Les jeux d’identités 2
Les jeux d’identité suite et approfondissements
2 – LES JEUX D’IDENTITE
a) Principes et stabilités
La carte générale des cohérences offre un
éventail infini de Sens repérables à partir
des axes et dans les champs de cohérence. On peut considérer
que chaque Sens représente une tendance caractérielle.
Chaque Sens peut prendre réalité dans des comportements,
des attitudes, mais aussi dans des expressions et situations
qui le manifestent. Une tendance de personnalité est dans
un Sens avec la panoplie de ses modalités manifestables.
Chacun possède l’ensemble des tendances que permet d’envisager
la carte. Cependant ce qui fait la personnalité propre
d’une personne c’est d’abord le degré relatif de chacune
de ces tendances. La distribution des Sens n’est pas homogène
et sur la carte on peut la repérer par un profil particulier.
Ce profil marque une nette prédominance
pour la CONQUETE. La personne peut se trouver dans tous les champs
mais celui là dominera les situations où il se
placera.
Une tendance majeure dans un profil correspond à différentes
choses qu’il ne faut pas oublier :
– Elle correspond au type de situation que l’individu aura tendance
à rencontrer ou à choisir. Dans le profil précédent
l’intéressé choisira peut-être pour cela
une profession très en vue. Il se trouvera là au
bon moment, etc..
– Elle correspond au type d’attitudes, d’expressions, de comportements
de la personne, en cohérence bien sûr avec la situation.
– Elle correspond au type de relations et de communications privilégiées
(mais non exclusives bien sûr). Quelqu’un qui a une tendance
dominante dans la DEGRADATION aura tendance à établir
de mauvaises relations et à mal communiquer. Il y aura
toujours malaises ou conflits autour de lui.
– La tendance majeure correspond aussi au Sens particulier que
donne l’intéressé au monde qui l’entoure. C’est
une préactivation dominante.
Ce dernier point est important à souligner. En effet à
tout message/situation, à toute réalité,
une tendance caractérielle dominante peut correspondre
à une très forte préactivation. De ce fait
tout Sens donné aux choses en est fortement empreint.
Ceci conduit à des modes de pensées variés,
à des idéologies, des visions du monde et des choses
différentes. Dans l’étude des divers types de tendances
(identités) nous étudierons notamment les différentes
visions des problèmes de communication selon les champs.
Le profil d’un individu peut varier au cours de la vie ou se
réduire à quelques tendances principales. Les diverses
tendances s’activent aussi selon les situations. On trouve ainsi
des personnages qui fonctionnent professionnellement dans le
champ de la CONQUETE et sur le plan familial dans L’INVOLUTION.
D’autres fonctionnent presque exclusivement dans la DEGRADATION,
d’autres encore selon différentes tendances dans le même
champ selon les circonstances, activités professionnelles
et activités sociales par exemple.
Ainsi des individus apparaissent comme monolithiques ou binaires
ou ternaires avec ou sans nuances, avec ou sans grande mobilité
de Sens. Tout ceci peut dépendre d’un contexte particulier.
Des personnes peuvent avoir une vie sociale dans la conquête
et une vie affective dans la dégradation par exemple.
Cela varie dans le temps et selon les circonstances, si l’individu
n’est pas figé. Malgré tout, dans une situation
donnée à un moment donné, une personne fonctionne
selon une tendance dominante donnée. Cette tendance est
pour lui le Sens de la situation, celui de la communication et
de son processus, mais aussi celui de sa dimension personnelle.
C’est sa tendance caractérielle ou le type de personnalité
qu’il exprime et vit à ce moment là. Tout se passe
alors toujours à ce moment comme si c’était là
toute sa personnalité.
Si quelqu’un se manifeste toujours de façon autoritaire
dans son travail, il peut passer pour avoir une personnalité
autoritaire pour les personnes qu’il y rencontre. Cela n’empêche
pas que dans d’autres circonstances, il ait des attitudes très
différentes et y passe alors pour d’autres personnages.
Cela est vrai pour des lieux et circonstances différentes
et pour des moments différents.
Pour une situation donnée la personnalité se réduit
en général à une tendance particulière
que l’on considère comme son identité
à ce moment là.
La carte générale des cohérences peut être
considérée ainsi comme la carte des différents
types d’identités. Pour simplifier on prendra au lieu
d’un Sens tout un secteur de Sens ou même un champ.
Cela nous amène pour l’instant à quatre grandes
classes d’identités correspondant aux quatre champs. On
passera à huit types d’identités si on y ajoute
la troisième dimension. En fin de chapitre on examinera
aussi les axes de la carte générale. On pourrait
ainsi multiplier les classes ce qui ferait perdre une facilité
d’usage de l’instrument d’analyse proposé. C’est pour
cela que dans la pratique courante on se contente des huit premiers
types. On les considérera en outre, pour simplifier les
évocations, comme huit types des personnages.
Venons en maintenant à ce que l’on appelle jeux d’identités.
Un jeu d’identité est la relation entre deux personnes
stabilisée sur une cohérence commune et donc selon
une même tendance. Comme on l’a vu, une communication tend
à s’ajuster sur une cohérence commune, un conSensus,
ou à se rompre. Toute relation que l’on peut étudier,
est donc soit provisoirement en phase d’ajustement, soit stabilisée
sur une tendance commune.
De ce fait, il ne peut y avoir de communication véritable
que dans une relation où les deux parties se situent dans
le même champ de la carte de cohérence. Leur tendance
commune est le Sens de la situation et de la communication. Leurs
types d’identités de même cohérence sont
en interaction. C’est ce que l’on appelle un jeu d’identités.
Tout se passe, pour un jeu d’identités, comme si deux
personnages de même tendance inter-agissaient dans la situation
de communication.
Toute relation stable est ainsi un jeu d’identités (ou
une succession de jeux d’identités) entre des tendances
de même Sens. L’ajustement consiste aussi à trouver
le type d’identités commun favorable. Il ne peut donc
y avoir communication entre deux personnages de champs différents.
Si cela se présente la phase d’ajustement peut échouer
et il y a rupture de la relation. Concrètement cela s’arrête.
Si on observe des entretiens entre deux personnes, on s’aperçoit
que les ruptures, la fin des entretiens correspond presque toujours
à un désajustement des types d’identités
non réajustés. Lorsque deux personnes préactivées
dans des types d’identités différents se rencontrent,
tout d’abord elles ne se comprennent pas, les choses n’ont pas
le même Sens pour l’une et pour l’autre, K différencié
de K’. Quelquefois malheureusement, cette incompréhension
prend peu à peu Sens dans la dégradation et s’établit
(inconsciemment en général) un conSensus avec ajustement
d’un jeu d’identités dans ce champ. La communication existe,
se stabilise même, dans une situation de mauvaise relation,
durable malgré tout.
La stabilité d’une relation de communication est toujours
ainsi le produit d’une phase d’ajustement plus ou moins difficile
(en général très courte d’une fraction de
secondes à quelques minutes). Cet ajustement se fait sur
des identités de même type dans le même champ
et s’établit ainsi un jeu d’identités.
Il reste à introduire dans ce schéma la troisième
dimension. Elle apporte quelque chose d’important. En effet si
on prend un Sens donné pour une relation entre deux personnes
on s’aperçoit alors qu’elles peuvent se situer soit de
part et d’autre du plan de la carte de cohérence, soit
du même côté :
Dans les deux cas la relation est stable,
de même cohérence. On a deux types de jeux d’identités.
Ceux dont les personnages sont du même côté,
sont dits (par convention) symétriques.
Ceux dont les personnages se situent de part et d’autre sont
dits (toujours par convention) complémentaires
. Par ailleurs les tendances qui suivent l’axe ETRE sont dites
de position haute et celles qui suivent l’axe
NON-ETRE, de position basse . Cela s’explicitera
dans les descriptions ultérieures pour chacun des champs.
Une relation complémentaire est celle où les types
d’identités sont l’un en position haute, l’autre en position
basse. Une relation symétrique est le cas où ils
sont de même position haute ou basse. Nous allons maintenant
explorer chacun des quatre champs de la carte générale
des cohérences. Cela permettra de construire peu à
peu un outil qui servira ensuite à différents problèmes
de communication.
b) Champs de la conquête
Dans chacun des champs les deux types d’identités se placent
de part et d’autre de la carte générale selon la
troisième dimension. Leur est attribuée une appellation
qui évoque un très large éventail de modalités
et de circonstances. Il faut voir ces noms en ce qu’ils sont
isomorphes dans le champ où ils figurent, c’est-à-dire
leur Sens.
b-1 – Les deux types d’identités
Pour la position haute, il s’agit d’un CHEF, VEDETTE, MODELE.
C’est un chef, c’est-à-dire ici le premier sur une échelle,
à la tête (le chef) avec éventuellement
un couvre chef (képi, tiare ou autre objet caractéristique).
Etre un "chef" signifie trivialement être le
premier, le meilleur, être quelqu’un qui réussit.
Le chef est "le plus…". Le plus compétent
ou riche ou beau ou intelligent ou fort… Ce qui dans ce champ
le caractérise toujours, c’est d’être au sommet
de quelque chose. Tout cela se passe bien sûr avec bien
des nuances. En tout cas est chef celui qui est reconnu comme
tel selon des critères pertinents dans un lieu donné.
Ce sont les critères d’élection qui fondent son
statut. Le statut, reconnu par une population quelconque, est
l’essentiel. Le rôle du chef consiste à représenter
ces critères. Par exemple le chef de service représente
les objectifs du service, le chef d’un état représente
l’intérêt supérieur.
Le terme de vedette marque le fait qu’il ne peut être reconnu
que s’il est en vedette, et même "la vedette"
pour tenir cette place unique. C’est le numéro 1 pour
les critères d’élection. L’ensemble de ces critères
constitue la cause . Le terme modèle
souligne que "le premier" est un modèle à
imiter ; c’est d’ailleurs parce qu’il représente la cause
que ce qu’il fait ou dit en son nom est à imiter.
Dans ce champ ce type d’identités se définit ainsi
toujours par une Cause qui est à conquérir. La
cause, c’est l’objectif, le trophée, l’enjeu, le territoire,
la patrie, la nation, l’entreprise, la part de marché,
le nombre de voix, un idéal, une idéologie, la
science, la nature, la médecine, les femmes, un public,
etc…. Les causes possibles sont infinies, banales comme extraordinaires.
Elles sont toujours objectivables. Une cause se caractérise
toujours par un ensemble (qui constitue un espace, un territoire)
de critères objectifs (critères d’élection,
nombre de…, valeurs, mesures, etc…)
Pour une cause il doit toujours y avoir un représentant,
le N° 1. De ce fait il ne peut qu’être l’unique. Il
ne peut y avoir deux N° 1 sur la même cause
.
Toute l’activité, l’attitude, les comportements du N°
1 sont entièrement destinés à représenter
la cause à laquelle il est identifié
. "L’Etat c’est moi" en est un exemple, mais aussi
déclarer que ce que l’on dit est la vérité,
donner des consignes en son nom comme étant évidemment
au nom de la cause. Le scientifique qui parle au nom de la
science, le chef de département qui parle au nom de l’entreprise,
le politicien qui parle au nom de la France, le journaliste qui
parle au nom de l’objectivité. Le premier sur une cause,
ne l’est que tant qu’il est reconnu comme tel. S’il n’est plus
reconnu, soit il n’est plus le premier, soit on change de champ.
De ce fait, le Sens de son fonctionnement est d’être reconnu
en représentant la juste cause selon les bons critères.
Il faut rester le meilleur et pour cela le montrer. Pour être
au sommet le chef-vedette-modèle ne doit pas cesser de
donner à voir qu’il l’est toujours selon les critères
ad-hoc. Il ne doit pas cesser de briller comme une étoile
(star) de se donner en spectacle (selon les règles du
jeu, critères de la cause). Ce qui importe, c’est la réalité,
les apparences. C’est la position, la valeur, la mesure, la place
dans l’espace et non pas le Sens.
Pour être élu, reconnu, il faut un public. Il est
fait des personnages en position basse : les MILITANTS. Ils militent
pour la CAUSE. Ce sont eux qui élisent et suivent le chef.
Même si l’élection n’est pas formelle, le chef non
reconnu n’est pas suivi ou alors on passe dans d’autres champs.
Le militant se consacre à sa cause, celle qu’il a choisi,
il s’y dévoue et se dépasse pour elle. Il est motivé,
il y croit et cherche à être compétent, efficace.
Son rêve secret, c’est d’être le meilleur et ainsi
il est sans cesse engagé dans une compétition sur
une échelle dont les critères de valeur sont ceux
de la cause. Critères de compétences professionnelles,
de nombre d’électeurs, de résultats, de conquêtes
féminines ou masculines, de réussites sportives,
d’esthétique, etc…
Le militant a pu être boy scout et avoir fait ainsi un
bon apprentissage. Cela se vérifie d’ailleurs pour nombre
de causes sociales, politiques, sportives, religieuses, etc…
La cause étant définie par tout ensemble de critères
objectifs, c’est en fait tous les objectifs extérieurs
à soi qui peuvent être une cause. Cette cause est
d’ailleurs cause commune, entre les militants qui forment ainsi
une équipe et le chef qui la représente.
