Les entreprises et le bien commun 2
Le Sens du bien commun et les valeurs
Qu’est-ce que le bien commun pour une communauté de bien, une communauté partie prenante de l’entreprise ou bien l’entreprise elle-même comme communauté entreprenante. D’abord voyons quelles conceptions implicites de ce qu’est une entreprise règne sur les esprits, consciemment ou non. Il y a les entreprises de puissance ou de captation de richesses. Elles sont vues par les uns comme forcément prédatrices et pour les autres comme moyen légitime d’enrichissement. Il y a les entreprises techniciennes qui déploient des trésors de rationalité et d’efficacité au service d’un objectif, quel qu’il soit et où chacun est sensé exercer la fonction qui lui est dévolue, sans état d’âme. Ce sont celles que l’on enseigne dans les écoles spécialisées. Il y a les entreprises systémiques qui fonctionnent selon des normes ou des lois de l’économie, lois du marché par exemple ou lois de régulation, par nécessité naturelle et par obligation. On en profite où on en est victime selon la fatalité des conjonctures. Il y a enfin les entreprises communautaires, communautés entreprenantes, communautés de parties prenantes, exerçant aux service de communautés clientes, dans le contexte de communautés territoriales comme une région ou un pays par exemple. Là vient se situer la question du bien commun qui implique qu’il y ait communauté de bien. Les trois autres conceptions de l’entreprise ont évidemment du mal à s’accorder à cette notion de bien commun.
Pour une entreprise ou communauté entreprenante on peut imaginer ce que pourrait être le bien commun : réussite et pérennité de l’entreprise, enrichissement des parties prenantes, apports de « biens » et « services » au service du bien des communautés clientes (marchés), contribution au développement des communautés territoriales où s’exercent les activités de l’entreprise, participation au progrès humain professionnel mais aussi personnel etc. Cela dit la multiplicité des acteurs et communautés impliquées depuis les équipes spécialisées, jusqu’aux populations les plus larges amène bien vite à observer que le bien commun prend des consistance très différentes. Comment alors réunir des communautés différentes avec des enjeux propres forcément différents. C’est là que la question du Sens prend toute son importance. D’abord pour chaque communauté partie prenante un Sens du bien commun peut être identifié comme donnant sa logique, sa cohérence et aussi ses valeurs à l’activité et même sa raison d’être à l’entreprise. Aller dans le même Sens c’est ce qui donne sa cohérence sa motivation et son efficacité à la communauté entreprenante. Dès lors on peut fixer ce qu’est le bien commun à un moment donné comme le projet, les buts fixés mais qui change selon les circonstances et surtout selon les parties prenantes. Le bien commun n’est pas le même pour chacun mais le Sens du bien commun doit l’être lorsqu’on se réfère à la même communauté de bien. Ainsi projets buts objectifs ne sont pas les mêmes pour chaque équipe, chaque partie prenante, chaque client ou territoire d’activité mais, lorsque l’entreprise est identifiée comme communauté de référence alors le Sens du bien commun pour celle-si est celui sur lequel s’alignent motivations, stratégies, engagements, conSensus donc. C’est aussi ce qui met les acteurs dans une logique de « concourance » plutôt que de concurrence.
Comment alors caractériser le Sens du bien commun pour une « communauté entreprenante », une entreprise donc mais aussi d’autres configurations de l’engagement collectif. C’est là qu’intervient la notion de valeurs. Les valeurs sont les indicateurs du Sens du bien commun. Elles peuvent et même doivent être différentes dans leurs expressions, leurs traductions, selon les groupes et parties prenantes mais elles expriment le même Sens. Vaut ce qui va dans ce Sens et c’est donc le premier principe de toute évaluation. On peut donc évaluer des enjeux, des actions, des projets, des ressources, des résultats avec une échelle de valeurs commune basée sur le même Sens du bien commun. Cela n’empêche pas que les valeurs soit différenciées selon les parties prenantes et surtout cela n’empêche pas que chaque communauté de bien ou communauté de valeurs ait aussi et par ailleurs d’autres modes d’évaluation qui lui soient propres lorsqu’elle n’est pas engagée avec l’entreprise. Par exemple une filiale peut être commune à plusieurs entreprises. Elle peut avoir sa propre échelle de valeurs avec le Sens du bien commun qui lui est propre et par lequel elle vise son bien mais aussi elle va devoir concourir et de façon différenciée à chacune des entreprises actionnaires selon leurs valeurs spécifiques. C’est évidemment aux dirigeants de discerner à chaque fois le Sens de leur action.
Il faut donc associer le Sens du bien commun à une communauté donnée avec les valeurs qui lui sont propres. C’est ce qu’on appellera la communauté de référence. Ainsi avant toute évaluation et même tout engagement de l’action, tout projet, il faut déterminer quelle est la communauté de référence, ensuite son Sens du bien commun et les valeurs propres qui le caractérisent. Ce sont les bases d’une toute nouvelle appréhension de l’entreprise, ses finalités, sa logique, ses valeurs et enfin les méthodes et pratiques qui permettent d’en maîtriser les enjeux.