La pensée et l’action territoriales : petit billet d’humeur !!
Mes nombreux déplacements, rencontres avec des responsables de tous niveaux (du local au national) m’amènent ce matin à vous faire partager ce petit billet d’humeur concenant l’inquiétant phénomène de l’impensabilité des choses humaines.
En matière territoriale, quels sont les liens entre la pensée et l’action, entre l’action et la pensée ?
Question simple en apparence qui révèle cependant de nombreuses surprises lorsque l’on s’y attarde un peu.
Il n’est pas peu fréquent, lorsque l’on est élu, responsable territorial ou consultant de constater l’écart qui existe entre les procédures et autres machineries technocratiques, ce qu’elles sont censées produire et ce qu’il en est de la réalité des faits. D’un côté semble se trouver une pensée (mécaniste cependant, à tendance « reproductiviste ») éprise de modèles et autres systèmes intégrateurs et de l’autre une réalité qui « peine » à rentrer dans le modèle (peut être par ce que trop humaine !).
Les représentants de cette réalité sont d’ailleurs souvent dénoncés par les technocrates comme les empêcheurs de modéliser en rond (et de permettre aux modèles de tourner en rond).
Car au fond il semble bien qu’il s’agisse de cela. Non pas de progresser, de grandir, de cheminer constructivement, mais bien de tourner en rond.
Les écoles et les formations sont tellement nombreuses en la matière qu’alors que cette façon de « penser » les réalités humaines démontre tous les jours son inefficacité et son inappropriation, sont (dé)formés des promotions de futurs responsables promus experts en modèles qui tournent en rond.
Et personne de s’interroger sur cela. D’en prendre la mesure. D’envisager des alternatives.
Et personne non plus pour relever non seulement l’indécence humaine de la position mais également de questionner les fondements (implicites) de ces positions (où les modèles ont plus de valeur que la réalité)
Combien de fermetures d’usines et de tentatives de « réindustrialisation » (modèle industriel) au-lieu de tentatives de re-développement. Combien de procédures inefficaces dans les politiques de la ville « complétées par de nouvelles » reposant sur les mêmes carences anthropologiques (quel modèles sous-jacent) ? Combien de schémas directeurs (qui n’ont pas dirigé grand chose!) (modèle planificateur) ? …
Mais d’où sortent tous ces modèles ? Sur quoi reposent-ils ?
Dans le même temps, d’autres phénomènes se manifestent.
La croyance de la vérité du terrain ! (et pas seulement du terrain de foot)
Celle consistant à aller voir sur le terrain et partant de ce que l’on y voit d’en tirer toutes sortes d’enseignements et autres conclusions définitives.
Il n’est pas rare de rencontrer des programmes de recherche consistant à aller voir sur le terrain ce que l’on peut y trouver pour constituer « un corpus » solide et partant de là en déduire tout ce qu’il y a à en déduire … Il n’est pas peu fréquent de constater la profusion de diagnostics de choses desquels déduire les orientations et projets pour le futur, avec toute la pertinence que l’on sait.
Tout se passe comme si la position de celui qui regarde, observe ou étudie « le terrain » était neutre, détachée de toute subjectivité (et donc objectivante) et par là-même de toutes croyance ou de tout fondement (même inconscient : si si ça arrive dès fois).
Et puis il y a aussi ceux qui font. Pour qui ce qui compte c’est de faire. Un pragmatisme bien pensant qui milite pour l’action, l’action, l’action ! Si la complexité de nombre de situations peut tout à fait être maîtrisée comme cela (à condition tout de même d’agir dans le bon sens ! (mais comment le savoir ?)), les choses sont moins évidentes quand la complexité croît. Du coup le pragmatisme tend souvent à faire l’économie de la complexité.
Bon tout cela est bien complexe. Faut-il penser avant d’agir ? Agir avant de penser ? Penser d’un côté et agir de l’autre ? Faire les deux en même temps ? Tout cela est bien compliqué me direz-vous.
Et si le sens de l’action et le sens de la pensée étaient justement ce qui réunissait les deux. Alors la pensée pourrait éclairer l’action et l’action la pensée par la médiation du sens.
Je n’en dis pas plus par crainte de devenir trop conceptuel !!
Alors pour celles et ceux pour qui l’appréhension de la complexité n’est pas une aversion, mais une invitation à progresser, pour celles et ceux pour qui exercer des responsabilités consiste non pas à tout savoir, mais à s’efforcer de trouver les voies et moyens d’être mieux en maîtrise de la complexité des affaires humaines dont il est question, les éclairages conceptuels et méthodologiques de l’Humanisme méthodologique se révèlent d’une grande valeur.
Prospectivistes, développeurs, communicants, animateurs, responsables de tous niveaux et en tous domaines (tourisme, économie, urbanisme, politiques sociales, …) le chantier est devant nous !
Bonnes lectures sur la rubrique.