Reprenons maintenant le jeu d’identités chef-vedette-modèle
/ militants. Pour qu’il y ait stabilité, il faut ici qu’il
y ait cause commune. Le militant reconnaît et élit
le chef selon les critères d’élection et le chef
est identifié à la cause. La cause est une objectivation
de la cohérence commune dont les Sens sont inconscients
pour les protagonistes. Elle est de l’ordre de la réalité
même si elle ne fait qu’exprimer une cohérence de
la conquête. Le militant place dans son chef, dans le représentant
de la cause, le lieu de ses propres objectifs alors que ce dernier
identifié à la cause, les place en lui-même.
Pour fonctionner ainsi le militant a toujours besoin d’un N°
1 représentant la cause. S’il n’y en a pas il faut en
élire un, le meilleur des militants. Sinon on change de
champ, on peut se retrouver dans celui de la DEGRADATION. Dans
la conquête toute équipe de militants sur une cause
a besoin d’un chef, représentant, d’une vedette, d’un
modèle à imiter, autrement elle perd la foi, le
moral et la cause est perdue par démobilisation.
Dans une organisation ce jeu d’identités se traduit par
une hiérarchie avec beaucoup d’échelons (à
gravir). A chaque niveau on peut avoir une cause partielle. De
ce fait s’installe tout un réseau de communication stable
ou une équipe de militants a un chef qui est lui-même
militant d’une cause supérieure avec aussi un chef, etc…
Le chef suprême représente la totalité de
la cause, les autres, des parties de son territoire. D’ailleurs
si ces territoires ne sont pas bien délimités cela
pose des problèmes.
Observons ce qui se passe maintenant dans les relations symétriques.
Entre positions basses on peut avoir deux militants sur la même
cause. Ils coopèrent sur l’objectif commun, promouvoir
la cause, la faire avancer. C’est par elle qu’ils trouvent leur
identité et c’est ce qui fait leur motivation commune.
Ils sont chacun à leur place selon leur valeur dans l’échelle
des critères d’élections, compétences, mérites,
ancienneté, beauté, courage, etc… Tant que le
chef est là, il n’y a pas de problèmes entre eux.
Par contre si les causes sont différentes il n’y a plus
de relations stables dans ce champ entre militants. En effet,
les causes différentes deviennent des cohérences
différentes. Dans ce cas comme toujours, soit il n’y a
pas de relation, on s’ignore (difficultés classiques de
communication entre chapelles) soit la relation s’établit
dans un autre champ (dégradation par exemple, ce qui fait
le conflit ou la guerre).
Pour que des "militants" se solidarisent, il faut qu’ils
fassent "cause commune", c’est-à-dire que s’instaure
une cause plus large avec un leader général. Les
relations symétriques en positions basses s’expriment
selon des modalités du champ de la conquête. Se
forment des équipes qui agissent dans l’intérêt
de la cause selon la distribution des rôles des militants.
Il s’agit de bien jouer le jeu. Les règles du jeu quelqu’il
soit, comptent bien plus que ce qui est vécu. Les règles
sont celles des réalités et c’est ce qui importe.
Le droit est particulièrement important dans ce champ
parce qu’il règle les rôles, statuts et jeux des
acteurs. On leur demande avant tout de la droiture mais toujours
en référence exclusive aux règles du jeu,
critères de la cause. En dehors de cela tout est possible,
la fin justifie les moyens (dans le cadre des règles établies).
Un problème tout à fait particulier se pose pour
les relations symétriques entre deux chefs-vedettes. Si
l’un est militant de la cause de l’autre tout en ayant ses propres
militants dans une hiérarchie, on se retrouve dans une
relation complémentaire. Par contre sur la même
cause il ne peut y avoir deux N° 1, il y en a un de trop.
De ce fait il ne peut jamais y avoir deux leaders dans ce champ
dans la même situation, en relation sur la même cause.
Sinon on se retrouve, soit dans le cas précédent,
soit dans un conflit dans le champ de la dégradation,
soit dans le meilleur des cas avec un partage jaloux des territoires
et l’instauration de deux causes différentes.
C’est le cas par exemple où deux experts se rencontrent
qui veillent à se définir des champs de compétence
bien distincts. Cela peut être deux artistes-vedettes qui
se trouvent des inspirations et des publics différents.
Si ce découpage des causes n’est pas possible, on va avoir
une rivalité incessante où le meilleur va gagner
(selon les "électeurs") ou qui va tourner à
la lutte destructrice. Ayant noté ce qui se produit entre
deux N° 1 dans l’impossibilité en tant que tels d’établir
une relation, reste à comprendre ce qui leur reste comme
possibilité dans le même champ de la conquête
pour communiquer. Le découpage des causes évite
l’affrontement mais comme aussi la communication (plus de cohérence
commune) ce que l’on voit émerger alors c’est une nouvelle
cause-commune cette fois "supérieure". Par exemple
morale, religieuse, idéologique.
Deux vedettes sportives se feront militants de "l’esprit
olympique" ou du sport. Il est remarquable alors que cette
cause suprême est sacrée. Elle est tellement idéalisée
qu’elle est intouchable et même indéfinissable pour
des tiers non impliqués directement dans la relation.
Dans une entreprise entre deux cadres ce peut être l’intérêt
supérieur de l’entreprise mais une entreprise idéalisée.
b- 2 – Vision du problème de la communication
Dans ce champ de la conquête les questions de Sens restent
inconscientes. Tout s’analyse "objectivement". Les
personnes sont des individus, objets, définis par leur
rôle, leur position, leur statut, en référence
à une ou des causes, mais jamais en eux-mêmes. Les
interlocuteurs se considèrent toujours es-qualité.
Ce sont deux cadres, deux médecins, deux personnes âgées,
etc… Le qualifiant dépend de la cause pertinente dans
la situation. Ce qui compte, c’est l’identité (identique
à…) de cette cause (culture, classe sociale, milieu,
profession, idéologie, modèle de vie, règles
morales, stéréotypes, etc…).
La dimension personnelle de la communication se réduit
à cela. On ne s’adresse pas à quelqu’un mais à
ce qu’il représente. La dimension fonctionnelle se réduit
à sa part objective. Il n’y est pas question de Sens et
de cohérence, mais de codes et de messages. La communication
devient parfaitement synonyme d’échange d’informations,
de données (de toutes natures). Une théorie de
la communication se réduit à la théorie
de l’information. Faute d’être conscient du passage par
K et K’, on est obligé d’inventer des passages entre S
et R (boite noire, quantités d’informations véhiculées…).
Un des problèmes de communication classique dans le champ
de la conquête est le suivant. Des liens se distendent
entre un chef vedette et des militants (un chef d’entreprise
et son personnel par exemple). Ceux-ci inquiets réclament
un rappel de la "cause" et de la présence de
chef comme bon représentant. Ils veulent être reconnus
par lui comme bons militants. Rien de tout cela ne s’exprime
sauf une demande d’information. Plus cette demande d’information
est objectivement satisfaisante et moins on répond à
la demande réelle. Même si des données objectives
sont distribuées il n’y a pas satisfaction puisque ce
n’est pas la véritable demande.
Dans ce champ de la conquête on parle d’autant plus de
communication que la plupart des réponses fournies ne
tiennent compte que de l’aspect formel, des apparences, des réalités,
et échouent faute de Sens. Cet échec lui-même
y est d’ailleurs incompréhensible (faute de Sens). De
là fleurissent des spécialistes militants ou vedettes
de la cause de la communication (publicité, journalisme,
média, informations et informateurs). Plus il y en a et
moins ça communique, sur le fond, sur le Sens, sur l’humain,
et plus on veut de communication. La dimension situationnelle
fait que sont privilégiées les "scènes"
ou ce champ de la conquête est le plus manifesté.
On reviendra sur ces univers privilégiés où
s’épanouissent ce type d’identités.
Dans ce champ les questions de communication sont valorisées
et réduites aux réalités. Leur Sens reste
inconscient (Sens du champ de la conquête ici). Les communications
s’y caractérisent de plus en plus par un écart
entre ce qui se dit, s’exprime, se montre, et ce qui se passe
réellement. Il tend à y avoir deux réalités.
Celle qui est conforme aux modèles, aux causes ou idéologies
et celle, non consciente, des faits. Paradoxalement on y cherche
l’objectivité, le concret, le pratique, l’action ; il
y a en fait abstraction du Sens. Ce qui se passe tend à
être remplacé par ce qu’il devrait se passer dans
la conscience des personnes. Les signes remplacent les choses
et on en vient à "faire comme si". Comme si
on communiquait notamment.
On y survalorise l’expression pour combler le manque de Sens.
La solution est toujours à côté du problème
véritable.
Les mots clés pour une communication concevable pour ce
champ sont : exprimer, montrer, démontrer, imager, dire,
faire, imiter, copier, informer, exposer. Ils sont tous utiles
à la communication mais sans qu’en soient connus ici les
processus et donc le fonctionnement véritable. De ce fait,
faute de Sens il est difficile de se faire comprendre sauf en
simplifiant et en vulgarisant. C’est souvent l’art de "spécialistes"
de la communication qui retiennent d’autant plus l’attention
que peu est communiqué derrière un vaste discours.
Le Sens de ce qui est dit est à chercher moins dans le
discours, dans ce qui se montre que dans la mise en scène
du discours qui révèle le jeu d’identité.
L’expert par exemple prononce un discours sur sa spécialité
dont le Sens véritable est : "qu’il est le meilleur
de sa spécialité".
b-3 – Les univers de la conquête
Ces jeux d’identités, chef-vedette-modèle / militant,
avec leurs causes, se jouent dans des circonstances, des univers
particulièrement appropriés. Ces univers sont d’ailleurs
faits de ces mêmes Sens par et pour ces
types d’identités.
Citons en quelques uns. D’abord la culture occidentale pour une
grande part, scientifique, matérialiste, objectivante
(en crise aujourd’hui nous sommes en 1980) faite d’institution
de jeux sociaux, d’enjeux, d’idéologies, de modèles
qui correspondent à ces champs. Compétitions de
toutes sortes, questions d’identités et leurs panoplies,
institutionnalisation, causes petites ou grandes, développement
et progrès, conquête de la lune, etc… Elle a ses
vedettes et ses militants.
Beaucoup d’institutions favorisent ce champ, compétitions
et spécialisations dans l’enseignement, découpage
des taches dans l’entreprise, hiérarchisations dans des
institutions militaires, religieuses, sociales, etc… Les thèmes
de l’esprit d’équipe, l’esprit sportif, l’efficacité,
le dévouement, la responsabilité (démocratique),
sont porteurs de ces Sens dans l’entreprise, le sport, des institutions
sociales, les domaines de l’art, du politique. Partout où
le spectacle ou le dépassement comptent particulièrement.
Un sport pratiqué sans spectateurs, sans compétitions,
sans records, n’aurait plus le même Sens. Un cadre sans
équipe, sans compétence particulière, sans
évolution de carrière, perdrait toute motivation
(dans la conquête). Vedette sans militants ou militants
sans chef ou les deux sans causes et on change de champ. Par
contre où les trois sont réunis on est dans un
univers de la conquête.
b – 4 – Considérations théoriques et contextes
Ce passage peut être laissé de côté
par tous ceux que les références théoriques
ne concernent pas.
Ces références on les cherchera dans l’histoire
individuelle comme l’histoire collective où se fondent
ces tendances caractérielles favorites et ces situations
sociales privilégiées. Elles peuvent être
ainsi de types psychologiques ou mythologiques, historiques ou
culturelles. Nous ne prétendrons pas ici faire le tour
du problème mais en donner quelques aperçus essentiels.
Le lecteur pourra lire à la suite ce même paragraphe
pour les quatre champs et découvrir ainsi un panorama
pour la carte générale des cohérences.
Tout le champ de la conquête est à dominante phallique.
La représentation s’assortit d’une identification de soi
avec le moi : images ou représentation de soi pour soi
et / ou les autres. Cette dominante phallique peut s’y confondre
avec la virilité. En tout cas le domaine où culturellement
apparaissent le plus ces situations sont dominées par
les hommes (entreprises, sports, politiques, etc…) Cependant
cette tendance de la conquête est aussi bien présente
pour des femmes, dans des comportements, soit du même type
que précédemment, soit ceux qui valorisent l’esthétique
corporelle, la mode. La star peut être aussi bien une femme
qu’un homme. Les mouvements féministes sont souvent de
revendications phalliques (et non pas viriles). Une femme peut
être très souvent "vedette" dans une relation
affective avec un homme "militant" ou vice versa. Tout
cela n’est pas sans donner quelques ambiguïtés dans
ce champ. On trouve des femmes militantes féminines dans
de nombreuses fonctions d’assistance ou sociales, mais aussi
dans le rôle classique dans la famille bourgeoise.
Revenons à des aspects plus fondamentaux en notant l’équivalence
entre les tendances phalliques et l’objectivation, la distinction,
la distanciation qui caractérisent ce champ de la conquête.
