volets particulièrement significatifs. On notera que souvent les cercles d’élaboration se transforment en cercles d’initiatives, signe de réussite du processus.

On trouvera sur le site de l’Humanisme Méthodologique des informations plus développées sur la prospective opérationnelle, la mutation et différentes applications (territoires, entreprises, etc.).

La prospective opérationnelle

La mutation

Prospective territoriale

Retour