Le concept de cohérence

Le concept de cohérence est lui aussi polysémique. Il a cependant un rapport singulier au Sens en tant qu’il indique l’unité de Sens d’un ensemble. La théorie du Sens et des cohérences humaines y attache une importance particulière sur le plan conceptuel et pratique.

La notion de cohérence fait partie du sens commun selon lequel peut être jugé un système. Elle s’associe souvent au jugement d’incohérence qui sanctionne ce qui parait inadéquat par certain coté.

Il est cependant très vite clair à la réflexion que le jugement de cohérence repose le plus souvent sur un sentiment difficilement objectivable et relève plus de l’empirisme que d’une démarche maîtrisée.

Etablir le concept de cohérence réclame que l’on aille au delà du sens commun et une voie consiste justement à l’explorer.

En introduction au problème que pose le concept de cohérence, notamment dans les systèmes complexes, je vous proposerai une analyse épistémologique d’une série de huit définitions contrastées dont on peut repérer l’usage.

On en viendra à établir par la suite une première définition restreinte où on pourra dissocier la structure de toute réalité, donc de tout système, et le principe de cohérence.

Enfin on en arrivera à une définition généralisée du concept de cohérence établi par la théorie des Cohérences Humaines pour conclure par un aperçu des conséquences pratiques de cette approche.

Voici donc en introduction une analyse de ce que l’on entend par cohérence :

CCSCH1.png

Il y a pour chacune de ces définitions une position épistémologique particulière où sont associés la définition implicite de la notion de cohérence et le processus de connaissance et de jugement spécifiques.

Il y a même, peut-on dire, une cohérence entre définition implicite et processus de connaissance.

De toutes ces positions épistémologiques la Théorie des Cohérences Humaines retient celle où la compréhension du sens et donc du caractère significatif des choses est critère de cohérence.

Nous en arrivons là à une première définition restreinte du concept qui nous occupe.

Un système est cohérent autant qu’on lui trouve un SENS . On peut alors remarquer que l’évolution ou la complexification du système lui conserve sa cohérence autant qu’il garde son Sens.

La Théorie des Cohérences va plus loin en montrant que le Sens est au principe même de la réalité manifeste du système. La complexité d’un système est le déploiement de son Sens.

La théorie montre, par ailleurs, que ce que nous apercevons comme étant une réalité, un système n’est que la façon dont nous « réalisons » les choses à partir du Sens de notre considération particulière.

Le sens prend forme dans les modes selon lesquels nous apparaît la réalité. Celle-ci nous est appréhendable qu’autant qu’elle a un sens.

Le concept de cohérence est ainsi au coeur de la reconnaissance d’une réalité comme telle.

Cependant le plus souvent ce sens ne nous est pas conscient et en plus il peut être multiple.

Chacun a pu faire cependant l’expérience suivante : face à une situation ou une réalité complexe, l’analyse nous donne un sentiment de complication inexplicable et lorsque brusquement le sens s’éclaire alors la réalité nous apparaît simple, en même temps que toute sa complexité se trouve justifiée.

Il faut alors noter que la cohérence du système est ce qui articule son sens, simple, invisible et sa complexité manifeste.

On pourrait aussi chercher à analyser cette complexité en dégageant une structure, statique ou dynamique. Bien qu’un repérage puisse être utile pour décrire le système, il n’apporte rien à l’appréhension de son sens donc de sa cohérence.

Sur ce point la théorie des Cohérences montre comment, à partir du sens, se structure la complexité. Elle distingue le sens ou principe de cohérence et la « structure cohérencielle » qui en est le déploiement.

L’analyse cohérencielle permet de décrire la réalité complexe dans ses structures et l’analyse de cohérences permet d’en élucider le sens.

CCSCH2.png

La structure cohérencielle des réalités est une structure ternaire que l’on retrouve tant au niveau global du système qu’au niveau local d’un sous-système ou de chacun de ses éléments.

Nous ne pouvons en donner ici qu’un aperçu qui mériterait de plus long développement.

Toute réalité peut être décrite selon trois dimensions :

Sa logique subjective, sa composition objective et son développement historique résultant

CCSCH3.png

Ces trois dimensions peuvent être complétées par trois plans d’observation :

– Celui des relations entre les éléments selon la logique du système (inter-relations).

– Celui des formes selon lesquelles il se présente (inter-faces.).

– Celui des opérations et mouvements qu’y s’y manifestent (interactions).

Chaque sous système est lui aussi descriptible selon une même structure cohérencielle.

Revenons-en au principe de cohérence pour remarquer que le tout et les parties, le système global et les sous-systèmes locaux sont liés de façon complexe au sein d’un même cohérenciel en tant qu’ils reposent sur le même principe de cohérence c’est-à-dire le même sens.

Le sens est donc le principe d’unité, de permanence du système, il constitue donc sa cohérence.

Nous pouvons conclure cette approche restreinte du concept de cohérence par ce parallèle :

Le simple est au complexe comme le Sens est au système. C’est là que réside le problème de cohérence.

Cependant, la théorie des Cohérences que nous venons de caractériser invite à aller plus loin encore en développant le concept général de cohérence.

Si le jugement secondaire de cohérence repose sur l’appréhension consciente, intuitive ou diffuse d’un sens, il faut aussi remarquer qu’une même réalité peut être envisagée selon plusieurs sens qui lui donneront chacun un visage différent.

Dira-t-on alors que cette réalité a plusieurs cohérences ?

Ma proposition est plutôt d’appeler cohérence l’ensemble des sens que prend ou peut prendre cette réalité ou ce système.

Cet ensemble de sens que j’appelle « Cohérence », selon une définition généralisée du concept, a une structure interne telle que tous ses sens s’opposent dialectiquement deux par deux. C’est la source des contradictions ou des antagonismes que l’on constate dans la réalité sans pour autant que sa cohérence soit en question. Le principe généralisé de cohérence intègre donc le contradictoire et l’antagonisme.

Ainsi, une Cohérence est un complexe de Sens qui est à la source des réalités manifestes du système et de leur complexité apparente dont le cohérenciel permet de décrire les structures.

Ce développement théorique nouveau du concept généralisé de cohérence entraîne d’un coté à fonder toute une épistémologie qui intègre le Sens et donc la place essentielle de l’homme dans ses réalités. D’un autre coté, elle débouche sur une pragmatique structurée par la méthodologie générale des Cohérences qui propose et permet l’accès à l’essentiel, c’est-à-dire aux Sens et aux Cohérences pour mieux maîtriser la connaissance et l’intervention dans les systèmes complexes.

Elle propose une démarche de maîtrise de la complexité des situations et des problèmes par la maîtrise de leur cohérence et de leurs sens.

En résumé

La notion de cohérence relève le plus souvent du sens commun. La théorie des Cohérences propose tout d’abord une analyse des positions épistémologiques caractérisées chacune par une définition implicite du concept de cohérence et du processus de jugement de cohérence correspondant.
Elle dégage ensuite une première définition restreinte du concept qui le rattache au sens sous-jacent qui donne sa cohérence au système et en sous-tend la complexité.
Une définition généralisée en vient à appeler Cohérence le complexe de Sens qui déploie ses manifestations dans la réalité apparente du système et en fonde la complexité.
La Méthodologie Générale des Cohérences découle alors d’une épistémologie nouvelle fondée sur le principe de cohérence et les structures cohérencielles.

Retour