Le triangle, chef-vedette-modèle/militant/cause n’est
pas sans rappeler le triangle oedipien.
De fait la cause est une représentation de la mère
idéalisée dans l’espace, le territoire, le nombre.
Idéalisée, elle est intouchable, sacrée
aussi comme toute cause. Il n’est pas surprenant que l’on représente
la république par une femme comme bien d’autres causes
auxquelles sont attribuées des vertus féminines
idéales. La patrie, mère idéale en est un
exemple, mais l’entreprise aussi et bien des institutions.
Avec le père, chef/vedette/modèle, il y a support
d’identification mais on peut s’interroger sur celle qu’il opère
avec la cause. Il y a confusion viril-phallique lorsqu’il s’agit
d’un homme notamment. Le militant est le fils. La fraternité
est bien un aspect de l’esprit d’équipe des militants.
L’organisation de la conquête fait dans tout cela la négation
du conflit oedipien en objectivant les positions et les identités
mutuelles. Les objectiver revient à les réduire
à la réalité, à la représentation.
Ce qui se joue est bien représentation devant la cause-mère.
Cette absence de conflit fondant ce champ se retrouve dans les
autojustifications de défense contre le mal, le chaos,
le désordre, la faute, etc…
Elle se traduit dans des expressions de complicités masculines,
d’"esprit" d’équipe, de fairplay, de justice
(et non de justesse), dans la nécessité d’arbitrage,
du droit, des règles de référence, de la
monnaie comme objectivation de l’échange, sa neutralité
donc, dans les formalismes de toutes sortes. Le respect de la
règle (de la loi) prime tout. C’est la condition de l’absence
de conflit. Il est remplacé par une "saine compétition"
qui en est l’objectivation a-Sensée. La mythologie est
pleine de héros qui, après avoir vaincu quelque
dragon, conquièrent la belle avec qui ils se confondent
dans la fin de l’histoire. La belle est toujours idéale
et peut être déjà une cause ou un espace
particulier. La mythologie rejoint là l’histoire. Elles
sont pleines de souverains, de chefs, de rois, mais aussi de
grandes causes ou grandes entreprises que ce soit quête
du Graal, quête scientifique, quête économique,
quête féminine. Les armes et outils avec leurs avatars
modernes dans la technologie sont signes phalliques notamment
comme représentations et comme instruments de séparation
du bien d’avec le mal. Il s’agit là d’instruments de construction,
d’élection, de distinction. L’instrument est souvent confondu
avec soi dans le moi. L’identité est un souci majeur et,
là aussi, de construction, d’élection, de distinction,
de séduction aussi. Le séducteur qui affiche les
signes de sa réussite sociale (belle voiture, etc…)
suit parfaitement le schéma. Les signes de réussite,
de distinction, lui font identité dont la représentation
vise à conquérir la femme. Il s’agit bien d’ailleurs
de la femme au-delà de telle personne en particulier.
Le donjuannisme est un type de comportement de la conquête
homologue de beaucoup de ses jeux d’identité.
Historiquement la renaissance et en particulier le XVIIe siècle
marque la dominance de ce champ sur un support culturel déjà
présent en particulier avec le siècle de Péricles
d’une part et la splendeur romaine d’autre part. Que le droit
romain soit encore présent pour nous est significatif.
L’émergence et la dominance d’une bourgeoisie au cours
des derniers siècles a fait prévaloir beaucoup
de ces tendances.
On peut remarquer qu’aujourd’hui elles imprègnent très
largement notre culture si bien que beaucoup n’en conçoivent
pas d’autres alors que simultanément émergent fortement
d’autres tendances. Cela fait crise. Il est très étonnant
de constater que ce que l’on appelle la crise touche de façon
privilégiée quelques signes caractéristiques
du champ de la conquête (économie, énergie,
valeurs, production, territoires conquis, images des grandes
puissances, droit international) sans compter l’étonnante
origine de la "crise" en 1973.
Tout ceci semble éloigner du thème des jeux d’identité,
cependant cela compte comme circonstances de beaucoup de communications
contemporaines et cela peut intéresser d’en voir les évolutions
actuelles dans les nombreux changements qui se produisent aujourd’hui.
Rapports au travail, aux hiérarchies, aux "causes",
à l’identité sociale, à la science, à
la nature, sont en question et amorcent une évolution
de comportements et des types de relations et de communication.
c) Champ de la dégradation
Nous entrons là dans un tout autre univers qu’il ne faut
pas confondre avec le précédent. Les limites n’en
sont pas tranchées et il sera utile plus loin d’examiner
les transitions autour des axes. En tout cas le champ de la dégradation
n’est pas celui de la conquête bien que certaines sensibilités
pourraient les confondre.
c-1 – Les deux types d’identités
Pour la position haute le terme retenu est DOMINATEUR. Le dominateur
est celui qui exerce un pouvoir sur l’autre.
Le dominateur est le plus fort ou celui "qui tire les ficelles".
Cette dernière expression évoque les "pantins"
qui sont en haut.
Le dominateur tend à exercer son pouvoir sur les autres
et sur les choses. Il les a en main, les maîtrise, les
manipule non dans des fins constructives (même si cela
est dit) mais pour empêcher, pour combattre, pour maintenir.
Pour fonctionner le dominateur a besoin de VICTIMES. La victime
correspond à la position basse. Elle a toujours le dessous,
est toujours rabaissée dans la relation avec le dominateur.
Par rapport à la conquête où les apparences
comptent essentiellement, ici c’est le fonctionnement de la relation
qui fonde les deux types d’identités. Les apparences y
sont souvent trompeuses. L’inconscience règne.
Le dominateur exerce son pouvoir selon plusieurs modes, notamment
la force, la menace, le chantage, la manipulation, la culpabilisation.
Les stratégies sont multiples.
En position haute le dominateur se considère comme détenteur
du bon droit, de la loi, d’une mission qui consistent à
empêcher l’autre de nuire, la victime. Il est ainsi conduit
à la contraindre, la punir, lui rappeler ses fautes, la
mettre dans le droit chemin, malgré elle bien souvent.
Cela s’opère en amputant ce qui est mauvais, en enfermant
dans des cadres, des "gardes fous", en excluant les
"mauvais sujets", en éliminant ce qui est "sale",
ce qui "dérange", ce qui "menace"
un ordre quelconque.
Bien-sûr c’est le dominateur lui-même qui se vit
au fond en danger (plus ou moins consciemment d’ailleurs). C’est
pour cela qu’il s’autorise en quelques noms que ce soit à
défendre (se défendre). L’élimination des
dangers ou la protection contre le mal est sa tâche permanente.
Sans issues puisque la menace est en lui-même et sa lutte
est toujours vaine, à recommencer. Cette tendance a toutes
ses nuances et ses degrés. Elle correspond aussi au sadisme.
Le pouvoir de destruction exercé sur l’autre s’assortit
d’une satisfaction, d’un plaisir, d’une délectation qui
sont surtout perversion de sa propre souffrance. Le dominateur
n’est jamais en repos et il lui arrive quelquefois de s’en plaindre.
On trouve là d’ailleurs une caractéristiques intéressante
: le dominateur se dit victime et c’est comme cela qu’il fait
l’autre victime en l’accusant (plus ou moins subtilement) d’être
dominateur. Ce qui se dit est l’inverse de ce qui se
passe.
Le dominateur agit sur l’autre, soit sur son Sens, soit sur ses
réalités. Sur ces dernières il détruit,
met en échec, élimine, anéantit ou encore
il impose par des pressions efficaces les formes qui lui conviennent.
C’est quelques fois là que prennent Sens formation et
information, la "correction" est bien isomorphe de
punition, c’est toujours une tentation d’élimination des
fautes, du mal, des erreurs. Le souci exagéré de
l’ordre en est une manifestation, mais aussi la certitude en
toute matière dont il ne faut pas douter. Si la caricature
du dominateur est celle de quelqu’un qui donne des ordres (impose
un ordre) c’est qu’elle est bien isomorphe de cette identité.
Une autre est celle du bourreau qui punit (élimine le
mal). Toutes les éradications du mal sont l’essentiel
de l’activité de beaucoup de dominateurs, sans doute,
bien-sûr, sur leur droit et leur jugement.
Le dominateur peut aussi détruire le Sens soit en disqualifiant
celui de la victime, soit en imposant son propre Sens. On trouve
alors tout ce qui peut éveiller chez l’autre angoisse,
culpabilités, etc… Les instruments sont d’ordre moral
souvent avec accusations et menaces de jugements. Le dominateur
met en doute l’autre qui doute de ses Sens, il est affolé
(et peut devenir fou d’ailleurs). Il le maintient dans l’incertitude
de ses connaissances, de sa puissance, de son jugement, en jouant
sur le secret, le caché, l’occulte, et son supposé
savoir ou supposée puissance. De cette manière
il maintient l’inquiétude et la soumission. Il impose
aussi ses Sens par des viols affectifs ou émotionnels
(physiques à la limite). Le chantage affectif en est un
bon instrument de même que le jeu des passions. La panoplie
est fort variée et ses subtilités inépuisables.
C’est malheureusement le règne de l’inconscience, du faux
semblant, des faux Sens, des fausses apparences et, de ce fait,
pas toujours très facile à repérer. Cependant
cela se caractérise toujours par des souffrances, des
malaises, des luttes, des inquiétudes et des angoisses.
L’étonnant peut-être, est que les cohérences
en jeu sont celles aussi des victimes. C’est ce qui explique
la stabilité de ces communications malgré les souhaits
ou les apparences différentes. Ce qui se passe dément
ce qui se dit. Chacun connaît de ces relations interminables
qui ne sont faites que de conflits.
La victime est toujours complice de la situation qu’elle la subisse
en l’acceptant ou qu’elle la provoque. La position de la victime
de l’axe NON-ETRE consiste à placer dans l’autre, le dominateur,
le lieu de sa propre existence. C’est pour cela qu’il en accepte
(inconscient bien-sûr) le pouvoir.
C’est par ses sentiments personnels d’insuffisance, d’insécurité
qu’il peut être touché par les comportements du
dominateur qui, sans cela, ne pourrait fonctionner ainsi. Une
des caractéristiques des attitudes de victime est la revendication.
Revendiquer est, bien souvent, attribuer à l’autre, le
dominateur, le pouvoir de satisfaire ses propres besoins, d’être
protégé, de suppléer en tout cas à
des insuffisances. En activant l’inquiétude du dominateur,
ses propres sentiments d’insécurité, la revendication
est très souvent provocatrice. Elle donne pouvoir au dominateur
et en suscite l’exercice. La critique (non "constructive")
opère de la même manière. La victime peut
aussi provoquer plus directement en agressant le dominateur.
Dans tous ces cas la victime se présente comme dominatrice
et ce qui se passe est l’inverse. On retrouve encore l’inversion
de Sens qui fait que l’on s’y perd facilement. C’est le but.
Lorsque le dominateur se dit victime, il réactive des
culpabilités chez la victime qui se soumet ainsi. Lorsque
la victime se dit dominatrice, elle réactive des insécurités
chez le dominateur qui se défend et agresse plus efficacement.
Ces rapports dominateus-victimes se déroulent et font
les situations du champ de la dégradation. Conflits, guerres,
entreprises en difficultés, échecs, maladies physiques
et mentales, enfermements, exclusions, bas fond. Les individus
se dissolvent dans l’anonymat, dans la masse et les protagonistes
perdent, et leur identité, et leur personnalité
(numéros et instruments). Cependant là aussi les
apparences sont trompeuses. Beaucoup de réussites matérielles
peuvent cacher des pertes de Sens, pertes d’âmes, folies…
Inversement des choses très Sensées, très
intelligentes peuvent cacher décompositions, maladies
ou dénuements.
Revenons encore sur la relation complémentaire dominateur-victime
(ou sado-masochiste comme caricature). Son Sens est la dégradation
et derrière tous les jeux, le dominateur craint et attend
secrètement d’être puni et la victime de détruire
son bourreau. De ce fait l’écart des rôles a néanmoins
même cohérence, même Sens. Cela en fait la
stabilité mais aussi les possibilités d’inversion.
En effet il y a, même entre deux personnes quelquefois,
des échanges de rôles, ou encore d’anciennes victimes
qui deviennent comme par hasard de parfaits dominateurs et vice
versa. On trouve aussi des hiérarchies (ce qui compte
là, c’est plutôt l’ordre que l’élévation,
la descente plutôt que la montée, descente des ordres)
où le dominateur a un subordonné victime qui à
son tour domine les siens, etc.. Le bourreau est le serviteur
soumis et servile du maître qui le domine. On en trouve
exemples avec les "petits chefs" mais aussi bien des
caricatures d’esclaves gardiens, de kapo. Quelquefois aussi la
pyramide s’inverse et c’est le patron qui est la véritable
victime des subordonnés et ce, du haut en bas de l’échelle.
Examinons maintenant ce que peuvent être les relations
symétriques, Dominateur-Dominateur.
Le passage à la relation complémentaire où
l’on devient victime et dominé par l’autre plus fort (ou
plus rusé que lui) se ramène au cas précédent.
