Les jeux d’identités 3
Mise en pratique de l’outil d’analyse des relations dans différents domaines. utilisations d’une carte de cohérences.
EXEMPLES D’APPLICATIONS
1 – PRINCIPES D’UTILISATION DES JEUX D’IDENTITES DE LA
CARTE GENERALE DES COHERENCES
La carte générale des cohérences est un
outil d’analyse de Sens applicable à toutes sortes de
situations. Elle peut être utilisée pour des problèmes
très vastes, culturels, sociologiques; ou plus restreints;
événements quotidiens; pour des problèmes
professionnels ou plus intimes. Son utilisation peut être
aussi très méthodique ou très rapide.
La multiplicité de ses utilisations rendra pour l’utilisateur
cet outil toujours plus riche et toujours plus juste jusqu’à
devenir un "langage", c’est-à-dire non pas un
vocabulaire de plus, mais un miroir qui renvoie, éclairé,
ce que l’on y projette. La pratique conduit à la maîtrise.
On envisagera successivement les quatre types d’usages que l’on
peut en faire :
– Analyse du Sens, c’est-à-dire comprendre et sentir.
– Choix de Sens ou d’orientation, et conceptions assorties.
– Actions, communications et interventions.
– Régulations, pilotages, ajustements.
a) Analyses
On peut envisager deux méthodes pour analyser un problème,
un événement, un cas. Soit on en cherche directement
le Sens, soit on cherche d’abord les différentes interprétations
possibles dans les quatre champs pour distinguer les différents
aspects du problème. C’est une véritable étude
qui peut être aussi, très rapidement menée
ou largement approfondie. On distinguera l’analyse directe et
l’étude systématique d’un problème.
Il faut souligner cependant que cette utilisation de la carte
n’est que l’un des outils de la méthode des cohérences.
C’est le plus général et le plus maniable. Il faut
savoir que chaque problème, chaque situation a sa propre
cohérence dont la carte peut être élaborée
par d’autres méthodes.
– Analyse directe – Elle consiste à positionner
dans l’un des champs le problème, tel qu’on le ressent.
Pour ce faire, on s’aide des isomorphismes et des différentes
dimensions du problème. Ses différents éléments
peuvent quelquefois se montrer très vite comme isomorphes
entre eux, c’est-à-dire faisant apparaître un Sens
commun que l’on peut replacer dans l’un des champs. Ce positionnement
peut être fait comme hypothèse et s’il est juste,
il permettra de repérer d’autres éléments
isomorphes. Cette confrontation à la carte générale
est élucidatrice. On y voit de plus en plus clair.
Ce positionnement sur la carte peut s’opérer simultanément
par les isomorphies entre les éléments de la question
analysée et les multiples images isomorphes qui constituent
la connaissance de la carte générale. C’est d’ailleurs
pour cela notamment que l’enrichissement de cette connaissance
facilite l’analyse. C’est vrai pour l’affinement de sa propre
sensibilité et lucidité personnelle, sur soi-même
aussi. Chaque nouvelle analyse enrichit d’ailleurs ces collections
d’éléments isomorphes et la puissance de l’outil
pour son utilisateur.
L’analyse directe peut se faire aussi en envisageant séparément
les trois dimensions que l’on a données aux situations
de communication. En analysant les jeux d’identités, on
va comprendre la situation et les processus en oeuvre. On peut
aussi analyser le Sens de l’une ou l’autre des dimensions pour
comprendre le reste. Ce processus de passage de l’une à
l’autre dimension contribue à connaître de plus
en plus justement la question analysée ainsi que tous
ses aspects, leurs Sens et leurs réalités aussi
qui n’apparaissaient pas forcément au premier abord. Ainsi
ce type d’analyse met en évidence peu à peu les
éléments les plus significatifs que seule l’analyse
des Sens permet de déterminer. Le regard sur les choses
change au fur et à mesure de l’analyse, il devient plus
précis sur les réalités et plus juste sur
leurs significations. On en tire un triple bénéfice
de connaissance: de la question étudiée, de l’outil
et de soi. L’analyse directe est particulièrement pertinente
pour les situations réelles alors que l’étude systématique
s’accomode mieux des situations générales.
