Le temps des communautés virtuelles

Les communautés virtuelles et néanmoins réelles se caractérisent par une conception de la communauté entièrement née des personnes et du Sens mis en commun. Elles ne sont justifiées que par l’engagement de virtualités humaines.

L’âge du Sens, âge de l’homme-VIR, advient par un dépassement de l’âge des représentations où l’identité, et singulièrement l’identité individuelle, prévalaient.

Le collectif était associé à la société, elle-même identifiée à tout un système de représentations: règles, droit, image, identité collective dans un rapport dialectique, identité individuelle – identité collective.

Cet âge des représentations s’est targué à juste titre d’avoir dépassé le stade des groupes de cohabitation purement économique et des « tribus » ou communautés archaïques. Cependant pour certains le terme de communauté reste entièrement attaché à l’archaïque alors qu’il n’évoque que l’en-commun. On devrait donc, à chaque âge, qualifier les types de communauté, l’en-commun par lequel elles se définissent.

Or sous le régine de l’homme « homo » (d’humus) les communautés sont toutes plutôt des communautés d’appartenances :

Communautés archaïques – d’affects ou de sang
Communautés économiques – de faits, territoires et cohabitations
Communautés identitaires – de droit, de loi et de titre.

Or nous passons à un temps de communautés virtuelles où ce n’est pas l’accessoire existentiel qui prime mais l’essentiel de l’humain qui détermine la réalité commune, c’est-à-dire le Sens (ou esprit).

Dès lors les communautés virtuelles sont d’abord des communautés d’humanité, c’est-à-dire de Sens, que l’intention quelque peu maîtrisée, libre et responsable, traduit.

Dès lors une communauté, si elle engage les différents modes existentiels de l’homme ne se définit pas par eux mais par le principe d’humanité lui-même, le lien est Sens. La communauté virtuelle est donc réalisatrice et révélatrice du Sens partagé (Consensus) et en cela elle réalise et révèle l’homme et ses virtualités, c’est une communauté de l’âge d’homme, c’est-à-dire mondaine (cf. la racine VIR et celle de World ou Welt : âge d’homme).

Si la communauté virtuelle est communauté de Sens alors elle ne se définit pas par son état, son vécu, son identité mais par son devenir, sa vocation, son engagement.

Dans une communauté virtuelle le lien de Sens devient un lien de concourance et la trialectique sujet-objet-projet en donne la structure.

Dans une communauté virtuelle dont la convergence des intentions est fondatrice, il est possible que tous ne soient pas au même stade de maturité et que beaucoup n’aperçoivent pas la nature proprement humaine (de nature humaine) de la communauté, la réduisant à l’une ou l’autre des figures d’appartenance: affective, matérielle ou identitaire.

Il faut alors considérer que la marche en avant qui seule justifie la communauté s’appuie sur une hiérarchie des niveaux de maturité. Il faut que ce soit bien l’intentionalité humaine qui en régisse la conduite et si possible une intentionalité quelque peu maîtrisée, celle qui discerne le Sens, a l’autorité de le déterminer et en conduit le développement.

Les communautés virtuelles étant fondées sur l’essentiel, le Sens, se trouvent beaucoup plus libres eu égard aux contingences d’espace, de temps, etc. qui ne sont plus des conditionnements absolus mais des conditions à prendre en compte. Cela débouche évidemment sur une autre topographie des communautés que celles instaurées par le mythe des origines, le territoire ou la loi, tant respectables qu’elles soient dans leur âge propre.

Le lien étant de Sens, c’est un « centre symbolique » qui caractérise une communauté virtuelle et pas ses frontières. Les notions de proximité et de distance sont plus relationnelles que matérielles ou identitaires mais comme il s’agit d’une proximité de Sens (consensus) elle s’exprime dans le concours différencié à un même devenir.

Le temps des communautés virtuelles est celui des hommes majeurs, hommes de bonne volonté s’ils ont une intention bonne, celle de concourir à l’accomplissement de chacun dans le concours à l’accomplissement de la vocation commune.

Dès lors la liberté et l’autonomie se situent au niveau du Sens, les dépendances et contingences au niveau des réalités partagées. Le développement de la conscience individuelle, lorsqu’elle n’a pas sombré
dans l’individualisme, nous y a bien préparé.

Alors l’Internet se révèle un extraordinaire support d’engagement de communautés virtuelles, communautés d’engagement mutuel, communautés de travail et de développement, communautés choisies. C’est bien autre chose que cette société de l’information ou de la communication qu’on nous annonce et qui n’est que figure du passé. Internet est un vecteur de relations volontaires, d’initiatives rassemblantes, d’engagements mutuels orientés, donc un catalyseur des communautés virtuelles du futur et de reconnaissance de la virtualité des communautés actuelles.