Elle peut consister en une phase d’ajustement de la relation
complémentaire où on se combat jusqu’à ce
que la balance penche d’un côté. La relation dominateur-dominateur
stable est par définition sans issue de type vainqueur-perdant.
Elle consiste en combats en luttes de destruction mutuelle qui
maintient l’équilibre entre les forces. Il s’agit de faire
mal sans détruire l’autre plus qu’on ne l’est soi-même.
C’est un jeu de lutte où tout le monde tient tête
et le combat ne cesse que faute de combattants, tous épuisés.
Cette relation dominateur-dominateur peut se jouer selon toutes
les modalités de fonctionnement de ce type d’identités
et notamment en ce disant victime. Si bien que beaucoup de communication
critique, revendicatrice ou faisant assaut de malheurs, de maladies,
de difficultés sont de ce type. On sait bien leur caractère
peu constructif, on sait moins le caractère destructeur
de l’autre et de soi-même comme son symétrique.
Deux amoureux peuvent ainsi mourir de leur échec mutuel
et se faire mourir mutuellement. La littérature est pleine
de ces amours passions-destructrices, la vie aussi. Le coupable
est désigné dans la société ou ailleurs.
Ils se manifestent comme victimes l’un de l’autre et les deux
de ce "coupable" là. En fait ils sont dans cette
relation dominateur-dominateur. Ils rendent l’autre et les autres
impuissants à y changer quelque chose. Ce scénario
est extrêmement fréquent dans bien des cercles critiques,
révolutionnaires, revendicatifs ou dans des relations
affectives. C’est un jeu où seuls les protagonistes se
portent préjudice si on ne s’en mêle pas.
Un scénario de ce type, décrit dans l’analyse transactionnelle
est celui d’un couple considéré comme dominateur
victime où un tiers intervient comme sauveur de la victime.
Aussitôt il devient victime à son tour et le dominateur
sauveur. L’analyse de ce scénario classique serait pour
nous différent. Le couple dominateur-victime est en fait
dominateur-dominateur. Le tiers leurré vient prendre la
place naturelle qui lui est réservée, celle de
véritable victime. En fait ce qui se produit c’est que
les dominateurs substituent à leur lutte une alliance
contre le tiers et on a la même cohérence entre
le couple dominateur et le sauveur-victime.
L’inverse est vrai aussi ou un sauveur apparent devient dominateur
d’un couple victime. C’est tout le problème du règlement
des conflits à la mode dans certains milieux qui bien
trop souvent se ramènent à ce schéma. Dans
le premier cas l’intervenant est victime de ses "bonnes
volontés" en fait "il l’a bien cherché".
Dans le second il est intervenu dans l’autre relation symétrique
victime-victime et là aussi il l’a bien cherché,
à prendre une position de type sadique.
Examinons cette relation symétrique victime-victime. Compte
tenu du fait que dans ce champ, ce qui se dit, se montre, n’est
pas ce qui se passe, il faut chercher là où on
ne s’y attendrait pas forcément. Ce n’est pas chez ceux
qui se lamentent qu’il y a forcément les victimes (la
conclusion inverse serait aussi une erreur bien-sûr. Les
opprimés peuvent se plaindre effectivement mais ce ne
sont pas forcément eux qui le font le plus fort). Une
relation victime-victime est une relation de soumission mutuelle.
Au lieu de faire assaut de critiques par exemple ils feront assaut
de dissimulations des problèmes ou assaut de serviabilité
et de dévouement mutuel. Une relation victime-victime
peut-être aussi une relation de provocation mutuelle qui
consiste à menacer de forces que l’on a pas. C’est l’impuissance
qui est dissimulée par son contraire. Les victimes s’auto-détruisent
dans leur relation et se réactivent mutuellement. Les
bandes de jeunes délinquants fonctionnent beaucoup sur
ce type de relations et à force de provocations mutuelles
finissent par se faire punir par un tiers. Deux enfants qui se
bagarrent devant leurs parents cherchent dans un jeu victime-victime
à attirer l’attention de ces derniers qui risque de venir
avec une taloche.
La relation victime-victime n’est pas forcément très
spectaculaire, pas très facile à repérer,
ne serait-ce souvent que par sa banalité.
c-2 – Vision du problème de la communication
Dans ce champ la communication est signe de menace, menace de
manipulation, menace physique ou affective, menace d’erreur,
de tromperie. La communication est suspectée. Elle se
confond avec l’information, avec des rétentions, où
recherche d’information est synonyme de recherche de fautes et
de coupables (les responsables). Poser une question dans ce champ,
c’est mettre en doute ou prendre un risque. La communication
est synonyme de pouvoir. Il y a ceux qui ont droit à la
parole et les autres qui s’expriment quand on les y autorise
et ne doivent dire que ce qui est autorisé. En définitive,
la communication est vécue comme obligée ou empêchée.
En fait, dans ce champ, ce qui se dit ou s’exprime est bien souvent
l’inverse de ce qui se passe. Le manifeste a pour fonction d’occulter
ce qui se passe. Les uns agissent "pour le bien" des
autres, d’autres pour leur avenir et leur réussite et
tout ça dissimule la domination des victimes. Le jeu des
promesses est tellement subtil quelquefois qu’il vaut mieux croire
à ses intuitions, ses sensations, qu’à tout ce
qui est dit.
K et K’, cohérences de la dégradation, se manifestent
ainsi dans cet écart entre ce qui se passe et se dit mais
aussi par tout le jeu de coups qui font mal à soi ou à
l’autre et, enfin, par le déjouement du Sens de celui
qui voudrait comprendre logiquement. Un signe dément l’autre
et met en doute les perceptions ou les sentiments du protagoniste.
Le fonctionnement de la communication lui-même exprime
ces cohérences dans ce qui se produit comme dysfonctionnement.
On rejoint d’ailleurs là ces difficultés de communication
dont il a été question au 1er chapitre. Malgré
ces dysfonctionnements il y a toujours communication. C’est souvent
l’échec d’un ajustement dans d’autres champs qui se résout
à un conSensus dans ce champ de dégradation. Mieux
vaut quelquefois pour certains une mauvaise communication que
pas de communication du tout. C’est ce qui justifie notamment
la stabilité de ce type de relations. Elles se caractérisent
en outre par une inconscience particulière assortie à
une multiplication de pièges et faux semblants. Les partenaires
de ces jeux d’identités voient en plus les choses de la
couleur de leur cohérence personnelle, de ce qui se passe
et de la situation. Tout se ligue ainsi pour les enfermer dans
le même fonctionnement. C’est le cas bien sûr de
tous les champs selon le principe de stabilité mais aggravé
là par un degré d’inconscience particulièrement
fort, et sur les réalités et sur leurs Sens. Les
attitudes que l’on rencontre le plus fréquemment face
aux problèmes de communication consistent soit à
les nier ou les ignorer, en les déplaçant éventuellement,
soit au contraire à beaucoup en parler en les brandissant
comme une menace, une accusation ou une autocritique. En tout
cas cela sert à renforcer le Sens de la dégradation,
c’est-à-dire dominer ou subir. De ce fait, dans ce champ,
il vaut mieux éviter de se leurrer sur tous les discours
qui sont tenus ou leur absence, même sur le thème
de la communication.
c-3 – Les univers de la dégradation
Ces situations de communication et ces jeux d’identité
se rencontrent partout où domine la souffrance et les
malaises. Pas forcément d’ailleurs où on le dit.
Il faut à ce propos bien distinguer les discours de la
conquête qui parlent ou mettent en scène des signes
de la dégradation mais dont le Sens n’est qu’un effet
de dramatisation favorisant le spectacle, sa vedette et l’engouement
du public. Voir un film de guerre n’est pas la guerre. Par contre
la guerre est bien sur une situation de dégradation. Que
cette guerre soit chaude ou froide qu’elle soit visible ou cachée,
elle détruit les protagonistes. Bien des exemples montrent
la pseudo victoire du vainqueur. D’autres situations larges sont
celles des dictatures, qu’elles soient fascistes ou collectivistes,
les fondements n’en sont pas les mêmes mais leurs Sens
se rencontrent. Pour venir aux situations plus banales et moins
reconnaissables quelquefois il faut citer les entreprises et
les institutions où se posent des problèmes de
réalités matérielles, économiques
ou des problèmes de Sens, finalités, rapports humains,
direction, climat, menaces…
Le cas est assez fréquent. Au lieu de chercher des raisons
extérieures, il faut toujours un coupable. Il vaudrait
mieux examiner les jeux d’identités, conséquences
mais causes aussi de la situation. Malheureusement le champ de
la dégradation n’est pas celui de la clairvoyance mais
de l’occultation. Dans le monde des institutions les conflits
catégoriels permanents en sont aussi le signe là
encore comme conséquence mais aussi comme causes.
Les complicités inconscientes syndicat-patronat ne font
pas défaut quelquefois pour perpétuer les Sens
de ce champ dans d’habiles jeux d’identités symétriques
ou complémentaires. D’autres institutions ayant pour finalités
la contrainte, le contrôle dans le Sens de ce champ, ou
même la sécurité "obligatoire",
y fonctionnent volontiers. Y dysfonctionent devrait-on dire.
Il n’est pas utile de citer des exemples d’institutions en perpétuel
dysfonctionnement, et qui durent. Ces organisations favorisent
ces jeux d’identités mais leurs recrutements n’en sont
sans doute pas toujours exempts. Parmi elles, certaines peuvent
recruter beaucoup de dominateurs d’autres beaucoup de victimes,
ou les deux.
Des organisations aux fins charitables n’en sont pas non plus
absentes et on trouve dans ce champ des lieux où l’apaisement
des souffrances se transforme en éradication du mal et,
disent les mauvaises langues, du malade avec le milieu hospitalier,
psychiatrique ou non qui n’est pas toujours un modèle
par la qualité des relations humaines.
D’une manière plus générale, les situations
de dégradation proviennent souvent du réveil de
difficultés ou de tensions par l’échec d’un ajustement
dans d’autres champs. L’impossibilité de la présence
de deux N° 1 sur la même cause amène parfois
un "combat des chefs" qui entraîne celui des
militants et le territoire devient champ de bataille. C’est vrai
aussi si les militants perdent un chef et donc la cause qu’il
représente. Leur démoralisation en fait des victimes
désignées. Les militants de causes différentes,
si elles empiètent l’une sur l’autre, peuvent faire de
belles bagarres ou des conflits larvés.
L’échec des conquêtes peut aussi s’y retrouver.
Du champ de l’involution on verra plus loin les sources possibles
pour la dégradation.
Ce sont bien souvent les remises en question qui réactivent
l’insécurité et la dégradation ou encore
des caractéristiques personnelles qui font confondre ce
champ avec un de ses deux voisins.
c- 4 – Considérations théoriques et contexte
Le champ de la dégradation et les dimensions personnelles
qui s’y activent et réactivent touchent beaucoup et pas
de façon toujours très claire. On n’aime pas toujours
non plus reconnaître l’existence de ces situations et certains
les nient là où elles sont proches d’eux. C’est
peut-être l’occasion d’y porter une attention particulière
non pour s’en délecter, mais peut-être en démystifier
les procédures et en tout cas éviter de s’y laisser
prendre si on le souhaite.
Le champ de la dégradation se trouve dans la carte des
champs au croisement de deux des stades de développement
chez l’enfant : le stade oral qui couvre involution et dégradation,
le stade anal qui couvre dégradation et conquête.
Ce ne sont que des appellations dont le Sens ne résulte
que de l’isomorphisme avec leurs manifestations.
La dimension orale dans la dégradation se traduit notamment
par les angoisses de dévoration, de démembrement.
C’est le domaine de la mauvaise mère avec les représentations
d’étouffements et d’enfermements. Toute une énorme
part de la mythologie et des rituels qui l’accompagnent, décrivent
ces fantasmes angoissants en particulier dans toutes les religions
polythéistes ou dans celles où la principale déité
est féminine. Les mythes modernes angoissants comme ceux
de la jungle, la nature sauvage, la technologie, l’informatique
y sont fondés.
La dimension anale se manifeste particulièrement dans
les rétentions, le souci exagéré de l’ordre
mais aussi des fantasmes meurtriers et sadiques. Elle se manifeste
dans la production de matières isomorphes aux matières
"premières" de l’enfant, l’accumulation d’objet
mais aussi la destruction du Sens dans l’objectivation (la conquête
ne fait que l’ignorer). L’objectivation des êtres réduits
de force à l’état de numéro, d’objets, de
chair comme dans le "meilleur des mondes" ou dans le
fascisme Hitlérien (ou d’autres) est une réduction
de l’homme à l’état de matière. Matière
première pour la production d’où l’ambiguïté
est aussi celle de la revalorisation actuelle du corps. Même
si elle se justifie par ailleurs, elle contribue quelquefois
à cette "matérialisation" ou la différence
avec le déchet n’est pas très sûre.
Une autre manifestation se trouve dans ce qu’on appelle la massification
des foules. Le social valorisé par la conquête tend
ici à "prendre en masse" dans l’anonymat des
personnes dont l’être est nié au profit du collectif
massifié.
Une autre manifestation dans le champ de la dégradation
est celle de l’argent, soit accumulé, sale, soit l’argent
qui manque et que l’on ne cesse de consommer.