L’étude systématique – Elle consiste
à poser le problème, systématiquement dans
les quatre champs. On utilise de ce fait l’isotopisme qui fait
que les mêmes éléments peuvent avoir plusieurs
Sens différents et être mis en jeu dans des cohérences
différentes. Une même réalité peut
ainsi être fondée sur des cohérences différentes,
isologues. C’est surtout vrai pour les questions générales
ou généralisées alors que les cas précis
tendent plus favorablement vers un champ particulier.
S’il s’agit d’un cas précis à étudier, l’étude
passe par sa généralisation. Elle consiste à
présenter le problème dans chacun des champs et
à représenter les différentes modalités
qu’il peut y prendre. On en décrira les circonstances
possibles, les jeux d’identités correspondants, les processus,
avec tous les éléments de compréhension
logique qui vont avec. Les explications ne sont pas les mêmes
dans le champ de la dégradation ou de la conquête.
Chaque élément du problème est envisagé
dans chacun de ces champs où son rôle particulier
est décrit en relation avec les autres.
Une méthode pour procéder à cette étude
consiste à effectuer un inventaire des réalités,
une liste d’éléments qui sont envisagés
successivement dans chacun des quatre champs.
Se construit alors dans chaque champ un scénario qui peut
être caricatural d’ailleurs , si on exagère volontiers
les Sens et qu’on les surdéterminent bien. Chacune des
quatre représentations constitue une interprétation
possible du problème.
La confrontation d’un cas précis à ces représentations
permet d’en avoir très vite le Sens particulier. En fait
on s’est ainsi construit une grille d’analyse spécifique
pour le problème considéré, on pourrait
même dire une théorie de sa problèmatique.
Les exemples d’applications que nous aborderons, consisterons
en études systématiques de divers problèmes.
Cette démarche présente un très gros intérêt
pédagogique de la méthode des cohérences.
L’un des intérêts de cette étude systématique
est la mise en évidence de la pluralité des Sens
que peut avoir un fait ou un problème. Cela sort des vues
manichéennes et des logiques binaires de la culture dominante.
Cela ouvre de ce fait sur une nouveauté : la possibilité
des choix de Sens.
A titre anecdotique, on peut rappeler qu’au moyen âge encore,
avant ou pendant les émergences d’une dominance de la
culture de la conquête, l’interprétation d’un texte
était faite dans les "quatre Sens" (qui n’étaient
pas tout à fait cependant ceux de la carte de cohérence).
b) Choix et conceptions
Compte tenu d’une analyse directe ou d’une étude systématique,
on peut être amenée à faire des choix de
Sens, d’orientation et concevoir ou prévoir où
ils conduisent. Les questions de choix, de décision sont
souvent des questions de Sens. Pour les faciliter on peut prévoir
dans leurs différentes dimensions les conséquences
des choix possibles. Les choix portent aussi sur des problèmes
et des situations existantes. De ce fait le Sens de ces situations
peut faciliter ou au contraire s’opposer aux choix que l’on souhaite.
En tout cas quelque soit le cas, on a toujours intérêt
à confronter le Sens de la situation actuelle au Sens
de ses choix pour en déduire au moins le type d’obstacles
que l’on va rencontrer et les stratégies et moyens qu’il
va falloir employer.
Les décisions qui vont dans le Sens actuel des situations
où elles s’appliquent, ne font qu’en renforcer ou surdéterminer
le Sens. Les autres demandent de s’appuyer sur les éléments
qui vont avec et de faire évoluer ou disparaître
les éléments des réalités de Sens
différents. Par exemple, une décision de Sens peut
d’abord correspondre au choix personnel et là où
il faut agir il y a des personnes de tendances différentes.
On pourra repérer les conditions. On peut repérer
aussi les types de relations et de communications que l’on peut
instaurer ou non avec les autres selon ce que l’on cherche comme
conSensus.
En ce qui concerne les choix de Sens, il faut préciser
qu’ils sont une question d’orientation personnelle selon ses
propres valeurs. Cependant le champ de l’accomplissement est
celui où la lucidité permet des choix clairs et
plus justes par rapport à ses propres finalités
et les possibilités des situations.
