Le recentrage sur les communautés humaines
Les hommes vivent en communautés, même lorsqu’ils se veulent ermites. Vivre en communautés c’est participer à leur monde et y trouver une place comme individu, comme co-existant.
Dans la période de crise s’affrontent différents paradigmes ou façons de voir d’agir et de chercher son bien.
Les rationalistes des « lumières » font de la Raison l’origine et la fin des choses et, en définitive, des affaires humaines et de l’existence individuelle et collective. La collectivité est alors une collection d’individus régie par des règles rationnelles qui constituent aussi un idéal celui de la cité par exemple. Rationaliser l’existence humaine après avoir éclairé les raisons des choses est le projet de civilisation dont nous voyons les limites. Les communautés sont des organisations rationnelles ou en voie de rationalisation.
Traditionnellement le conflit entre des puissances est aussi le principe explicatif des réalités matérielles comme des comportements humains. Forts ou faibles les hommes s’allient pour gagner en puissance ou se défendre et pour cela constituent des groupes d’appartenance souvent sous l’emprise d’un individu plus puissant ou d’une puissance mythique que l’on peut invoquer ou combattre. Ici la raison est une arme, un moyen, mais pas une cause abstraite. Les communautés sont vues comme des clans en guerre les unes contre les autres et que le « communautarisme » vient identifier.
Depuis toujours mais singulièrement depuis une nouvelle modernité, le monde comme les hommes sont compris comme des phénomènes, effets et produits des lois de la Nature. Lois scientifiques en tout cas, lois fondatrices de tout ce qui existe et notamment des phénomènes humains. Les communautés humaines sont vues comme des systèmes sociaux ou sous systèmes, on dit même éco-systèmes. Là dès lors que des hommes veulent « faire la loi » dans la gestion du monde et des hommes alors le procès de contre nature est avancé avec les sentences qui s’en déduisent. Ces « lois de la Nature », englobantes, sont quelque fois assimilées à une divinité comme la déesse Gaïa ou « la Nature » elle même.
Or tous ces paradigmes sont des « points de vue humains ». Même leur anti humanisme radical est issu d’une posture humaine. Aucun de leurs tenants ne peut nier être humain et se tenir dans la position d’où il juge.
Mais, à contrario, les hommes seraient-ils des dieux capables de créer le monde? Le paradigme communautaire ferait volontiers des hommes des co-créateurs du monde et des réalités humaines. Mais toutes réalités y compris humaines relève d’un phénomène communautaire. Les hommes, de nature spirituelle, partagent leur être avec d’autres pour former des communautés d’êtres humains qui s’incarnent dans les choses et les individus et forment leur monde propre.
Tout dans l’existence est affaire communautaire et les communautés des rassemblements d’être spirituels pour former une certaine co-existence.
Il devient primordial de s’attacher à identifier les communautés humaines auxquelles nous participons, ensuite comprendre les enjeux de ces participations à différentes communautés qui forment notre existence, enfin comprendre comment les relations entre les hommes forment les communautés humaines et les relations entre ces mêmes communautés :
- On pensera à une communauté universelle des humains actuelle ou de tous temps.
- On pensera à ces communautés primordiales que constituent familles et communautés de vie en commun.
- On pensera à toutes ces communautés territoriales où s’identifient des « habitants » ou des « citoyens ».
- On pensera à toutes ces communautés d’activités, de rencontres, de jeux , de projets.
- On pensera à toutes ces communautés d’esprit et leurs récits de type religieux.
- On pensera à cette architecture complexe qui va des micro-communautés à la communauté des humains en passant par des communautés de communautés.
Ce tableau est celui des situations où vivent ensemble les hommes, où le pire et le meilleur des relations humaines trouve ses problèmes, ses enjeux et ses solutions. Toutes les affaires humaines, individuelles et collectives, tous les rapports aux choses et aux mondes sont des affaires communautaires.
Les objections viendront des autres paradigmes dont les vues leur paraissent des évidences. Se rendre aux évidences est leur nécessité. Le discernement et la liberté d’accomplissement humain sur le théâtre du monde, des mondes communs, est l’enjeu du paradigme communautaire.
La connaissance des phénomènes communautaires et de leurs singularités sont indispensables. Agir dans et sur les communautés d’existence est le moyen de favoriser le grandir et l’accomplissement des hommes donc de traiter toutes les affaires humaines (y en a-t-il d’autres?). La recherche, le discernement et le développement partagé du Sens du bien commun la voie de l’accomplissement des hommes dans et par leurs communautés de partage de leur humanité.
L’Humanisme Méthodologique et ses fondements éclairent les enjeux, les voies et les moyens d’un « empowerment » humain où il s’agit moins de puissance que de maîtrise et aussi de développement personnel et communautaire de concert et donc de fraternité.