La dégradation est aussi le champ de la chute avec la
"faute originelle" où se manifeste le père.
Le mauvais père, menaçant, mais aussi menacé
sous-tend ce champ là. La représentation du pouvoir
dominateur en est une forme très actuelle qui suscite
bien des vocations et des révoltes. Entre les deux, la
même cohérence favorise la communication et même
l’échange des rôles. Après un dictateur,
une révolution amène souvent au pouvoir un autre
dictateur. Ce n’est pas un hasard, c’est une cohérence.
Les opposants bien organisés fonctionnent sur des schémas
étrangement similaires à ceux qu’ils dénoncent.
Seuls les discours changent, et encore… Une autre domaine dans
ce champ de la dégradation est celui des perversions en
particulier celle qui donne comme idéal amoureux dans
la littérature une passion destructive ou mise en échec.
Le macho comme la femme fatale en sont des figures inversées
mais de même Sens.
La crise du champ de la conquête se traduit par quelques
réémergences dans ce champ en particulier pour
ceux qui y étaient les plus impliqués : monde économique,
intellectuel, sportif, politique, religieux, institutions partout
où la crise est vécue comme une perte ou une mise
en question des valeurs du champ de la conquête. Ses dysfonctionnements
deviennent fonctionnement dans la dégradation. Pas toujours,
heureusement, et surtout pas fatalement.
d) Champ de l’Involution
Un peu plus de sécurité et de calme maintenant
avec ce champ et ses situations. En commun avec la dégradation
l’axe BAS, le détermine. Au milieu d’extériorisation
et négation du Sens on passe à Intériorisation
comme émergence du Sens. Le champ de l’involution est
dominé par les questions de Sens mais avec une certaine
négation des réalités.
d-1 – Les deux types d’identité
La position haute vers l’axe ETRE est qualifiée de "MATERNANT"
qui, comme son nom l’indique est maternel dans ses rapports à
autrui. Cela ne veut pas forcément dire féminin
pour autant. Le MATERNANT apporte chaleur et protection. Ce n’est
pas par dévouement mais par nature, même pas au
nom d’une cause mais par aisance. Il est distributeur d’attention,
de conseils, d’aides, de soutiens. Cette fonction de distribution
est toujours vécue comme nourricière. Le maternant
donne de la nourriture, des conseils ou de l’attention toujours
pour nourrir. Il se donne en nature sans en souffrir (dans ce
champ).
Le MATERNANT protège et en cela il entoure de sollicitude,
de prévenance, d’attentions encore et ce faisant évite
les difficultés et les conflits. Il écarte le danger
(et réussit toujours). En outre, il rend service et se
met en quatre pour faire plaisir. Compatissant il sait écouter
les autres et ne manque pas de leur demander des nouvelles de
leur famille, de leur week-end. Son approche des gens est très
sécurisante et chaleureuse, il est toujours sympathique,
tout en rondeurs, et cherche à mettre à l’aise.
Il est aussi tranquillisant et de ce fait peut tendre à
endormir la vigilance, à atténuer les tensions.
Mais dans tout cela il évite à l’autre et à
lui la confrontation aux réalités. Bien-sûr,
beaucoup de parents, de mères notamment jouent ce type
de rôle auprès de leur enfant et on sait que ce
n’est pas au profit de l’enfant. Il est tellement protégé
que sa confrontation aux réalités risque d’être
très difficile. Pour le maternant tout va assez bien,
il arrange les choses et tend à ne pas voir ce qui ressort
des autres champs (ce n’est pas nouveau).
En particulier le mal comme les mobiles de la conquête
lui apparaissent peu vraisemblables. il en nie les réalités.
Sa confiance dans les autres, du moins leur Sens, est très
importante, au moins en apparence. Un patron de ce type se considère
comme responsable de ses employés qui sont là pour
l’aider. Il les prend en charge et se soucie de leur distribuer
régulièrement leur rémunération avec
toujours quelques primes en plus. Il évite de trop leur
poser de problèmes et se trouve lui-même très
chargé. De toute façon il n’a pas d’ambition expansionniste`,
mais vise la stabilité, la sécurité, le
confort. Il est plus soucieux de bonnes relations que de conquêtes,
de nouveaux marchés. Il ne rate pas une occasion pour
organiser une fête, un "pot" et en définitive
arrive ainsi à se faire aimer. C’est ce que vise le maternant
dans tout ce qu’il apporte et ses prévenances. Il a tendance
à approuver les autres et les conseiller.
La tendance d’identité complémentaire est de type
ENFANT. Indépendamment de l’âge bien sûr,
l’enfant attend et réclame satisfaction de ses besoins
et de ses désirs. Il est guidé par sa recherche
du plaisir, du confort, de la sécurité. Ce confort
il le trouve dans le familier, la conformité, les choses
petites. Une petite maison, avec un petit jardin, une petite
voiture, etc…"small is beautiful" si ce n’était
un slogan à la mode, bien conquérant, parlerait
bien de ce que considère l’ENFANT. Sa recherche du confort
lui fait prendre des habitudes rituelles et éviter tout
changement dans son rythme de vie plutôt lent. Il cherchera
dans son activité professionnelle la sécurité,
l’ambiance sympathique, la régularité, le confort
plus que la passion, l’argent, la carrière ou la soumission
à une obligation. Il vit bien son train train quotidien
et ne souhaite pas en changer. La recherche du plaisir, sensuel
et affectif lui fait apprécier les choses de la table,
simples mais copieuses et savoureuses, les matériaux à
toucher ou à regarder l’activent beaucoup. Il y a d’ailleurs
une forte sensibilité. Il aime rire, jouer moins pour
distraire que pour le plaisir de la rencontre avec d’autres.
Il a aussi tendance à rêver, au prince charmant
ou à la belle jeune fille. Il rêve de vacances,
de plages et de soleil mais aussi de projets de société
communautaires. Ces rêves ne deviennent jamais réalité.
Leur seule réalité en est le fantasme. L’ENFANT
est peu critique à l’égard du monde ou gentiment.
Il ne se sent pas concerné par les grandes causes ni par
les luttes pour lui incompréhensibles alors qu’il lui
suffit de jouir de son petit confort. Il tend d’ailleurs à
penser que tout le monde est pareil et ignore les complications
hiérarchiques.
Il communique favorablement avec son complément MATERNANT
qui ne demande que ça. La communication est alors au delà
des mots. C’est plus une question de confiance, d’affection,
de chaleur que d’expression et d’information. Ce qui compte c’est
la sympathie. L’ENFANT cherche aide, confort et plaisirs auprès
du MATERNANT mais n’a pas besoin de beaucoup de démonstration.
Il lui suffit qu’il soit là, à disposition. S’il
ne sollicite pas assez, le maternant peut s’inquiéter
et va le faire à sa place.
Cette relation est classique dans les couples familiaux avec
d’ailleurs inversion des rôles entre l’homme et la femme
selon les cas ou les circonstances. L’inversion se retrouve dans
les hiérarchies qui sont néanmoins rarement développées
dans ce champ. Le "responsable" prend en charge ses
aides qui le lui rendent en cas de pépin.
Examinons maintenant les relations symétriques MATERNANT-
MATERNANT d’abord. Tous deux en position haute, elles correspondent a beaucoup de discussions entre amis, entre parents où
on parle des choses d’un ton parental, mais d’une manière
positive. On parle pour se faire plaisir et pour se placer dans
son rôle. Ainsi on parle volontiers des ENFANTS et on se
reconnaît ainsi mutuellement comme MATERNANT. On peut ainsi
entre "grands" (mais ce mot est petit ici) parler avec
gravité de choses banales et sans problèmes. Sur
ce processus, se déroulent beaucoup de ces conversations
de couloir, en famille, entre amis, à la campagne. On
ne cherche pas à briller, ni a critiquer mais simplement
à converser. Cette conversation à deux peut très
bien s’étendre sans problèmes à d’autres.
Les sujets restent très proches de l’involution, on évite
les thèmes délicats, compliqués, scandaleux
et toutes les banalités sont bonnes pour alimenter ce
plaisir. Un peu de thé avec des petits gâteaux ou
un bon repas ne gâtent en rien la situation au contraire.
De même les lieux confortables ou apaisants.
Les relations ENFANT-ENFANT sont plus remuantes, elles consistent
en jeux qui déjouent les réalités pour en
tirer plaisir. Les relations enfants-enfants sont plus directement
d’expérience et de recherche de plaisir sensuel. A condition
que toutes les précautions soient prises, on expérimente
toute sorte de" voyages" mentaux ou sensoriels, on
peut refaire le monde sans que cela prête à conséquence.
On peut aussi privilégier une relation avec la nature
dans la nature. La nature est d’ailleurs un substitut du MATERNANT
comme de L’ENFANT, l’un et l’autre y trouve un partenaire pour
"communiquer avec la nature" la protéger ou
en être nourri. C’est l’une des tendances fondatrice de
l’écologie. Dans les relations ENFANT-ENFANT, elle représente
la présence maternante. De ce fait ces relations symétriques
se trouvent particulièrement activées à
la campagne, dans certains clubs de vacances, ou les lieux de
vacances en général. Une certaine rusticité
favorise la simplicité des rapports sous réserve
de confort et d’abondance. Ces relations enfant-enfant se rencontrent
bien sûr en famille mais aussi dans certaines attitudes
professionnelles où les mobiles ne sont guère productivistes.
La répétitivité sans cadences accélérées
les favorise d’autant plus que quelques petits changements laissent
l’impression de découverte et de jeu. La gratuité
est toujours importante et il ne faut pas d’enjeux graves ou
pressants.
d – 2 – Vision du problème de la communication
La communication ne se parle pas, elle se vit. Cependant ce que
recouvre ce concept ici est limité au Sens et se trouve
bien embarrassé des réalités. La communication
y est une affaire de feling, de confiance, de sympathie, de tendresse,
de sensibilité, de sensualité. Ce n’est pas considéré
comme une question d’information, de message, d’expression. Tout
cela étant bien compliqué. Ainsi les "problèmes"
de communication y sont-ils peu compréhensibles. Telle
qu’elle se déroule ce qui se dit ou se montre n’a pas
beaucoup d’importance, ce qui compte est ce qui se sent. Par
contre, la parole peut y être considérée
comme un don et l’expression "distribuer de bonnes paroles"
y a tout son Sens. Les paroles sont de conseils, des appuis,
l’objet de jeux ou plaisanteries. Elles sont aussi futiles, l’ambiance
et ce qui se passe au delà des mots paraissent plus importants.
La communication entre les êtres est considérée
comme immédiate, les mots et les signes sont presque en
trop et on ne s’en soucie pas, la confiance et la bonne volonté
sont sensées suffire. Elles ne suffisent que pour ce champ
bien sûr.
Communication est aussi affaire commune, c’est ce qui relie,
qui met en commun, en communication les êtres. C’est aussi
ce qui en nie les limites, les distinctions, les différences.
Le processus de communication est vu comme la relation naturelle
entre les êtres au-delà de leur séparation
et aussi de leur réalité.
c – 3 – les univers de l’INVOLUTION
Ils ont déjà été cités pour
certains, mais il est bon d’y revenir. L’univers familial en
est le modèle et on pourrait y reconnaître bien
des situations privilégiées. Au passage, le rôle
maternant est aussi bien tenu par l’homme que par la femme vis-à-vis
des enfants ou du conjoint. Il faut noter aussi que quelquefois
le rôle MATERNANT est dévolu à l’enfant et
celui d’ENFANT au parent. Ce cas n’est pas si rare et intéressant
à observer. Ce milieu familial est reproduit dans bien
d’autres circonstances. Quand l’entreprise devient "la maison"
on retrouve ces cohérences. C’est vrai aussi de beaucoup
d’institutions qui prennent en charge leurs membres avec beaucoup
d’assistances. Les associations de toutes natures sont très
souvent la reproduction de milieux chaleureux familiaux à
la fois ouverts et fermés. Ouverts pour ne pas être
trop cloisonnés, le nombre évite les distinctions.
Fermés pour être clairement protégés
des intrus et troubles fêtes.
D’autres formes d’associations coopératives, mutualistes
ont (surtout dans le passé) correspondu à de telles
tendances. Les réalités économiques en ont
bien vite fait autre chose dans d’autres champs.
L’enseignement, l’école ont été aussi beaucoup
dans ces cohérences, en particulier dans les milieux ruraux,
plus favorables à l’involution que les concentrations
urbaines. Tous les retours à la nature lorsqu’ils ne sont
ni une question de mode, ni une question de combat cherchent
à rétablir une "communication", une relation
plus symbiotique. Ce champ s’oppose à la conquête
dont il est l’envers. Ils en rend dérisoire les ambitions
et les mythes. C’est quelquefois l’opposition (sans conflit)
entre l’univers masculin extérieur et l’univers féminin
intérieur.
L’Involution est en effet à considérer comme univers
plutôt féminin où l’homme y joue plus favorablement
le rôle d’ENFANT. Les espaces protégés sont
d’ailleurs dans la langue très souvent féminins.