La conception de solutions, de stratégies, de créations…
est d’autant plus facile que leur Sens est clair. Les éléments
à concevoir sont toujours isomorphes des Sens choisis
et font une unité et une densité très grandes
de ce qui peut être conçu. La conception peut servir
aussi à d’autres choix de réalités ou à
réajuster les choix de Sens.
c) Actions – communications – interventions
En relation avec ce qui précède elles peuvent être
décidées et conçues après les analyses
ad hoc.
La plupart des actions se ramènent à des communications.
Les trois dimensions personnelles, fonctionnelles, situationnelles
portent le Sens des communications. C’est par elles et sur elles
que l’on peut intervenir. Les actions et communications seront
souvent des "mises en scène" des Sens choisis.
Agir consiste à prendre et faire prendre les identités
correspondant aux jeux relationnels convenables. Cela consiste
aussi à préparer, rassembler, utiliser, produire
tous les éléments isomorphes convenant à
la situation, et la constituant. Cela consiste enfin à
engager et conduire des processus, méthodes, procédures
qui eux aussi sont homologues. Selon le cas et les possibilités
personnelles, on peut insister sur telle ou telle dimension.
Les objectifs de toutes actions peuvent être formulés
aussi dans ces trois dimensions : personnelles, situationnelles,
fonctionnelles. Leur formulation est une expression du Sens que
l’on a choisi. La carte générale des champs et
des jeux d’identités permet de les situer et en particulier
de les distinguer des autres possibilités de Sens. Un
choix de Sens de l’involution par exemple ne peut être
communiqué selon des relations de type conquête.
On ne mobilisera jamais pour des objectifs de l’involution ou
si on le fait ce sera pour ses images et non les faits. Plus
on réussirait à mobiliser des gens par exemple
et moins l’objectif aurait quelque chance d’être atteint.
Il en est de même pour des objectifs de conquête
ou d’accomplissement que l’on voit quelquefois passer par des
actions ou relations dans la dégradation. Dans ce cas,
soit on échoue, soit on s’est leurré sur les objectifs.
Cela dit, le champ où ça se résout est en
bas et à droite de la carte.
Ainsi l’action est toujours exemplaire parce qu’elle est aussi
communication de Sens. On ne peut pas se contenter de résultats
ou d’objectifs formels. La manière de les atteindre est
la dynamique qu’ils entraînent mais c’est aussi ce qui
les amène. Le Sens de l’action n’est jamais neutre. C’est
toujours une question de lucidité, et de choix.
d) Régulation, pilotage, ajustements
A tout moment et selon les événements on peut s’interroger
sur le Sens de ce qui se produit ou de ce qui doit être
fait. La justesse d’une action dans le temps est obtenue par
la surdétermination de tout ce qui va dans le même
Sens. Si l’action est "R", réponse d’un tiers
ou d’un ensemble à "S" ensemble des éléments
quotidiens, on a intérêt à ce que ces derniers
ne soient pas dispersés. Les réponses R sont aussi
faites d’éléments de Sens multiples. On a intérêt
à en lire le Sens pour réagir (sur S/opportunément).
On retrouve ainsi pour la régulation et le pilotage de
l’action ou la communication les mêmes principes que pour
la conduite des situations interpersonnelles. Les jeux d’identités
interviennent alors comme outil de manière très
voisine. Pour la conduite d’un entretien on peut, en plus de
tout ce que l’on a dit au 1er chapitre, ajouter maintenant le
repérage du type d’identité en action. La conduite
d’un entretien, comme d’une action, consiste à régler
les types d’identités des personnes intéressées
en réglant le sien sur une position complémentaire
ou symétrique. Ainsi si l’on veut des pratiquants pour
un enseignement par exemple, il faut ajuster sa propre position
de maître.
L’ajustement se fait d’instant en instant pour piloter la situation
en étant soi-même le plus juste et en lisant et
réagissant justement au fonctionnement des personnes et
aux événements. L’utilisation de la carte de cohérence
aide à se repérer en tant que de besoin.