On peut parler du giron de l’entreprise, d’une institution, d’une
organisation. Elles ne sont pas causes idéales à
défendre ou conquérir mais lieu qui entoure, protège
et nourrit. C’est aussi lieu familial où sont rassemblés
les enfants, une sorte de jardin d’ENFANTS, celui de l’Eden peut-être.
d – 4 – Considérations théoriques et contextes
Le Sens de l’involution est celui d’un retour à la matrice,
au lien du sang et du Sens. Il exclue toute la part qui se retrouve
dans la dégradation avec ses problèmes de limites,
de dévoration, d’étouffement, etc… Seuls restent
là les plaisirs et jouissances. C’est le domaine de l’oralité
avec le souvenir et la recherche du sein maternel, source de
toutes abondances et satisfactions. Tout ce qui est nourriture
rappelle ce passé paradisiaque qu’il s’agit de retrouver.
Le terme de régression convient si on n’y englobe pas
ce qui ressortit d’autres champs. Les liens affectifs ou émotionnels
peut différenciés y éclosent, accompagnés
d’une grande inconscience des réalités. L’autre
est source de plaisir, de nourriture ou de chaleur, mais pas
un être matériel.
Il est à disposition ou l’inverse qui revient au même.
Il y a sentiment de possession d’autant plus facile qu’il n’y
a pas de limites concevables. Il n’y a pas non plus de mesures,
que celles du plaisir. Ainsi les choses y doivent être
gratuites et disponibles.
Le retour à la mère est aussi bien joué
par les deux partenaires en relation complémentaires.
C’est déjà sans doute le mobile de bien des maternités
ou paternités maternantes.
Le monde de l’involution est fusionnel et symbiotique ce qui
explique l’immédiateté des communications telles
qu’elles y sont vécues. On se comprend à demi mot
ou sans mot du tout. Les groupes, les espaces clés rappellent
le monde protégé originel et plus généralement
tous les contenants et les contenus sont isomorphes de ces Sens.
De même le sont toutes les sources de chaleur physique
ou affective, les foyers.
Pour revenir à l’inconscience paradisiaque, elle s’oppose
à la raison considérée comme froide et discriminante.
Effectivement elle objective, ce qui est redouté ici.
Il faut plutôt s’attendre à une logique dite féminine.
Toute une part des figures mythologiques et symboliques féminoïdes
se retrouvent dans ce champ avec l’eau, la mer, les écrins,
et les histoires de bonnes fées, de jeunes filles, d’enfants.
Tous se passe ici sans drame. Le monde de l’enfance est imaginé
comme de l’Involution, même s’il ne l’est pas toujours.
Ce passé est valorisé comme idyllique de même
que la nature, le pays natal, la maison.
Historiquement, la vision de l’homme à l’état de
nature est de ce champ. Soit l’homme préhistorique ou
des âges anciens, soit aujourd’hui les "bons sauvages"
dont la quête exotique est toujours présente. La
forêt vierge, la caverne pré ou post platonicienne
comme sites naturels réactivent les Sens de l’involution.
La présence du thème de l’éducation des
enfants et de l’enseignement est à considérer comme
l’accès naturel à la connaissance universelle comme
bien primordial et aussi nourriture. Cela va avec des conceptions
pédagogiques très humanistes fondées sur
une communication immédiate des connaissances. Cela s’accompagne
volontiers d’une grande méconnaissance générale
des réalités au profit d’un savoir faire limité
à la survie et au maintien des satisfactions immédiates.
Tout cela alimente bien des nostalgies qui se résolvent
quelquefois malheureusement dans la dégradation. En fait
les tentatives d’institutionalisation des rêves de l’involution
les mettent en question. Le rêve devient cause commune
et on passe en face, d’où la nostalgie. Pour concilier
les deux c’est la dégradation qui émerge avec échecs
relatifs sur tous les plans. Une grande partie de l’humanisme
s’est fourvoyé dans ces deux champs en se faisant cause,
idéologie, morale ou en devenant revendicatif, intolérant,
manipulateur.
Les réalités de l’involution se trouvent beaucoup
moins dans les grandes choses que les petites. Les microcosmes
que l’on se crée autour de soi, au bureau, à la
campagne, chez soi, y sont souvent destinés. Les petites
choses de la vie en font alors la trame, toujours dans une tendance
au repli et au ralentissement.
e) Champ de l’accomplissement
Avant d’aborder ce champ, il faut faire quelques remarques sur
ses spécificités. La plus importante est que ses
Sens n’ont pas beaucoup de place dans notre culture sauf dans
des milieux restreints. La conséquence en est qu’il n’est
pas facile d’en parler dans des situations de la vie courante.
Les images et représentations seront quelques fois à
chercher dans des tendances extrêmes qu’il faudra savoir
ramener à leur juste place. La plupart des typologies
des sciences humaines ignorent ou nient ce qui ressortit de ce
champ. D’autre fois c’est évoqué comme idéal
évident, allant de soi alors que cela aussi à bien
besoin d’être détaillé. (depuis 1980 le
monde a évolué et ces valeurs paraissent moins
incongrues)
Par exemple, l’idée de s’accomplir dans sa vie est très
vite renvoyée dans les autres champs, réussite
sociale, confort et sécurité ou encore échec
et pessimisme systématique. La vie est une conquête,
une lutte ou une simple participation à la nature dont
il faut tirer le plus de jouissances. L’accomplissement de son
être n’y est pas représenté et si on sait
assez bien comment, dans la vie courante se développent
les trois autres champs, pour celui là il n’y a que des
exemples extrêmes, tellement lointains qu’il paraissent
irréalistes. Or l’accomplissement est aussi le Sens que
prennent et peuvent prendre des situations de la vie quotidienne.
Il faut pour cela commencer à revoir les rapports au monde.
Par rapport aux autres champs, celui de l’accomplissement est
celui de la prise de conscience (élucidation, clarté…)
du Sens des réalités.
Cela amène à une particularité du champ
de l’accomplissement dans le rapport aux réalités.
Elles sont toujours l’occasion de connaissance de soi, d’élucidation,
d’enrichissement. En tant qu’activité professionnelle
ou modes de vie, les réalités sont celles des voies
d’accomplissement que l’on s’est choisies ou d’une discipline
de vie (pas aux Sens des autres champs bien sûr).Dans cette
optique les réalités dans les rapports entre personnes
servent véritablement à l’enrichissement des personnes,
c’est-à-dire notamment à une meilleure connaissance
de soi et une conscience des réalités.
En tant que médiatrices de la communication (R et S),
les réalités sont aussi oeuvre commune. L’oeuvre
est ce que la connaissance permet de réaliser et dont
la réalisation enrichit la connaissance. En définitive
les expériences dans les champs de l’accomplissement sont
toujours destinées à enrichir "l’expérience"
et ainsi être mieux expérimentées, etc…
C’est ce mouvement qui constitue l’accompagnement qui se joue
dans le rapport à l’autre.
e -1- Les deux types d’identité
Dans la position haute vers l’ETRE , c’est de lui-même
que l’individu donne Sens et réalités. Cela définit
le MAITRE. La maîtrise consiste d’abord à posséder
la connaissance de quelque chose, d’une réalité,
c’est-à-dire d’en "avoir le Sens" c’est à
dire conscience de ce Sens en soi-même. Elle est toujours
"es" quelque chose et ce peut être aussi bien
d’une discipline spirituelle que d’un art, ou d’un savoir faire
quelconque aussi "banal" soit-il. Cette maîtrise
implique celle du Sens et des réalités simultanément
ou encore de la théorie et de la pratique.
Théorie étant pris pour connaissance consciente,
pratique pour modalités d’opération. De ce fait
le maître peut professer. Cela veut dire enseigner comme
professeur, cela veut dire aussi exercer sa profession. Cette
maîtrise doit être bien distinguée de ses
avatars dans les autres champs.
Dans la conquête il n’y a pas le Sens,
savoir sans âme, théorie et pratique déconnectées
(la théorie est un simple discours). Les pratiques personnelles
et professionnelles sont fonctions d’images extérieures
à soi (des modèles) et non pas fondées en
soi-même (connaissance). Maître est synonyme de chef-vedette,
le meilleur sur une cause, celui qui en a les insignes.
Dans la dégradation , c’est un faux maître
qui dit avoir une maîtrise mais la confond dans son fonctionnement
avec la force et la pression exercée sur les autres (et
sur lui).
Il dit savoir se maîtriser alors qu’il se contient et empêche
ou s’empêche.
Dans l’involution , la maîtrise est limitée
à la sensibilité, l’intuition ou le sentiment.
On s’en contente mais les réalités, les réalisations
n’adviennent pas. La "maîtresse" d’école
par exemple, qui couve ses petits élèves, ne leur
permet pas de grandir, de se développer. Le maître
confond ici sa bonne volonté avec les capacités
que donne la véritable maîtrise.
Le MAITRE connait et se connait : s’y connait dans sa partie.
Il en a le savoir-faire. Les deux, savoir et faire sont réunis.
Le concept de métier est fondé sur l’expérience
intégrée d’un savoir-faire, c’est-à-dire
sur la conscience de sa cohérence et de ses réalités.
Un enseignement est aussi une cohérence et ses réalités
que connait le MAITRE. Un art est fait d’une sensibilité
qui s’exprime dans une expression juste. La maîtrise consiste
justement dans cette justesse qui implique la conscience de son
Sens, sensible. Un savoir quelconque, aussi vaste ou limité
soit-il, peut être objet d’une maîtrise. Au lieu
du geste mécanique le maître en possède toutes
les finesses et le Sens. De ce fait, il sait faire vivre son
art, c’est-à-dire l’adapter à toutes les situations
et les circonstances. Il le peut parce qu’il en a connaissance
= conscience du Sens.
Ce n’est pas le cas s’il n’y a qu’imitation des formes ou vague
intuition. Faire la cuisine, jardiner, tenir une comptabilité
peuvent constituer l’art dans une maîtrise, mais ce n’est
pas parce que l’on sait faire cuire un oeuf que l’on est maître.
Ce n’est pas parce que l’on sait faire un bilan que l’on est
maître, ce n’est pas non plus parce que l’on est expert.
Celui qui sait rouler à bicyclette peut être incapable
d’enseigner, de former quelqu’un, d’en faire une théorie,
d’en être professeur ou en faire profession. C’est ce que
la "connaissance" du MAITRE lui permet. Il peut parler
de son art, le communiquer, le pratiquer et l’enseigner.
La maîtrise n’est donc pas liée aux dimensions ou
à l’importance sociale d’une chose mais à la "connaissance"
du Maître qui la possède parfaitement.
Le Sens de l’accomplissement consiste, dans l’exercice de la
maîtrise, à en approfondir sans cesse le Sens et
en étendre le champ. Une maîtrise est une voie d’accomplissement.
L’expression "trouver sa voie" consiste à découvrir
le champ possible de sa maîtrise personnelle.
Avant de devenir MAITRE, il a pu être nécessaire
de se chercher, par exemple, passer en position BASSE par un
apprentissage. Cette position se définit sur l’axe NON-ETRE.
La personne prend Sens et réalités.
Les modalités en sont extrêmement variées
et peuvent recouvrir la totalité des situations de la
vie (comme les autres champs d’ailleurs). Le terme choisi pour
ce type de fonctionnement est celui de PRATIQUANT. C’est celui
qui s’enrichit, se construit, se développe, s’accomplit
en utilisant, en se servant des produits et pratiques de la maîtrise.
Le PRATIQUANT peut être disciple, élève,
étudiant, apprenti, fidèle, mais utilisateur d’un
service, d’un produit, employeur par exemple, acheteur et même
consommateur.
Là aussi les domaines sont vastes ou restreints et peuvent
être triviaux ou très exceptionnels. Ce qui les
distingue des autres champs, c’est que le PRATIQUANT suit une
pratique et s’y accomplit, s’y construit, prend Sens et réalités
à la fois. Ce n’est pas très évident quand
il s’agit de quelque chose d’aussi courant que manger. On peut
manger dans tous les Sens de la carte de cohérence. Ici,
manger consiste à répondre au besoin de nourriture
du corps selon une certaine discipline alimentaire. Comme dans
certaines traditions, suivre une ligne de conduite alimentaire
consciente est un acte important de son fonctionnement personnel.
On peut aussi ne manger que pour le plaisir des sens (involution),
ne manger que par obligation ou restriction (règlement,
régimes, gavages, dégoûts, famine…) ne
manger enfin que par habitude, par convention selon des modes
(rituels, "dîner en ville", "nouvelle cuisine"
diététique "objective"). C’est la même
chose de tout usage.
Le PRATIQUANT est celui qui prend aussi Sens, de ce qu’il emploie,
de ce qu’il fait. C’est le Sens de son accomplissement et de
son fonctionnement. Prendre Sens peut consister à apprendre,
à comprendre, à prendre conscience, à prendre
plaisir-Sens, à prendre goût, à s’alimenter,
à prendre-forme aussi. C’est à la fois se chercher
et se construire. Se connaître en empruntant des méthodes,
pratiques, instruments, rites, produits issus de l’art du maître.
Le maître trouve en lui-même le Sens de son art,
le pratiquant se cherche et chemine selon les pratiques d’un
maître. De ce fait il ne se définit que par rapport
à une maîtrise et ses fruits. C’est aussi l’amateur,
celui qui n’est pas "professionnel" mais en utilise
les pratiques, en utilise les produits. D’une manière
ou d’une autre il s’en sert, il en prend le Sens.
Envisageons maintenant les jeux d’identités de ce champ
en commençant par la relation complémentaire MAITRE-PRATIQUANT.
Elle est complémentaire si elle a même cohérence.
D’une manière générale, le pratiquant progresse
dans une prise de conscience de ses réalités et
de leur Sens grâce au conSensus du maître. En psychanalyse
cela s’appelle le transfert. Dans un enseignement le professeur
parle, l’élève entend, s’exerce et le professeur
vérifie, ajuste, corrige. En fait, il donne aussi conSensus
à ce que fait l’élève et qui prend Sens
pour lui. C’est autre chose que dans la conquête ou le
Sens de ce qui est appris est ailleurs, ce qui donne savoir sans
connaissance, capacité de répétition conforme,
de référence sans savoir-faire. Un autre exemple
de cette relation complémentaire est celle de l’oeuvre
utilisée par le pratiquant. Dans ce champ elle n’est transmise
de l’un à l’autre que parce qu’elle sert selon ses Sens,
ses fonctions. Par exemple une oeuvre d’art achetée par
un amateur, pratiquant, pour les impressions que cela donne et
non pour le matériaux, le temps passé, la notoriété
de l’artiste ou un caprice passager. Cette oeuvre acquise contribue
pour lui à son accomplissement, lui permet de s’y trouver,
de s’y connaître.
Le rôle des parents vis-à-vis de leurs enfants pourrait
se définir dans cette relation complémentaire.
L’enfant PRATIQUANT la vie selon des modalités familiales
et de l’environnement, les parents expliquent, donnent Sens,
nourrissent son cheminement.
Dans la relation MAITRE-PRATIQUANT une chose peut paraître
étonnante : le MAITRE est le serviteur. Il est
disponible, au service de l’autre. Le conSensus s’établit
à partir de l’expérience du PRATIQUANT et non celle
du maître. De ce fait celui-ci doit être à
l’écoute, disponible, au service de celui qui apprend
ou qui attend un service. Il n’y a service que s’il y a conSensus
et ce conSensus dépend des deux partenaires. Le maître
ne peut imposer ses services, il ne peut que les proposer. La
mesure de ce service du maître au pratiquant, élève
ou client, disciple ou amateur, dépend surtout de ce que
peut recevoir ou veut recevoir ce dernier. Cela amène
à la question du prix payé par le pratiquant pour
le "service" du maître. Ce service, produit,
enseignement, oeuvre, ne vaut que par le conSensus établit
et donc par la réalité de ce conSensus exprimé
dans la matière d’échange. Le prix est une réalité
homologue au service, c’est-à-dire de mêmes Sens
: la cohérence de la relation consentie.
Si le pratiquant ne tire rien de la relation, il n’y a pas de
prix. Le prix d’un service n’est pas celui d’une quantité
de temps, de matériaux, ou une question de rareté,
mais uniquement une question de conSensus établi. Il ne
peut être négocié. Le fixer à l’avance
indique ce que veut prendre le pratiquant (prendre Sens), le
maître reste disponible.
Une situation qui peut nous paraître étonnante dans
notre culture est celle qui fait que celui qui paye est en position
basse et celui qui produit, est au service, est en position haute.
De ce fait par exemple l’employeur est PRATIQUANT de la MAITRISE
de ses ouvriers qui peuvent avoir leurs apprentis, autres PRATIQUANTS.
De même le client est PRATIQUANT du fournisseur, celui
qui achète est en position basse. Précisons qu’il
s’agit toujours de ce champ de l’accomplissement où on
a précisé la relation de "service" considérée.
Le maître donne Sens et réalité, il amène
ou alimente le PRATIQUANT qui le paie pour cela selon la monnaie
d’échange et la valeur consentie. Le contrat et ses termes
service-prix ne sont toujours que des formes homologues au conSensus.
Une dernière chose à noter, comme dans les autres
champs le changement de position est possible pour un individu.
Par exemple un PRATIQUANT dans une discipline peut aussi être
à un autre moment MAITRE dans une partie de cette discipline
et être au service d’un autre PRATIQUANT.
C’est toujours dans la relation que se définit la position.
Un professeur peut très bien continuer à apprendre
dans sa discipline tout en enseignant par ailleurs. Le MAITRE
peut toujours se perfectionner pour élargir ou approfondir
son champ de maîtrise. Il devient alors PRATIQUANT avec
un autre MAITRE plus avancé.
Passons maintenant aux relations symétriques en commençant
par la position haute MAITRE-MAITRE. Il s’établit aussi
une relation de conSensus avec cette fois-ci non pas service
rendu mais oeuvre commune.
La relation est de conception dans le croisement des maîtrises.
Elle est aussi de génération. La communication
porte des fruits, une production qui nécessite la maîtrise
des deux partenaires. Deux professionnels peuvent créer
ensemble de même que deux professeurs. Ce croisement est
le plus riche pour créer de nouvelles réalités
: les bâtisseurs de cathédrales en ont laissé
la trace mais aussi bien d’autres aujourd’hui. L’oeuvre commune
peut être un service pour des PRATIQUANTS. De ce fait ce
peut être une entreprise. L’entreprise est alors, dans
ce champ, la relation de maîtres dans le conSensus (les
Sens communs) qui peut être établi dans leur maîtrise
(professionnelle). L’entreprise se définit par la cohérence
de ses maîtres et non celles des pratiquants éventuels.
La "politique commerciale" d’une telle entreprise ne
pourrait être que de proposer ses services à des
personnes qui pourraient en être PRATIQUANTS. Le conSensus
dépend d’eux aussi. Revenons à la relation symétrique
entre MAITRES pour noter qu’elle pourrait être aussi celle
de la relation homme-femme dont le produit l’enfant commence
par être le fruit de leur reproduction avant de devenir
éventuellement PRATIQUANT de ses MAITRES, parents ou autres.
La relation symétrique PRATIQUANT-PRATIQUANT est une relation
de participation commune à une même discipline qui
en donne la cohérence. Si les partenaires restent dans
cette position il y a communion dans le Sens et les réalités
de la situation. Il y a de ce fait communication satisfaisante
sur leur pratique commune. Elle est de reconnaissance mutuelle,
condisciples, association de consommateurs, mais aussi de conSensus
sur leurs réalités mutuelles. C’est ce qui peut
faire une assemblée d’élèves, une association,
où on parlera essentiellement de la discipline commune
et où on en tirera jouissance. Il peut se présenter
des problèmes si les pratiquants n’en sont pas au même
degré sur leur pratique où s’ils sont de disciplines
différentes. Dans ce cas, il risque de ne pas s’établir
de conSensus et donc pas de relation, ou relation sur un conSensus
d’un autre champ. A quoi cela sert-il une relation de ce type
? A conforter chacun dans son cheminement et à se co-activer.
La communication établie sur une cohérence commune
renforce l’activation de cette cohérence et la surdétermine
et ainsi l’implication dans la pratique. Ce "soutien"
de l’autre ou des autres, qui n’est pas un apport mais une présence,
est particulièrement important pour pratiquer le plus
favorablement possible. Dans un groupe de travail ou d’étude
c’est ce qui se passe. Autre chose que la compétition,
c’est une relation d’émulation mutuelle où ils
peuvent s’exercer à leur pratique.
e – 2 – Vision du problème de la communication
Elle est ici envisagée dans toutes ses dimensions. La
communication, tout d’abord est indissociable de sa finalité
et de son efficacité. Ce n’est pas la désignation
d’un état mais d’un mouvement par lequel s’accomplissent
les personnes dans leurs réalités, oeuvres, apprentissages,
etc… On doit donc toujours se poser la question du Sens de
cette communication, de son intérêt. Communiquer,
c’est agir ! Voilà quelque chose de très
important. En effet si l’on regarde les différents types
de relation, pour chacun à son niveau, la communication
est action qu’elle soit de parole, d’étude, de production,
d’émulation, d’exercice, d’entreprise, de génération,
etc…
La relation dans le champ de l’accomplissement intègre
justement les trois dimensions personnelles, fonctionnelles,
situationnelles. De ce fait, l’accomplissement personnel est
aussi le Sens des circonstances, organisations, entreprises,
éléments de la réalités. La situation
n’est rien d’autre que la scène de l’évolution
des personnes. La troisième dimension, fonctionnelle,
est le processus de l’accomplissement des précédentes.
L’accomplissement de l’oeuvre ou des personnes n’est rien d’autre
que l’action par et dans la communication. Si l’on observe la
plupart des activités collectives, on s’aperçoit
que tout ce que l’on appelle action n’est rien d’autre que le
déroulement d’ensembles de communications dont les réalités
sont pour beaucoup verbales, de transmissions de données
ou d’assemblages de matériels. Seule l’oeuvre strictement
individuelle, accomplie par le maître n’est pas le fruit
immédiat d’une communication. Cela n’est pas très
fréquent dans la plupart des activités courantes.
La conséquence de l’identité de l’action et de
la communication fait que, dans ce champ, le travail sur les
relations et leurs modalités est essentiels. C’est le
cas de la relation thérapeutique, pédagogique,
mais aussi commerciale, de production et encore la relation de
couple, parent- enfant, les relations de groupes, etc…
Le premier type de relation MAITRE-PRATIQUANT est conduit par
le MAITRE, il vise à l’élucidation du Sens de la
communication établie pour le pratiquant. Le Maître
en est déjà plus conscient, c’est pour cela qu’il
a une certaine maîtrise. Pour cela, dans sa discipline,
le maître propose une pratique, des règles, des
réalités. Leur pratique par le pratiquant lui permet
d’établir conSensus avec le Maître et d’en connaître
ainsi les réalités, puis le Sens. Entre MAITRES,
c’est directement l’établissement de la communication
qui est créateur. En effet, les réalités
produites dans l’échange, appartenant à R ou S,
de par la conscience de leur art, de leur cohérence par
les partenaires, ont la possibilité d’être pérennes.
C’est ce qui en fait une production maîtrisée, une
production nouvelle mais qui est en cohérence avec la
situation de réalisation. Ce sont les deux conditions
de la création: qu’elle soit maîtrisée et
qu’elle ait sa place dans la situation. Le processus de communication
entre PRATIQUANTS est plus courant. L’enjeu est important pour
le cheminement personnel des partenaires mais n’est pas créateur
de réalités nouvelles. Ce n’est pas un processus
de production mais d’entraînement, de préparation.
La communication est ainsi dans ce champ équivalente à
l’action avec effet principal :
– D’activation dans la relation PRATIQUANT-PRATIQUANT.
– De maturation dans la relation MAITRE-PRATIQUANT.
– De création dans la relation MAITRE-MAITRE.
e -3 – Les univers de l’accomplissement
Ils pourraient être tous les univers de la vie. Dans notre
culture ils se sont réduits à peu de choses qui
en sont souvent simulacres. Les religions ont en principe ce
Sens avec leurs Maîtres spirituels ou temporels, prophètes,
prêtres, mystiques, etc… Leurs rituels sont souvent des
processus de maturation MAITRE-PRATIQUANTS ou de communication
et d’émulation dans les exercices et assemblées
de fidèles. Dans la champ de la conquête, elles
ont beaucoup perdu leur Sens et, leurs communications leurs fonctions.
La crise de la conquête avec le "retour du religieux"
manifeste un renversement de tendances.
Un autre univers, non sans une grande diversité de Sens,
est celui des pratiques psychanalytiques, de développement
personnel ou de psychothérapie associées à
des apports de traditions diverses. Il n’est pas facile de s’y
retrouver dans le fratras des théories, des pratiques
et des modes. Il y règne beaucoup de pseudo-maîtres
qui ont confondu synthèse personnelle et syncrétisme.
La panoplie de référence qui s’utilise parle plus
du champ de la conquête que de celui-ci. Au nom de l’accomplissement,
la dégradation s’y déploie volontiers, le mensonge
y règne.
L’enseignement et la formation pourraient constituer un univers
privilégié. Il est loin de cela, particulièrement
ancré dans la culture dominante il la suit plutôt
qu’il la précède. C’est cependant là qu’on
peut aussi attendre et repérer des expériences
et des développements de ce champ. La relation pédagogique
dominante est plutôt de type behavioriste dans la droite
de la carte des champs. Les tendances de l’accomplissement ont
à subir bien des détournements avant de se diffuser
et donner leurs véritables résultats. Cela tend
à se produire malgré les oracles pessimistes de
la crise.
L’entreprise actuelle n’est pas en général un terrain
bien propice à ce champ. Cependant avec les questions
provoquées ou libérées par la crise leurs
finalités et donc leurs Sens peuvent évoluer. Même
si des crispations d’un champ opposé se manifestent, il
s’en dégage aussi dans ce champ, sans fureurs ni fracas,
mais sûrement. La modification des rapports au travail
n’est pas à regarder que d’une manière pessimiste,
au contraire. C’est peut être le moment où des discours
déjà bien anciens pourront s’accomplir réellement
ou reprendre place autrement que dans des plaintes nostalgiques.
Le métier, la profession disparaissent d’une part, mais
réapparaissent autre part.
On repense à former des hommes plutôt que des experts,
des spécialistes ou des manoeuvres. Certains repensent
reprendre maîtrise donc autonomie.
Un dernier univers de l’accomplissement pourrait bien être
la famille. Ses crises, convulsions, pseudo changements aussi
cachent de véritables évolutions qui sortent des
modèles de la conquête sans forcément tomber
dans les champs du bas. Que la famille devienne un lieu de maîtrise
et d’accomplissement ne ferait que renouer avec ce qu’ont de
fondamental des relations sexuées et aussi la reproduction
et l’éducation des enfants. C’est banal mais essentiel
en particulier, dans ce champ.
e-4 – Considérations théoriques et contextes
Pour renouer avec les références psychanalytiques,
ce champ là est celui de la génitalité qui
intègre donc tous les autres stades et les dépasse.
Cela rend particulièrement signifiant les relations sexuées
comme d’accomplissement. On retrouvera dans ce champ la notion
d’individuation qui consiste en une réunion, dans la personne,
de ses tendances masculines et féminines. Ces deux tendances
peuvent être vues aussi comme celles de la conquête
et de l’Involution, la première culturellement masculine
et la seconde féminine. Leur intégration avec prédominance
des réalités et prédominances du Sens est
créatrice ici et leur rencontre destructrice dans le champ
de la dégradation. Ces deux champs sont ceux où
peuvent s’ajuster des relations qui se cherchent dans des cohérences
différentes.
La réunion de l’anima et l’animus dans l’Individuation
se situe comme l’indique Jung au delà du moi qui prédomine
seul dans la conquête. Le travail d’accomplissement est
celui que peut viser une relation analytique qui renouvelle aussi
éventuellement des processus non accomplis au cours de
l’évolution personnelle. Il consiste à prendre
conscience de ses autres Sens aussi. D’une manière générale
toutes pratiques, mais aussi toutes relations dont la fonction
est notamment d’élucidation participent de ce champ. Ainsi
cela peut être autant une démarche, qu’une méthode,
qu’une attitude pour devenir une discipline et une maîtrise.
Les voies de l’accomplissement sont multiples autant que de disciplines
possibles. Ces termes rappellent les traditions ésotériques,
les traditions orientales et diverses religions. On peut en effet
y trouver des références proches sous des langages
différents. Depuis la séparation des états
et des religions, les premiers dans les objectifs collectifs
qu’ils se proposent et leur organisation de la société
ont tendu à exclure les finalités de l’accomplissement
qui reviennent maintenant derrière cet intérêt
pour le religieux, l’ésotérique, le paranormal
même mais aussi celui pour les sciences humaines.
Les sciences fondamentales aussi renouvellent leur rapport à
la nature avec le retour du Sens et du sujet dans le processus
de connaissance. Les choses et les êtres ne sont pas qu’objectifs,
chaque fois que commencent à se poser des questions de
Sens , de cohérences, de vécu, de connaissance,
de finalité, et au fond de communication.
Historiquement les philosophies et les religions ont pour la
plupart traité de ces questions sans avoir toujours bien
distingué l’ordre du Sens de l’ordre des réalités
; comme en psychanalyse, les contenus psychiques en tant que
réalités de leurs processus en tant que cohérences
activées.
La MAITRISE rappelle le compagnonnage avec la présence
des apprentis. Il n’est pas certain que leur Sens ait toujours
été dans l’accomplissement qui ne s’accommode guère
du secret et de l’occulte même s’il reste discret et non
spectaculaire.
En tout cas, là comme dans des disciplines professionnelles,
artistiques ou spirituelles, on a de nombreux exemples de ce
que pourraient être des pratiques de l’accomplissement.
Encore faut-il qu’elles prennent Sens dans les réalités
et les situations actuelles. C’est pourquoi il y a plus à
inventer qu’à importer d’Amérique, d’Orient ou
du passé. On peut y trouver des situations et des pratiques
homologues ce qui fait l’intérêt de leur étude
mais la MAITRISE ne peut jamais se développer que dans
le milieu culturel qui la porte et ou elle peut s’exercer.
Pour terminer avec le champ de l’accomplissement, il faut signaler
que la théorie des Cohérences Humaines qui sous-tend
tout ceci, rend compte aussi des mécanismes qui produisent
grâce au conSensus de la communication avec autrui, la
conscience des réalités puis, par confrontation
de réalités homologues, conscience du Sens ou de
leur cohérence. Cette dernière peut s’exprimer
dans la conscience du "je" qui ressent et dont ce Sens
est donné aux réalités. Cela demanderait
de trop longs développements et approfondissements pour
figurer dans ce texte. Sachons simplement que presque toutes
les applications de la théorie des Cohérences Humaines
y ont recours par leurs démarches leurs méthodes
et leurs techniques.
Observation: la théorie de l’évolution
humaine développée après 1991 apporte des
éclairages importants sur le chemin d’accomplissement,
les voies et les étapes de maturation et de maîtrise,
et les processus de progression.
f- Points de vues sur les autres champs
Avant de passer aux utilisations de la carte générale
des cohérences et des jeux d’identités, il est
intéressant d’observer le point de vue des identités
d’un champ sur celles des autres. On examinera ainsi les relations
qui ne se stabilisent pas sauf si se trouve un champ commun.
Le Sens d’un type d’identités correspond aussi à
ses préactivations, c’est-à-dire au Sens qu’il
donne au monde et en particulier aux manifestations des autres.
On va les écouter en parler.
f – 1 – points de vues de la conquête
Sur son propre champ, on en a déjà traité
avec le problème des causes communes ou différentes.
Ce qui est intéressant, c’est le rapport aux autres.
– La dégradation – Elle peut être
vu comme drame et en apprécier le côté spectaculaire.
Par contre la souffrance, le malaise, les obscurités paraissent
trop lourdes pour les ambitions. Son côté moral
y voit le mal contre lequel il faut lutter et ce qui justifie
son propre Sens de conquête. La dégradation c’est
ce qui n’a pas le Sens des valeurs élevées, l’insensé,
le mauvais dont il faut se séparer. On l’élimine
dans des lieux ad hoc ou on tâche de le guérir scientifiquement.
Le seul intérêt de la dégradation est quelquefois
son spectacle ou ce dont on peut faire spectacle pour s’en distancier.
La réaction générale est la distance et
le cloisonnement.
– L’involution – Ce qui frappe l’homme de la
conquête, c’est l’irréalisme et l’absence d’ambition,
son inverse, son désir secret quelquefois. Pour lui caractère
intuitif, sensible, subjectif est une affaire de femmes, pas
une affaire d’hommes qui doivent être plus réalistes,
constructifs, objectifs et rationnels (cela évolue avec
la crise de la conquête). L’involution c’est agréable
mais ce n’est pas sérieux, c’est du parasitage. Ils sont
bien gentils aussi mais pas très malins, ce sont de doux
rêveurs dont il ne faut pas longtemps s’embarrasser, des
utopistes aussi.
– L’accomplissement – Ceux là compliquent
tout, ils posent trop de questions, coupent les cheveux en quatre.
Il faut être plus actif, plus pratique moins théorique.
Les personnes de la conquête gardent quelquefois une certaines
attirance pour les connaissances qu’ils soupçonnent et
prennent pour un savoir supérieur qui ferait bien dans
leur panoplie. Ils s’évertuent donc quelquefois à
les imiter, dans les formes, mais c’est bien compliqué,
il faut rester les pieds sur terre, rester concret. Il y a bien
des raisons techniques, économiques, rationnelles pour
ne pas trop perdre son temps à de telles élucubrations.
On y perdrait son identité et sa place dans la société,
risque majeur pour la conquête.
f – 2 – points de vue de la dégradation
Sur son propre champ, il est critique bien sûr, se crispe
ou se lamente.
L’involution – Il faut distinguer deux points de vue.
Soit on se sent agressé par des gens qui ne s’en font
pas. On les trouve mous, collants, mais aussi dangereux avec
leurs utopies qui veulent tout mettre par terre. Ce sont des
gens qui ne se rendent pas compte et qui verront bien… ce qu’ils
verront. Tôt ou tard la vie le leur fera payer (il y a
quelques "jeunes" qui peuvent être visés
au passage avec leurs alliés quelquefois les vieux et
les femmes). Soit par ailleurs, cela paraît comme des plaisirs
interdits pour soi et cela renforce dans l’amertume, la morosité
et des comportements d’échec. Les autres ont bien de la
chance, ils ne s’en rendent pas compte.
– L’accomplissement – Ce sont des exceptions
qu’il ne faut pas trop chercher à comprendre, ce n’est
pas donné à tout le monde. Les gens dans l’accomplissement
peuvent être vus comme dans la dégradation avec
une belle inversion. Ils sont considérés comme
dangereux avec leurs idées et ils peuvent provoquer des
accidents "pour les gens faibles". Par contre leur
pouvoir supposé séduit et les gens de la dégradation
sont tentés de récupérer ce qu’ils trouvent
chez les autres en le pervertissant (inconsciemment). Ils en
font des pratiques occultes avec des moyens de culpabilisation
ou de destruction pour eux et pour les autres. Par contre ils
évitent d’avoir trop de contact avec ceux d’en face surtout
lorsqu’ils sentent que leur jeu pourrait transparaître,
que leurs pseudo certitudes sont fondées sur des angoisses.
-La conquête – Cesgens là sont plus rassurants
que les précédents. Ils sont réalistes et
pour certains, dans la dégradation, on voudrait bien participer
à leur réussite. Cela réactive encore des
comportements d’échec et ces tentatives manipulatoires
pour tâcher d’y arriver sans succès. On a tendance
aussi à trouver qu’on serait meilleur qu’eux là-haut
et que l’on est pas reconnu à sa juste valeur. Un autre
point de vue bien fréquent est de considérer les
gens de la conquête comme ayant trop le goût du pouvoir.
Ce sont des gens "bidons" à qui on prête
les plus bas desseins et l’absence de scrupules. Le chef, c’est
l’homme à abattre, les militants ses complices dupés.
f -3 – Points de vue de l’involution
Il n’y a pas toujours une grande conscience des réalités
mais une sensibilité qui permet de se sentir attiré
ou non.
– L’accomplissement – Cela parait très
intéressant, surtout le côté idéaliste
et la sensibilité de ces gens. Par contre ils sont beaucoup
trop sérieux et c’est trop difficile pour soi. Ce qu’ils
font paraît intéressant mais on ne s’y investit
pas trop. Ces gens là font aussi des choses trop dures
qu’on ne se sent pas capable de faire. On aime en parler entre
soi. On trouve cependant qu’ils ne devraient pas s’ennuyer avec
des problèmes ou des gens pas intéressants, alors
qu’en général ils sont plutôt gentils mais
un peu distants cependant.
– La conquête – Ceux-là on les
admire mais on ne veut surtout pas se mêler de leurs affaires.
Il sont trop froids, trop matérialistes. Ils ne tiennent
pas assez compte des hommes. Ce qu’ils font paraît intéressant
même si on ne comprend pas bien quel est l’intérêt
de courir toujours comme ça. Ils ne prennent pas le temps
de vivre et se tuent à la tâche ou avec toutes leurs
obligations. On se demande comment ils font tout ça ils
sont très forts et il y a parmi eux des hommes admirables
et dévoués. De temps en temps ils en demandent
trop et voudraient que tout le monde fasse comme eux.
– La dégradation – Dans l’ensemblece
sont des gens malheureux. Ils n’ont pas de chance ou font leur
propre malheur. Il vaut mieux ne pas trop se mêler de leurs
affaires ni se laisser envahir. Quand on veut les aider, ils
ne sont même pas reconnaissants. Ce sont des gens quelquefois
dangereux ou trop égoïstes. Par contre de temps en
temps en leur compagnie on se donnerait quelques frissons d’effroi,
mais pas trop, on y laisserait sa santé et sa tranquillité.
f -4- points de vue de l’accomplissement
Par définition on voit les autres comme ils sont, mais
on sait reconnaître ses propres appartenances à
leurs différents Sens. De ce fait on s’en sent moins dépendant
et donc moins réactif. On a le choix d’entrer ou non dans
les relations avec, pour soi au moins, conscience du Sens de
cette relation, quelqu’il soit si on l’a choisi. Il ne faut pas
bien sûr idéaliser cette conscience. C’est en tout
cas la tendance dans ce champ. Ce qui n’est pas clair ou qui
fait réagir peut toujours être occasion d’élucidation
et par là d’approfondissement de la connaissance de soi.
Il n’y a pas lieu de passer en revue les points de vue sur les
autres champs qui sont vus comme ils sont. Comme on peut les
voir lorsque l’on est soi-même assez clair ou peu impliqué
par des réactions personnelles inconscientes, (c’est-à-dire
dont on ne s’aperçoit même pas quelques fois ou
qu’on ne maîtrise pas en tout cas).